En ce temps-là, il était difficile de se nourrir à sa faim, surtout pour les fous, rejetés hors de la société. C’est dans un de ces lieux qu’on rencontre Lucien Bonnafé, à Saint-Alban, en Lozère, un pays où traînent des légendes, comme celle de la bête du Gévaudan. Et Lucien Bonnafé dirige un établissement qu’il convient d’appeler un asile, un des ces lieux où l’on accorde l’asile, la protection. Un asile protège les fous du monde extérieur. Car ce monde est violent, on y encourage à dénoncer son voisin, on s’y méfie de tous. Or, dans l’asile de Saint-Alban, les médecins pensent qu’ils soignent des humains d’abord. Ces humains qu’il faut accompagner jusque dans la mort, alors qu’auparavant les fous n’avaient là que des tombes anonymes et personne pour leur y faire une cérémonie d’adieu. C’est dans cet asile qu’arrivent en 1943 une jeune résistante, Denise Glaser, et un peu plus tard Nush et Paul Eluard. De leur rencontre, Didier Daeninckx fait un récit où la poésie touche le réel, où la création artistique naît dans « cette nuit peuplée » (comme l'écrit ailleurs Lucien Bonnafé), création qu’on désignera sous le nom d’art brut. Où résister se conjugue au présent, toujours au présent.
Didier Daeninckx était présent le 8 novembre au marché dominical d'Alfortville (94), sous la Tonnelle des Amis de la Librairie L'Établi.