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Janua Vera, Jean-Philippe Jaworski

Par Maliae

novembre 17, 2015

Janua Vera, Jean-Philippe Jaworski
Résumé : Né du rêve d'un conquérant, le vieux royaume n'est plus que le souvenir de sa grandeur passée... Une poussière de fiefs, de bourgs et de cités a fleuri parmi ses ruines, une société féodale et chamarrée où des héros nobles ou humbles, brutaux ou érudits, se dressent contre leur destin. Ainsi Benvenuto l'assassin trempe dans un complot dont il risque d'être la première victime, Ædan le chevalier défend l'honneur des dames, Cecht le guerrier affronte ses fantômes au milieu des tueries... Ils plongent dans les intrigues, les cultes et les guerres du Vieux Royaume. Et dans ses mystères, dont les clefs se nichent au plus profond du cœur humain...

Avis : Ce livre comporte huit nouvelles qui vont tracer la vie de différents personnages vivant dans le même monde, le vieux royaume. Ces personnages n'ont rien en commun, ils ne se connaissent pas, et vont tous montrer une facette de ce monde au travers de leurs histoires. Ce sont des personnages assez différents d'ailleurs. Chevalier, tueur à gage, fille de village, paysans d'un village paumé, moine d'un culte, guerrier etc.

Chaque histoire est baignée d'une atmosphère, différente à chaque fois. Conte, burlesque, action, l'auteur a réussi à nous baigner dans ses récits, on se retrouve pris dans chacun d'une façon différente. Certaines nouvelles vont s'avérer mystérieuses, une autre prends plutôt pied dans les complots et autres magouilles politiques, on est face à la chevalerie, ou bien à l'histoire de toute une vie qui se transforme en conte à cause (ou grâce à) d'une rencontre. La force de l'auteur c'est que son style diffère selon ce qu'il raconte, les personnages sont très travaillés et c'était hyper sympa à lire. D'autant plus que la chute des histoires en rendaient le goût amer ou bien meilleur encore, chaque chute était bien calculée et ne faisait pas perdre son intérêt à l'histoire, bien au contraire.
Pour en revenir au style, une des nouvelles " Un amour dévorant " parlent de deux personnes qui courent dans la forêt, et l'auteur a choisi un style presque haché, un peu impersonnel, qu'on lit comme une course justement. C'est très bien maîtrisé et franchement on se laisser vraiment emporté. Dans une de mes nouvelles préférés " Jour de guigne" , le style est plutôt drôle, il se moque des personnages, c'est burlesque et pourtant à un moment on tombe un peu dans l'horreur, l'effrayant, pour revenir à ce burlesque. C'était hyper bon à lire. Je pense également à la première nouvelle " Janua Vera " qui est écrite un peu comme un rêve, et puisqu'il parle du rêve de Leodegar c'est plutôt judicieux. " Une offrande très précieuse " donne l'impression d'être un fardeaux, pas dans le sens où la nouvelle est lourde, mais dans le sens où les personnages souffrent, on sent leur souffrance physique surtout, qui cache la vraie souffrance, celle morale, et c'est une nouvelle assez mystérieuse (de même qu' " Un amour dévorant " ) emprunte de magie et mystère.

Ma deuxième préférée " Le service des dames " va entourer le héros d'une sorte d'aura de héros (je ne vois pas comment le dire mieux), il a un côté mystérieux, il est fort, juste, droit, et il est plutôt sûr de lui. Il est entouré de personnes qui le connaissent, lui font confiance et le servent très biens. Il fait penser à genre de Robin des bois.
Il y a des nouvelles qui m'ont rendu plus tristes que d'autres, je pense surtout à la nouvelle " Le conte de Suzelle " qui m'a fait pleurer à la fin, l'histoire est dure, elle représente la vie d'une femme dans un village en partant de son enfance. C'est une vie assez dure et elle ne semble avoir que très peu de contrôle sur les événements de sa vie. Cette nouvelle a une trace de magie en elle, encrée en elle, et dont on attend le resurgissement. La chute de " Mauvaise donne " est carrément ironique, c'est aussi la première nouvelle écrite à la première personne, ce qui nous place dans la tête d'un personnage égoïste, un tueur à gage qui va se retrouver pris dans un complot. Pourtant à sa manière il se montre attachant, son intelligence et sa prise de risque nous le rend sympathique.
Finalement la dernière nouvelle, " Le confident " est très bien tournée, c'est la deuxième nouvelle écrite à la première personne, écrite avec un style assez oral. Elle conclue très bien le livre à mon avis.

Je me suis vraiment laissée prendre au jeu de chaque nouvelle, c'était un véritable plaisir à lire, et j'ai totalement adoré ! Je recommande.

Phrases et passages post-itées (attention y en a pleins) :
" Face à lui s'élance, démesurée et inachevée, la silhouette obscure de sa capitale. Les temples, les basiliques, les hôtels nobles, les arcs lui affrontent leur morgue de marbre, leurs statues triomphantes, l'indifférence du silence. "

" Mais je ne parvins plus à dormir ; ma blessure me lançait obstinément. Et le silence, autour de moi, devenait assourdissant de présences. " " Un frisson d'horreur parcourut tout le scriptorium. Les bésicles chutèrent, les bouches béèrent , les yeux s'exorbitèrent, les teints devinrent médicamenteux, et - comble de l'horreur ! - quelques plumes déraillèrent même sur les documents balafrant des heures de copies besogneuses. " " Les témoins soumis à la torture (en suivant la procédure extraordinaire) ont certes fourni des informations, mais elles se contre-disaient toutes. Ils ne parlaient que pour abréger le cours normal de l'interrogatoire - il va sans dire que je les poursuivis pour faux témoignage et obstructions à la justice... " " Ils ne parviennent pas à se rejoindre, ils ne parviennent pas à se perdre. Comment pourraient-ils échapper l'un à l'autre? " " Je contemple les ténèbres, je ne les vois pas. "

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