Cela faisait longtemps que je n’avais pas lu autre chose que de la fiction, ou plutôt, cela faisait longtemps que je n’en avais pas parlé sur ce blog. Aujourd’hui donc, pour varier un peu, je vais vous parler d’une « enquête sur une passion littéraire » (c’est le sous-titre) : Relire de Laure Murat.
De la relecture compulsive de l’enfance, en passant par celle obligatoire pendant les études, ou celle plus érudite et personnelle à l’âge adulte, la relecture possède de nombreuses facettes et on peut la voir comme une punition, une répétition, un plaisir, un refuge ou encore bien d’autres choses. Laure Murat a voulu se pencher sur cet acte mi-compulsif, mi-réfléchi, qui semble toucher bien des lecteurs. Avouez, vous-même vous avez déjà relu. Et je ne parle pas que pour les études. Mais si, souvenez-vous, ce livre que vous lisiez enfant et que vous avez racheté une fois plus grand. Ou cette saga que vous avez re-dévoré il y a peu. Aaaaah, vous voyez ? La relecture touche tout le monde et il est très intéressant de voir un peu ce qui se cache derrière tout cela. Est-ce pour mieux comprendre ? Mieux s’approprier une œuvre ? Est-ce qu’on perd le sens premier à trop relire un livre, ou au contraire, est-ce qu’on le trouve de cette façon ?
Vous ne vous posiez pas cette question, mais Laure Murat l’a fait pour vous et elle a bien eu raison. Jamais je n’aurai eu idée de m’interroger sur la pratique de la relecture, mais ce livre rend cela vraiment passionnant et nous renvoie à nos propres habitudes de lecteur.
Alors, comment l’auteure a-t-elle procédé ? Elle a envoyé un questionnaire (que je reproduis partiellement à la fin de cet article) à deux cents lecteurs (surtout des gens du livre, des professeurs, des éditeurs, des auteurs, et pas mal de noms connus) en leur laissant le choix complètement libre concernant la forme de leur réponse. Et après des mois de travail à comparer les données recueillies, elle a fait un état des lieux. Dans une première partie, elle nous explique sa démarche et les points qui se recoupent le plus : des généralités sur la relecture (qu’est-ce qu’on relit le plus ? Quel genre ? Etc.) ainsi qu’un chapitre dédié uniquement à Proust puisque visiblement La Recherche se prête très bien à cet exercice (ce que je veux bien croire!). Je vous rassure, tout cela n’est pas impersonnel et imbuvable, au contraire ! Si vous avez un petit peu de curiosité pour ce sujet, la lecture est très aisée et agréable malgré quelques pages d’universitaire (ça vous rappellera la fac, tiens!).
Dans une deuxième partie plus conséquente, Laure Murat a directement laissé la parole aux lecteurs en publiant plusieurs témoignages sur la relecture qui font suite à son questionnaire. Olivier Rolin, Dominique Noguez, Christine Angot, Annie Ernaux, Jean Echenoz entre autres se sont prêtés au jeu et nous livrent leur vision de la relecture. On retrouve énormément la mention de la relecture enfant, ou celle de Proust bien sûr, mais aussi des choses plus particulières et personnelles (et « se relire » alors?). Ces témoignages sont vraiment très intéressants, parfois drôles, parfois émouvants, donnant toujours une autre vision de la relecture. Les styles se succèdent, les différents niveaux d’enthousiasme également et on ne s’ennuie jamais, les pages se tournent très vite.
Ce livre enquête se lit en effet très rapidement (en une ou deux journée pour les grands lecteurs). La relecture est un acte concret et « actif » (notez que l’auteure a nommé son livre Relire et non pas La relecture) et la grande lectrice (et relectrice) que je suis a énormément apprécié en apprendre plus sur cette pratique.
Je vous mets ci-dessous une partie du questionnaire de Laure Murat à laquelle je me suis amusée à répondre. Oh, mes réponses seront bien moins impressionnantes que celles que vous trouverez dans ce livre, je suis jeune et je n’ai pas encore relu grand chose. Je serai très curieuse de voir vos propres réponses donc n’hésitez pas à les poster sur votre propre blog/site ou en commentaire. Je publierai les réponses les plus intéressantes/intrigantes à la suite de cet article !
1. La première expérience de la relecture vient de l’enfance. Soit que l’enfant réclame qu’on lui lise chaque soir la même histoire, soit qu’il lise lui-même à répétition le même livre. Quelle a été votre expérience d’enfant de la relecture ? Quelle était, selon vous, la nature de la jouissance procurée par cette habitude ?
Je n’ai que peu de souvenirs de lectures précises dans l’enfance. J’étais une boulimique de la lecture et je me suis enfilée des tonnes et des tonnes de livres dès que j’ai su lire. Il y a toutefois un livre qui m’a marquée, que j’ai du découvrir vers 10 ans : La vie à reculons de Gudule. Ce petit roman sur un jeune garçon qui a le SIDA et son amitié avec la narratrice m’avait sidéré à l’époque et je l’ai relu des dizaines de fois avec beaucoup d’émotion. Il y a quelques autres romans de l’enfance que j’ai pu relire, notamment ceux de Marie-Aude Murail, première auteure que j’ai rencontré « en vrai » et que j’ai tout de suite aimé, elle et ses romans. Relire ces livres de l’enfance, c’est replonger à une période d’innocence que l’on aimerait retrouver.
2. Parmi les mots suivants, quel serait celui qui semble le mieux définir votre expérience de la relecture ? Répétition, reprise, réinterprétation, redécouverte, refuge ou autre (préciser).
Sans hésitation, redécouverte.
3. Pourriez-vous décrire votre pratique actuelle de la relecture, si possible en partant d’exemples précis ?
– Pourquoi relisez-vous ?
Je ne suis plus étudiante maintenant, donc je relis pour le plaisir un texte que j’ai déjà aimé (en général des livres de l’enfance), ou pour mieux comprendre un texte qui m’a questionnée (en général des classiques).
– Relisez-vous parce que vous avez oublié un livre, ou parce que vous vous en souvenez ?
Parce que je me souviens qu’il faut que je le relise pour telle ou telle raison ! Souvent, je ne me rappelle presque jamais de l’intrigue, seuls les personnages me marquent parfois.
– Quel est le livre que vous avez le plus relu ?
Les quatre premiers tomes de Harry Potter (pas très original, je sais).
4. Relire est une pratique qui est souvent invoquée par rapport aux « classiques ». Si bien que relire empêcherait souvent de découvrir des nouveautés. En ce sens, diriez-vous que la relecture est un acte conservateur qui s’oppose à la lecture ?
Ma réflexion n’ira pas si loin. Après tout, il y a tellement de bonnes choses à prendre et comprendre dans les « classiques » que j’inviterai toujours les gens à les relire. Personnellement, je suis tellement curieuse que j’aimerai tout lire, alors forcément relire me paraît parfois comme un acte qui m’empêche de prendre connaissance des nouveautés. Mais quelques fois, j’aime me plonger dans une relecture, une valeur sûre, ça me permet de me ressourcer.
Ce n’est qu’une partie du questionnaire, mais j’espère que vous vous prêterez au jeu. J’ai hâte de lire vos réponses !