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Exposition « dans les prisons de Lyon » Ernest PIGNON-ERNEST & Bruno PACCARD à la Galerie A-M& Pallade | Lyon

Publié le 04 décembre 2015 par Philippe Cadu
Exposition « dans les prisons de Lyon » Ernest PIGNON-ERNEST & Bruno PACCARD à la Galerie A-M&  Pallade | Lyonhttp://www.pallade.net/ Vernissage en présence des Artistes jeudi 10 décembre de 18h à 20h30

Du 10 décembre au 23 janvier 2016

Dessins et photographies de l'intervention des artistes avant la démolition de la prison Saint Paul à Lyon et la construction de l' Université Catholique. Un travail sur la mémoire et l'oubli, l'humain et l'inhumain, la justice et l'injustice, l'enfermement et la liberté, ... tant de la période récente que celle de la 2ème guerre mondiale où la prison a été utilisée pour l'incarcération et la condamnation de nombreux résistants.

Des dessins qui suintent les murs

Exposition « dans les prisons de Lyon » Ernest PIGNON-ERNEST & Bruno PACCARD à la Galerie A-M&  Pallade | Lyon
Dans les années 1990, à la demande de certains détenus de la prison Saint-Paul à Lyon, j'étais venu animer quelques séances de l'atelier peinture.
En 2011, Daniel Siino qui était à l'origine de ce premier contact m'annonce que la prison désaffectée va devenir un campus universitaire et que Bernard Bolze a suggéré à l'Université Catholique qui va en prendre la direction de solliciter Georges Rousse, Patrice Giorda et moi, afin que nous y intervenions avant des travaux qui entraîneront une transformation radicale.
Lors de ce retour dans la prison vide, j'ai découvert au sol d'une cour, une plaque délavée à peine lisible : " Tombés sous les balles nazies ", et relevé quatre noms. J'ai pu rencontrer la nièce de l'un d'eux, Emile Bertrand. Au cours de cette rencontre, elle me montra des photos de ce résistant souriant de vingt trois ans, les lettres à sa mère avant son exécution et elle m'apprit qu'il n'était pas tombé sous les balles nazies, mais qu'il avait été arrêté par la police française et guillotiné par un bourreau français.
Les prisons de Lyon ne sont pas des prisons ordinaires, Barbie y a sévi, Max Barel y est mort ébouillanté, Jean Moulin, Raymond Aubrac... de nombreux résistants y ont été emprisonnés, torturés.
Avant la destruction des lieux et qu'avec le campus s'installe une amnésie collective, j'ai tenté d'y réinscrire par l'image le souvenir de certains, célèbres ou inconnus, qui y ont été incarcérés. Dans différents lieux, couloirs, cellules, leur image, leur visage : il ne s'agit pas de les représenter mais de leur redonner une présence.

YO-YO. Dans cette architecture carcérale du XIXe siècle, les murs affirment leur poids, leur pesante épaisseur, poids de pierres, de blindage, poids d'histoire et de douleur... Les murs sont coiffés de ces dentelles d'acier aiguisées que sont les barbelés dans lesquels, dérisoires, pathétiques, sont accrochés, comme des insectes dans une toile d'araignée, des morceaux de vêtements, de couverture et des dizaines de yo-yos. Bouteilles de plastique qu'avec l'aide d'une ficelle ou d'un lambeau de drap les détenus tentent de faire passer par balancement d'une cellule à l'autre, messages, café, cigarettes, shit, bouteilles à la mer le plus souvent naufragées dans les barbelés d'où elles pendent comme autant d'ex-voto qui n'ont rien à espérer.
Cette image de yo-yos pendus, la lecture de souvenirs et quelques dialogues avec d'anciens détenus m'ont suggéré des allégories de yo-yos, des yo-yos chargés de colère, de désir, de culpabilité, de désespoir, d'amour, de signes à leurs enfants, à leurs parents, de rêves...
C'est aussi en voyant ces bribes d'espoir pathétique, ces chaussures, ces morceaux de chemises, de couvertures accrochés aux pointes des barbelés que j'ai pensé aux corps qui les avaient habités et que m'est revenu en mémoire que chaque année une centaine de jeunes gens se pendent en prison... De là, ce drapé, ce suaire qui dissimule un corps anonyme, dont on ne devine qu'une main, qui semble pendre des barbelés comme les linges échoués.

ECCE HOMO. Sans juger des raisons qui ont amené à l'enfermement des condamnés, il y a dans le fait même de la détention une atteinte d'ordre ontologique qui dépasse tel ou tel cas particulier et demandait à se fondre, se reconnaître en une seule image à la fois unique et multiple, singulière et universelle. Comme : " Voici l'homme, ecce homo ". Sa main ouverte est la même que celle qui apparaît sur le drap/suaire. Sur ces murs redonner sa place à l'histoire humaine.

Ernest Pignon Ernest

PARCOURS JEAN GENET. Commencé en 2006 sous le Pont de Recouvrance dans les docks de Brest, mon " Parcours Jean Genet " devait comme une évidence s'inscrire dans cette " étape prisons "...

Galerie anne-marie et roland pallade, 35, rue Burdeau 69001 Lyon Tél.: +33 (0)9 50 45 85 75


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