Ici, on aime JJ Abrams. Certes, il tire sur la corde et fait un peu le mariole, mais il a aussi apporté un brin de folie à la série TV, à ses reboots de Star Trek et s'est montré incontournable à force de se revendiquer de la culture geek, pour le meilleur et pour le pire. Aujourd'hui, le bonhomme est responsable du film le plus attendu, le plus fantasmé, le plus redouté au monde (jusqu'au prochain). Et avec toutes les parodies, les hommages et les reprises dans la culture de masse, peut-on encore s'extasier devant un épisode de Star Wars, quand bien même celui-ci a été annoncé depuis plus de trois ans?
D'emblée, citons l'ultime frontière : on jugera le film en tant que film, et pas en comparaison de de la trilogie originelle, de ses préquelles ou des attentes véhiculées par des mois de marketing. À vrai dire, je n'avais vu aucun trailer si ce n'est le tout premier, et avais réussi à ménager mes attentes. Mais ça ne suffit plus. Il faut tout revoir à la baisse. L'opération marche parfois, quand le film reprend des schémas connus et s'affaire à recenser tous les moyens possibles de réactiver la nostalgie : personnages, musiques, vaisseaux et lieux communs, tout y passe. On y croit un moment malgré des débuts un peu laborieux, ou tout s'enchaîne vraiment trop vite. Mise en scène unidimensionnelle, belle satisfaction des ouvriers du film en plein travail de mémoire, une certaine envie de revenir aux débuts : la ferme, le désert jaune, Mos Eisley. Mais le tout prend très rarement, si ce n'est via deux nouveaux personnages : Finn (Moses, dans Attack the Block de Joe Cornish) jeune stormtrooper en pleine crise de conscience, et Rey (Daisy Ridley, tellement, incroyablement réminiscente d'une jeune Keira Knightley EN PERMANENCE), nouveau point d'ancrage à destination des nouveaux fans. Les deux personnages ont potentiellement deux belles voies à explorer, pour s'épanouir et exister pleinement. Mais les purs moments d'introspections sont passés sous silence et ignorés si cruellement qu'on ne peut qu'imaginer ce qui aurait pu être.
Reste qu'il y a quelque chose de très physique et slapstick dans la dynamique entre Finn et Rey; dans la chute des corps, les emportements (et les atermoiements), les courses sans relâches dans le désert et la forêt; quelque chose après laquelle semble courir Abrams en permanence, quelque part sur les traces de Spielberg (qu'il suivait déjà à la trace dans Super 8) et le souvenir d'une certaine idée du divertissement américain des années 80, Indiana Jones en tête.
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Le tout fait très forcé, et si par le passé on s'inquiétait des dérives de la mise en scène de JJ Abrams, il ne reste plus grand chose à se mettre sous la dent : tout est préparé et balisé pour représenter Han Solo, Chewbacca et compagnie sous des abords très poseurs et sans réelle inventivité. Comme si l'hommage, le caméo suffisaient pour brièvement rassasier les attentes énormes de tout un chacun rassemblés devant l'écran. Certes, il serait de mauvaise foi de dire qu'on ne ressent rien devant les apparitions de tels ou tels personnages mais l'équipe Disney semble avoir choisi les moyens les plus faciles pour se faire. Une blague par-ci (BB-8 est le nouveau R2D2, so cute), un clin d'oeil par-là (tu crois que je t'ai pas vu, robot de Silent Running?) et les traditionnelles moments 'forcés' (haha?) pour l'emporter. Un brin paresseux.
Et c'est dans ce recyclage que se pose la douloureuse question de cet épisode "VII", qui se retrouve empêtré de ses acteurs has been qui n'ont jamais fait mieux (Harrison Ford a part) que Star Wars. Comment les intégrer a la mythologie étendue tout en présentant de nouvelles têtes d'affiches charismatiques susceptibles de prendre le relai? Harrison Ford fait presque peine à voir dans son vieux costume de Han Solo (il incarne littéralement le symptôme du vieux sur le retour) mais Carrie Fischer n'est pas en reste avec quelques scènes laborieuses et embarrassantes dans ses vieilles frusques du Retour du Jedi. Le cadre parvient à peine à cacher la bedaine de Mark Hamill mais il a encore deux ans pour se préparer : rien n'est perdu.
Le film se trouve très satisfaisant à retourner sur les lieux du crime; même si les retrouvailles font forcées, certains moments tirent tout naturellement sur la corde nostalgique: Han Solo et Chewbacca nous refont visiter les coursives du Faucon Millenium, les premières apparitions de sabres-lasers ou de X-Wings font mouche, mais au final on s'attend à tout moment à voir l'avalanche de références plomber l'ensemble et c'est exactement ce qu'il se produit. Il est même impossible de passer outre ce douloureux détail tant cet épisode VII apparait comme un remake de l'épisode IV, dans sa structure, ses enjeux et la présentation de ses personnages. 32 ans après Le Retour du Jedi, c'est frôler le gâchis, non? Et de gâchis, il en est ouvertement question dans la dernière bobine du film, quand très péniblement, Abrams et son équipe nous jettent dans les pattes un retournement de situation unilatéralement faible, un sacrifice si évident qu'il n'est là que pour énerver les geeks. Dans son ensemble, Le Réveil de la Force n'apparaît que comme un épisode de l'attente, qui essaie tant bien que mal de remplir son contrat pour paraître plus intéressant qu'il ne l'est vraiment, avant la suite qu'on nous promet "encore plus démente". On ne peut pas vraiment en vouloir à Abrams de s'être complètement loupé; le cahier des charges semble énorme et infini (voir cet épilogue douteux sacrement foiré qui essaie encore de pousser le souvenir dans la bouche du spectateur). Maintenant qu'on délaisse peu à peu JJ Abrams à son royaume de fanfreluches et de beaux joyaux éphémères, on s'inquiète légitimement de voir ce que parviendra à accomplir Rian Johnson, pour le coup vraiment moins consensuel que ses collègues, sur l'épisode 8 prévu dans deux ans.
May the Force be with you?
Taffez un peu plus la prochaine fois, merci.