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Un été prodigue de Barbara Kingsolver (mars 2002)

Par Deslivres.fr
Barbara Kingsolver est née en 1955 dans le Kentucky. Ses récits sont nourris d'une connaissance passionnée des Appalaches et celle de sujets comme l'agriculture ou la communauté indienne.
Un été prodigue est traduit par Guillemette Belleteste.
Un été prodigue raconte l'été de trois femmes. Les récits consacrés à chacune d'entre elles alternent.
Deanna est garde forestier et protège les animaux de la forêt. Elle sait tout de leurs comportements et s'en imprègne alors elle ne voit pas arriver d'un bon oeil le beau chasseur.
Lusa, elle, a beaucoup étudié la biologie et se retrouve dans la maison de la belle-famille.
Quant à Nannie Rawley qui va sur ses quatre-vingts ans, elle est observée par son sévère et grincheux contemporain de voisin.
Ce monde féminin est sans cliché. Point des baroudeuses, point de pâles copies d'hommes à la conquête de l'ouest.
D'ailleurs, elles y sont déjà à l'ouest.
Non qu'elles soient coupées de la société puisqu'elles mènent des activités professionnelles qui les passionnent mais elles se tiennent en marge des attentes qu'une société a de la femme. Ces personnages n'ont pas à se déplacer pour conquérir leur liberté - c'est sur place que chacune doit éclater ses carcans :
Deanna et ses principes d'indépendance, Lusa et le regard de sa belle-famille. Ces femmes se démènent avec leur désir. Mais il y a bien un moment où le mâle est là qui rôde (hou) et qui pourrait bien satisfaire ce désir. Un homme, oui, mais la liberté, qu'est ce que tu en fais ? On voudrait tant que ce soit une évidence cette liberté gagnée par Deanna. Or Kingsolver nous immerge dans la réflexion parfois tourmentée de ses personnages comme si aux abords du bien-être, elles étaient capables, toutes seules, de le fragiliser.
A aucun moment le ton n'est vindicatif. La force de ce roman est de nous transmettre un sentiment de plénitude, comme un éblouissement en haut de la montagne des Appalaches. Il est question de désir sexuel et de sensualité alors il n'y a pas de quoi s'énerver. Et puis, qu'il est rare de lire le regard d'une femme qui désire.
Va m'en trouver des livres qui t'invitent à ce point de vue. Peut-être madame de Rênal, page 16, dans Le Rouge et le Noir. C'est un livre qui apprend des choses sur les papillons, les coyotes et les pommes. L'écriture est profuse et rythmée. Les dialogues sont amusants et Kinsolver pratique l'autodérision à merveille. Soucieuse de détails, l'auteur écrit à la loupe. On suit docilement parce qu'il y a des tas de choses à apprendre. Elle se nourrit de préoccupations contemporaines, des conflits entre utilisateurs de pesticides et garants de l'équilibre écologique. Quand elle arrête sa narration, elle mêle à ses description des informations passionnantes sur le fonctionnement du champignon, de l'oiseau et du coyote et rebondit en soumettant ses personnages à des interrogations sur les règles archaïques des comportements humains. On sort épanouie de la lecture de ce roman. On n'est pas des bêtes tout de même. Et bien des fois, on a bien envie.
Et si alors que vous lisez ce livre, vous êtes dérangé(e) par un bourdonnant coléoptère, je vous en prie, évitez de prendre Un été prodigue pour l'écraser, observez la bête plutôt. Peut-être est-ce votre sexualité qui est en jeu.

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