Sorti hier en salles, la Fille du patron, premier film réalisé par le comédien Olivier Loustau est l’autre belle surprise de ce début d’année, avec Toto et ses sœurs dont j’ai parlé mardi dernier.
Connu du grand public essentiellement en tant que comédien, notamment chez Abdellatif Kechiche avec qui il a déjà tourné quatre fois, Olivier Loustau a choisi comme cadre de son premier long métrage un décor, et même une toile de fond qui a des résonnances personnelles avec sa propre histoire.
Fils d’ouvrier, il a en effet choisi de situer l’intrigue de son premier long métrage au sein d’une usine de textile dans laquelle une jeune femme, et accessoirement la fille du patron de l’usine comme le titre l’indique va faire un stage d’ergonomie dans une entreprise en proie à de grandes mutations.
Son histoire d’amour imprévue avec un chef d’équipe de l’usine pourrait avoir des incidences sur la sphère intime et professionnelle des protagonistes concernés.
Dès les premières scènes de « La fille du patron » qui commence par des scènes de matches de rugby et de scènes de groupe pour le moins vivantes, on voit ce que Loustau doit au cinéma de Kechiche , notamment dans la captation des scènes de groupe, toute en puissance et en énergie.
Et c’est en premier lieu grâce à ce souffle et cette vitalité qui irrigue la mise en scène que le film échappe au déjà vu de l’intrigue, car à première vue le film pourrait faire penser à pas mal de films récents sur le sujet.
Il faut dire que le cinéma français a pas mal abordé ce thème des rapports humains en entreprise ces dernières années, surtout depuis une dizaine d’années et notamment « Ressources Humaines » de Laurent Cantet, auquel on pense pas mal ; les deux films possédant quelques similitudes dans le scénario, et notamment l’irruption d’un fils d’un cadre dirigeant en tant que stagiaire.
Mais contrairement au film de Cantet,.la Fille du patron consacre une part non négligeable à peindre une belle histoire d’amour, qui occupe une bonne partie de l’intrigue du film et réussit à fondre cette romance dans la chronique sociale sans que l’un empiète sur l’autre.
Car on sent que Loustau a soigné particulièrement l’écriture de votre scénario, évitant le manichéisme des situations et des personnages, notamment celui de la femme de Vital qui n’est jamais chargé et à laquelle la trop rare Florence Thomassin offre sa finesse de jeu et sa personnalité. Outre Thomassin, le film offre à d’autres acteurs phares cinéma français des années 90 et un peu oublié aujourd’hui, comme Stéphane Rideau, Florence Thomassin ou Moussa Maaskri,… un peu sous-estimés par le cinéma français d’aujourd’hui un joli retour en force.
On sent que Loustau, plus second rôle que premier aime les acteurs, a fortiori secondaires et leur offre de beaux personnages.
Mélange de chronique sociale à Ken Loach empruntant pas mal de référence à Kechiche et Cantet déjà citées, la Fille du patron a aussi à avoir avec le cinéma néoréaliste italien, Scola ou de Risi, particulièrement dans sa manière de traiter avec pas mal d’humour et de bonne humeur des sujets graves…
Bref un très joli film à voir avant qu’il ne quitte l’affiche, car comparé à certains poids lourds comme le Tarantino, son charme fragile risque de ne pas peser très lourd, hélas…
Et pour ma part j'ai tellement aimé le film que j'ai eu la chance, grâce au cinéma le Comoedia qui m'avait invité à l'avant première de poser quelques questions au cinéaste, et normalement vous n'aurez plus beaucoup de temps à patienter avant la mise en ligne de cette interview exlusive...:o)