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La fin d'un monde atelier 10 bric à book

Par Eirenamg

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Comment ne pas être déprimée face à cette vue, une telle décrépitude à l’échelle du monde. En ce moment, c’est mauvaises nouvelles, sur mauvaises nouvelles, annonce de décès, d’attentats, de faits divers sordide. J’en ai marre, envie de me plonger la tête dans le sable et ne plus rien entendre. On ne peut pas créer une bulle autour de nous pour empêcher le marasme ambiant, la tristesse, la violence de nous atteindre. Peut être que nos brillants scientifiques au lieu de chercher des armes bactériologiques, technologiques pour mieux nous détruire feraient mieux de réfléchir à ça non ?

Recréer de la beauté, du lien, aider à des reconstructions plus rapides. Essayer de trouver une solution pour je ne sais pas moi, redonner un peu plus de raison à l’homme.  Parce qu’en ce moment ce n’est pas gagné, j’ai l’impression qu’on marche sur la tête, qu’on retourne en arrière et qu’on est de nouveau au Moyen-âge. Et ça fait flipper, comme ces vestiges d’urbanisme à moitié mort en face de moi.

Pourtant ces tours des gens on bien dû y habiter, s’aimer, construire, grandir et elles vont disparaitre rayer avec tous les souvenirs. Peut être que quelque chose de plus beau, grand sortira de tous ça. Ou allons nous encore être victime d’une aberration architecturale comme le sentiment d’un faux espoir politique de renouveau que je ressens actuellement.

Est-ce que l’histoire c’est éternellement recommencer les mêmes erreurs, accepter que les choses, les êtres, les nations meurent, se terminent et qu’on n'y peut rien ?

Ce sentiment d’impuissance, de fin de règne, me pèse actuellement, comme si j’étais lancée dans une course à grande vitesse sans marche arrière ou bouton stop. Mais pour aller où ? Pour supporter quoi ? Comme tout le monde pas de réponse.

Ces pseudos réflexions philosophiques en faisant mes cartons, alourdissent d'un coup sur mes épaules. Les derniers cartons avant d’aller dans un immeuble, plus grand, plus froid, aseptisé. Dans un magnifique bureau open space, où l’on peut bien vous contrôler et vous fliquer.

Fini le luxe du bureau vide, pourrie où il fait froid mais où on peut sauvegarder son espace, le personnaliser et être l’abri de la mauvaise ambiance. Et au moment, de partir, je me rends compte que le courant d’air frais, près de la fenêtre, la cale pour maintenir droit le bureau et le couinement de ma chaise de travail vont me manquer.Dans quelques jours, bienvenue au bruit, au progrès, au cliquetis du clavier et aux regards en coin hypocrite, de nouveaux bruits qui vont m’accompagner 8h/jour.Le monde du travail microcosme de l’ambiance actuelle, de coup bas, de bassesse.

Stop, là il faut que j'arrête de faire défiler les idées noires, j'aurais largement le temps de stresser quand je serais là-bas, on est que vendredi, pas besoin d'anticiper sur la suite.

Mes yeux tombent sur une photo encore en équilibre sur le bureau ; prise à mon arrivée dans la boîte avec les anciens collègues qui m’avaient si bien accueilli. On dirait que c’était dans une autre vie et pourtant ça ne fait que 8 ans. J’étais à l’aise, confiante, souriante face à la vie, pleine d’illusions pour mon « premier vrai job ». Je me demande si cette personne est encore là, quelque part ? Oui, toujours présente, mais j’ai évolué, la naïveté a peu à peu disparue pour être remplacé par le principe de réalité.Enfin, il faut vivre avec son temps, s’adapter ; après tout c’est bien le seul intérêt de l’espèce humaine s’adapter à toutes les circonstances même pourries qu’elle crée. Ca y est, je suis repartie avec mes grandes idées, il faut que j'arrête de cogiter autant, on se bouge pour terminer ces fichus cartons parce qu'ils ne vont pas se scotcher par la pensée.

-"Bon t’as terminé, t’as pris ce que tu voulais amener sur le nouveau site ? Ça va être cool non ?"

Je me retourne sur Marie ; la nouvelle stagiaire, motivée, dynamique, souriante qui vient de m'interpeller. Elle me rappelle un peu moi, quand j’ai débarqué dans la boîte, elle est vraiment sympa.

-"Oui, mais je vais regretter ce bureau, c’est là où j’ai commencé et il va quand même me manquer. J’arrive, on se rejoint en bas." dis-je en fermant mon dernier carton.

A nouveau seule, je prends la photo et la met dans mon sac. Je referme avec nostalgie et peur la porte sur le bureau qui m’a vu évolué pendant 8 ans. Contrairement à Marie, je n’ai plus le fol espoir de réussite et d’épanouissement du début, la crainte me noue l’estomac à l’idée de changer mes habitudes de travail. Et de me rendre compte, comme les immeubles sur la gauche que la feu sacré du début est définitivement mort et enterré et que je ne suis plus qu’un automate, vide qui fait son travail sans passion pour gagner sa vie.


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