Il l’apprécie, ce conte, Titus ! Il le mettait dans la bouche d’un conteur il y a peu, voici qu’il l’endosse à présent. Et il y ajoute Madame Barbe Bleue dans le titre. Ce faisant, il déplace les lignes. Tout y est, même sept têtes de biches, trophées des chasses par lesquels le chasseur à barbiche prouve qu’il sait chasser… Têtes de biches exhibées, violence d’un quotidien que ne rejetterait pas Charles Perrault, moralisant une histoire, prétendant que la curiosité est un vilain défaut, et négligeant du même coup la cruau(si)té sur laquelle il faudrait faire trois tours de clé. La pomme, tant de fois dans tant de contes, c'est bien sûr ici, tenue par la huitième femme (interprétée par Priscilia Boussiquet), celle de la connaissance qu'il faut croquer. Le couteau de l'homme brille et envoie ses éclats vers les spectateurs qui tremblent quand la huitième femme apparaît portant sur ses épaules la tête coupable.
Sortant de ce spectacle où nous passons du conte à sa critique, du personnage à sa contestation du rôle qu’il doit assumer de siècle en siècle, au point qu’il ne veut pas mourir à la fin, je me sens rattrapé par l’actualité. La mort par décapitation a envahi les journaux télévisés, la menace en est presque quotidienne, qu’elle vienne des terroristes ou des États qui la pratiquent encore : est-ce qu’il faudrait s’y habituer ? Un tribunal français vient de condamner une femme ayant tué son mari après plus de quarante ans de violence subie : est-ce justice ?
Bien que ces deux questions ne soient pas dans le spectacle de la Compagnie Caus’toujours, je ne peux les passer sous silence.
J'ai vu ce spectacle au Théâtre Sénart, à Lieusaint (77)