C’est, en avance du Parcours Parisien de la Photographie, une petite exposition de deux jeunes photographes, Lucie et Simon, dans un magasin de meubles design du Village Saint-Paul (jusqu’au 30 juin). Il faut qu’une amie convaincante vous emmène là (merci), il faut aussi d’abord négliger les abus de Photoshop, les ciels délibérement colorés kitsch (comme ici, par exemple), tous ces agacements trop finement travaillés et il faut se concentrer sur les photos plus denses, celles surtout où un être humain vient s’inscrire dans un paysage désert.
Cette femme dans un tunnel sinueux, baignée d’une lumière maladive, campée sur un sol dégradé, n’est-elle pas le dernier survivant du genre humain, perdue dans la jungle urbaine ? (Humanity (woman), 2:22 a.m.). Le rapport de l’homme à la ville, tragique et démesuré, est un des thèmes essentiels de leur travail.
Et celle-ci, nue dans l’herbe, la tête dans les étoiles, sa robe rouge froissée à l’écart, se relève-t-elle d’une étreinte ou plutôt célèbre-t-elle ses noces avec la terre ? (Lucie nue). Ces photos habilement construites, où le regard doit s’acérer, entraînent le spectateur, le font chavirer.
Le couple a précédemment montré (en particulier à la Photographers’ Gallery à Londres) des machines et des villes, ancrages de l’homme dans le territoire.
Il y a ici des photos plus personnelles, plus sensuelles. Plusieurs représentent des personnes vues d’en haut, surprises dans leur sieste, leur bain, ou leur oisiveté, comme si l’objectif était dissimulé dans le plafond de la pièce. Celle ci-contre amuse et fascine : j’épie ma voisine en nuisette qui rêve alanguie à sa fenêtre, je n’en distingue plus le haut du bas, je bascule dans le vide, à la renverse.Photos courtoisie des artistes.
Au passage, il est trop tard pour écrire sur les deux expositions de la MEP, Georges Rousse et Valérie Belin, finies depuis le 8 juin, mais je vous conseille de lire ce texte qui, à partir de ces deux expositions, pose des questions essentielles.