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Pourquoi être auteur n’est pas un métier

Publié le 20 février 2016 par Thibaultdelavaud @t_delavaud

À l'heure où le statut des auteurs suscite beaucoup de questions et d'inquiétudes, je dois reconnaître que je ne me retrouve pas vraiment dans les débats et les prises de position que je lis et entends.

On présente en effet un auteur comme quelqu'un exerçant un métier : celui de l'écriture. Or, je pense qu'il s'agit là d'une grande confusion et qu'être auteur n'est pas un métier, dans le sens où l'on est médecin, boulanger, épicier... Et c'est une excellente chose.

Tout le monde peut être auteur

Il est sain et juste qu'être auteur ne soit pas un métier : l'écriture n'appartient à personne, n'importe qui peut écrire un chef-d'œuvre. Au risque d'affirmer quelques évidences et lieux communs, être auteur ne requiert aucun diplôme, aucune formation spécifique. Qu'est-ce qu'un auteur, sinon quelqu'un qui écrit un livre ? Or écrire un livre est en soi assez simple et banal, à la portée de tout le monde (je fais évidemment abstraction de la qualité de l'ouvrage). C'est la manifestation de l'expression de l'auteur, un témoignage destiné à être partagé. Nul besoin d'avoir un statut pour écrire ni l'autorisation de qui que ce soit. N'oublions pas que parmi les plus grands écrivains, beaucoup d'entre eux exerçaient un métier - un vrai métier, si j'ose dire. Par exemple, Céline était médecin, Romain Gary diplomate, Maupassant fonctionnaire. Je ne cite pas tous ceux qui ont été journalistes et professeurs...

L'écriture n'appartient à personne, n'importe qui peut écrire un chef-d'œuvre.

Par ailleurs, avec l'essor de l'autoédition, on peut désormais publier un texte en quelques clics et le mettre en vente. Nous sommes désormais tous des auteurs. L'autoédition est le Uber de l'édition. Si le statut professionnel des auteurs a toujours été fragile, l'autoédition est le dernier clou dans le cercueil du statut d'auteur tel qu'on l'entendait jusqu'au début des années 2000.

Les lecteurs ne doivent rien aux auteurs

Certes, les maisons d'édition ne rémunèrent pas assez les auteurs, les à-valoir diminuent et il y a une précarisation grandissante d'un certain nombre d'entre eux. Mais est-ce à dire qu'il serait juste que tout auteur vive de sa plume ? Qu'il en fasse son métier ? Bien sûr que non. L'erreur originelle est là. Et la situation ne fera qu'empirer puisqu'il y a de plus en plus d'auteurs et de moins en moins de lecteurs.

L'autoédition est le Uber de l'édition [...] et le dernier clou dans le cercueil du statut d'auteur tel qu'on l'entendait jusqu'au début des années 2000.

Un écrivain offre son livre au monde, comme s'il envoyait une bouteille à la mer, advienne que pourra. Bien inconscient est celui qui pense qu'un auteur peut et doit vivre de sa plume. Les lecteurs ne doivent rien aux auteurs. Un écrivain pourra écrire tant qu'il voudra, il n'aura peut-être jamais de lecteur.

Vivre de sa plume est un accomplissement, une performance. L'écriture est une activité récréative et intellectuelle qui peut être rémunératrice, mais c'est presque par accident que l'on peut gagner sa vie avec. Il faut être extrêmement talentueux et chanceux pour rencontrer le succès et donc vivre de la vente de ses livres. Et si autrefois, cela paraissait plus simple (et cela l'était peut-être), je pense que cette époque est définitivement révolue.

Pour le pire et le meilleur, nous sommes tous des auteurs.


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