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Chocolat, le devoir de couleurs

Publié le 22 février 2016 par Elsapotine

 Chocolat, le film de Roschdy Zem, magnifiquement interprété par Omar Sy, James Thierrée et une pléiade d’acteurs tels que Clotilde Hesme, Olivier Gourmet et Noemie Lvosky, fait plus que raconter l’histoire du premier clown noir de l’histoire de France, il interpelle et bouleverse. Sans pathos ni démagogie, il témoigne de la condition des gens de couleurs à la Belle Epoque. Sans pathos certes, mais sans fioritures, il laisse la juste place à l’authenticité des faits. Une vérité brute qui interroge sur les droits de l’Homme de quelle couleur qu’il soit à n’importe quel siècle.

Dans cette chronique, inutile de faire dans la critique cinématographique. Autant le dire en quelques mots, après « Mauvaise foi », « Bodybuilder », «Omar m'a tuer », Roschdy Zem a une fois encore parfaitement maîtrisé son sujet. Avec « Chocolat », il livre un film original, personnel, d’une grande tenue scénaristique et d’une reconstitution historique saisissante. Sous sa direction, Omar Sy et James Thierrée voient souligner leurs qualités non seulement d’acteurs mais d’artistes. On sait en effet que Zem a donné à James Thierrée, comédien, mime, acrobate, musicien et… petit-fils de Charlie Chaplin, carte blanche pour créer les numéros de clown de Chocolat et de Footit, son pygmalion. Ainsi niveau artistique, le film dépasse toutes les espérances.

Niveau affectif, on ne ressort pas intact après une telle histoire. Beaucoup ont soutenu que la célébrité, l’argent facile et le jeu avaient eu raison du succès de notre héros. La bande annonce le laisse un peu entendre d’ailleurs. Sans doute, une stratégie de communication fort bien réussie pour mieux déstabiliser le spectateur dans son confort. Oui, la célébrité, l’argent facile et le jeu tournent la tête dans un premier temps à Chocolat. Puis viennent l’amour, les prises de conscience, le besoin de conquérir sa dignité d’être humain malgré les discriminations, la bêtise de ses congénères et la haine raciale.

Chocolat, en référence à la marque bien connue « Banania » et son slogan : « Y’a bon Banania », a laissé son empreinte.

Devoir de mémoire, devoir de couleurs, brulot estampillé d’humanisme, « Chocolat » recadre le spectateur dans le présent. L’espèce humaine a-t-elle beaucoup progressé en un siècle ? Est-elle plus ouverte, plus encline à accepter l’autre dans sa différence et à moins le voir comme un individu inférieur et de dernier ordre ? Est-elle prête à abandonner les jugements et à ne plus traiter l’étranger comme un cannibale ?

Zoom sur l’actualité. Le cannibale aujourd’hui n’est-il pas le migrant, celui qui arrive pour se faire une place et faire reconnaitre ses droits ? Le discriminant n’est-il pas celui qui a peur de se faire dévorer ses acquis ? Y-at-il une différence entre les bidonvilles que l’on voit dans le film, ceux de Nanterre dans les années soixante et les soi-disant camps de migrants essaimés au nord de l’hexagone ou ailleurs ?

Resserrons encore plus le cadre. Juste au niveau des regards. Comme à la fin du film où un passant parle de « la femme du nègre ». Parole en l’air. Parole spontanée. Miroir de certaines mentalités.

Il y a encore du chemin à faire… Mais ne désespérons pas ! C’est en assumant la réalité que l’on peut la dépasser et aller plus loin.

Encore une chose…

Si Omar Sy est le Français que l’on réclame aux USA, dans ce pays critiqué par son manque de diversité ethnique aux Oscars, qu’il soit fier d’être un Noir dans les productions françaises qui invitent à de telles ouvertures de conscience.

Sans bras, peut-être pas de chocolat. Mais avec « Chocolat », un devoir de couleurs.

CHOCOLAT, LE DEVOIR DE COULEURS

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