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BIOcarburant ou AGROcarburant : politique énergétique contestée

Publié le 13 juin 2008 par Ecolo Trader

Haro sur les biocarburants

L'objectif des biocarburants ou agrocarburants - ils n'ont rien de bio - est de fabriquer un carburant de synthèse à partir de la biomasse. L'idée semble bonne : le cycle naturel de la photosynthèse transforme le CO2 présent dans l’atmosphère en matière végétale grâce au rayonnement solaire. La matière végétale qui est ensuite transformée en carburant puis brûlée libère à nouveau la même quantité de CO2 : un bilan global neutre en termes de CO2. La transformation de la matière végétale en éthanol par exemple est assimilable à une distillation telle qu’on la trouve dans une distillerie de Rhum. Pour faire l’équivalent du gasoil, on part d’huiles végétales.

Qu’il s’agisse d’éthanol (ou E85) ou de biodiesel (ou Diester ou B100), l’adaptation des moteurs à essence et diesel est facile, et on peut même éviter toute adaptation en mélangeant directement un faible pourcentage de ces carburants de synthèse aux carburants fossiles.

Les biocarburants contribuent à l’inflation des denrées alimentaires

Cette image idyllique est néanmoins ternie par quelques problèmes. Le reproche principal provient du fait que la culture des sols pour la production de carburant vient en compétition avec la culture vivrière : 10% de la production mondiale de maïs est absorbée par les biocarburants. La demande est stimulée par la hausse du prix du pétrole. Cela permet d’acheter le maïs destiné au biocarburant plus cher, bien plus cher que lorsqu’il est utilisé pour faire des Tacos… Les biocarburants sont donc reconnus aujourd’hui comme un des facteurs générateurs de l’inflation sur les denrées alimentaires. Il faut rappeler que cette inflation a bien sûr des effets bien plus désastreux sur les pays en voie de développement que sur les pays développés : 60% du revenu des ménages des pays en voie de développement est consacré à l’alimentation contre 14% dans les pays développés. Pour mémoire, les produits alimentaires utilisés pour le plein d’un 4x4 américain peuvent nourrir un homme pendant un an !

Le bilan CO2 n’est pas neutre, mais il est meilleur que l’essence…

Autre problème, le bilan CO2 n’est pas tout à fait neutre. Tout d’abord, l’agriculture efficace que nous connaissons aujourd’hui « utilise » du carburant ce qui ampute le rendement. Elle utilise aussi de l’azote dans les engrais, azote produit aujourd’hui via des énergies fossiles et qui a un effet sur le réchauffement climatique et sur la couche d’ozone. Enfin, selon Mark Jacobson, la combustion de l’éthanol produit des polluants plus dangereux que la combustion de l’essence. Conclusion : le bilan CO2 n’est pas neutre, mais il reste meilleur que l’essence.

Quelle surface pour produire les biocarburants ?

Plus ennuyeux, il faudrait multiplier par deux ou trois la surface des terres cultivées en France et la dédier le tout aux biocarburants pour subvenir à nos besoins d’énergie des transports. L’après pétrole ne sera donc pas solutionné par les biocarburants. Il s’agit donc d’une partie de la solution ou d’un palliatif temporaire.

Biocarburants et jachères

Néanmoins, une partie des terres cultivées européennes sont laissées en jachère pour réguler la production (PAC, Politique Agricole Commune). Aujourd’hui, 10% des terres ne sont pas cultivées, les agriculteurs étant indemnisés. Ces terres peuvent être utilisées pour cultiver des biocarburants. En sachant que l’agriculteur continue à toucher ses indemnités, et que de toute façon, les terres en jachère doivent être entretenues, cela devient intéressant… Néanmoins, il y a fort à parier que le coût de production d’un biocarburant européen sera supérieur à son équivalent brésilien, et ici, pas de notion de terroir pour faire la différence.

Indépendance énergétique

En termes d’indépendance énergétique, les économies réalisées peuvent être substantielles. Il est prévu d’incorporer 5,75% de biocarburants dès 2008, puis 7% en 2010 et 10% en 2015. 10% de barils de pétrole en moins, soit 700 000 barils, c’est toujours ça de gagné par les temps qui courent.

  

Politique énergétique et biocarburants de seconde génération

Sans réellement trancher, le Grenelle de l’environnement arrive sur les mêmes conclusions et pousse une nouvelle forme de carburants de synthèse, appelée biocarburants de seconde génération. Ces derniers utilisent toujours la biomasse, mais il s’agit de la part que l’on n’utilise pas pour l’alimentation : les déchets agricoles (pailles, tiges, etc.), nos déchets, des algues. Toute cette matière organique peut fermenter et produire des gaz inflammables et des carburants de synthèse. Les rendements sont encore faibles, mais il s’agit de déchets qui souvent produisent naturellement des gaz à effet de serre qui partent dans la nature, tel le méthane. Pour mémoire, le méthane est 20 fois plus générateur d’effet de serre que le CO2…

  

Les biocarburants résistent

De leur coté, les biocarburants classiques résistent. Le Brésil indique que sa surface cultivable lui permet de les produire sans concurrence avec les denrées alimentaires, qu’ils génèrent des emplois et baissent la dépendance énergétique du pays. L’ADEME quand à elle, a présenté une nouvelle étude qui démontre la supériorité des biocarburants actuels sur l’essence et le gazole : 2 à 3 fois moins d’émissions de CO2.

Les biocarburants sont là pour longtemps

L’indépendance énergétique dans les transports est un problème crucial. Si les biocarburants permettent d’en résoudre une partie, sans impact sur les moteurs, ils sont là pour longtemps. L’impact environnemental est plutôt positif. Il reste l’effet sur les prix des denrées alimentaires mais j’ai bien peur que ces problèmes soient moins prioritaires que les mécontentements qui résultent du prix des carburants… Et que dire du poids de la perte de biodiversité lorsqu’on transforme les forets en champs de maïs ? Positivons en espérant que les évolutions sur les biocarburants de seconde génération seront rapides.

Fabio FERRARI

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