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Maudits soient les artistes par Maurice Gouiran

Par Livresque Du Noir @LivresqueduNoir
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La peinture est souvent liée à l’idée qui germe dans mon cerveau embrumé et qui va donner le thème de mes romans. Sans doute parce que j’ai moi-même été fana des formes et des couleurs durant des années avant d’abandonner, en 2000, les pinceaux au profit de la plume (ou plutôt du clavier d’ordinateur…). Une anecdote à ce sujet : c’est pour dissimuler ma véritable identité que je signais à la fin des années 60 des toiles psychédéliques susceptibles de choquer ma mère du sobriquet de… Narigou. Ce pseudo s’avéra alors un excellent moyen de protection, puis s’imposa naturellement quand il fallut baptiser Clovis (celui des chèvres, pas celui du vase de Soissons !)

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La peinture omniprésente dans « Maudits soient les artistes » m’incite à jeter un coup œil dans le rétro. Et qu’est-ce qui j’y découvre ? Une profusion de peintres et de tableaux : Gauguin dans « La nuit des bras cassés », un peintre prénommé Bart dans « Le théorème de l’engambi », les tableaux de la Renaissance italienne dans « Les Martiens de Marseille », Gauguin encore et toujours dans « La porte des orients perdus », Dali et Picasso dans « Franco est mort jeudi », JAD, un peintre à la cote surévaluée, dans « La mort du scorpion »… Si j’ajoute les apparitions plus ou moins fugaces de Bonnard, Briata, Derain, Pollock, Carpaccio ou Hopper au gré des pages de mes 25 bouquins, vous conviendrez que je ne pouvais quand même pas laisser passer l’histoire du vieil octogénaire munichois vivant sur un tapis d’immondices, au milieu de 1500 toiles !

La découverte de Cornelius Gurlitt est donc le point d ‘accroche de ce polar. À partir de là, les choses s’enchaînent logiquement (surtout si on a une culture un brin mathématique). D’où provenaient les toiles de Cornelius Gurlitt ? De son papa Hildebrand qui fit sa fortune au joli temps du Reich numéro III. Ce qui incite à approfondir le comportement des nazis face à la peinture, leur appétit pour les toiles spoliées, leur haine pour l’expressionnisme allemand. Une haine d’ailleurs très actuelle, puisqu’on la retrouve chez les intégristes de tout poil et les extrémistes de droite face à l’art contemporain qu’ils surnomment volontiers « l’art comptant pour rien ». Rien ne servirait de rappeler l’Histoire d’hier si elle n’expliquait pas celle d’aujourd’hui…

« Maudits soient les artistes » m’a donné l’occasion d’exprimer mon admiration pour Max Beckmann, que j’ai découvert lors de sa rétrospective au centre Pompidou en 2002, et de rappeler les grands moments de la « culture » sous le Troisième Reich, de l’exposition des arts dégénérés concoctée par Goebbels dans le Munich de 1937 à la vingtaine de visites de Goering au musée du jeu de Paume à Paris entre 1940 et 1944.

Cette aversion des nazis pour la peinture moderne a été initiée par le führer himself qui promettait en hurlant de débarrasser « la vie allemande de ces mots creux : cubisme, dadaïsme, futurisme, impressionnisme… ». Comment dès lors ne pas regretter que le jeune Adolf n’ait pas été admis à l’École des Beaux-Arts de Vienne en 1907 ? Imaginez donc Adolf Hitler artiste-peintre, barbouillant gentiment des châteaux bavarois et des paysages alpestres…

La face du monde en aurait été changée.

Mais l’Histoire ne doit jamais faire oublier l’histoire, celle qui se développe autour d’une énigme et qui, met en scène le petit peuple. Une histoire qui se décline selon deux décors familiers : la Varune, des collines desséchées par le mistral où Clovis Narigou entretient (fort mal) un troupeau de chèvres, et les quartiers nord de Marseille avec ces fait-divers (réels) des billets de loterie gagnants rachetés à bon prix par de petits caïds pour blanchir l’argent sale. Et comme il ne peut exister d’histoire sans personnages, il y a ceux qu’on connaît bien, Clovis, Emma, Milou ou Biscottin, Eric, la Girelle, et ceux qui ne feront que passer, l’espace de ces 230 pages et sur lesquels je ne dirai rien pour ne pas déflorer l’intrigue.


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