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(anthologie permanente) Hans Magnus Enzensberger

Par Florence Trocmé

Éventuellement

Encore là pour l’instant. Je persévère,
Comme ce noir papillon de nuit, là-haut
Sur le mur blanc. Je ne remue pas.
Mes dispositions sont provisoires.
Nulle part un Eureka. Parfois, seulement
De minuscules révélations, de quelques millimètres,
Éphémères comme le bonheur, comme la fumée
De la presque dernière cigarette.
L’essentiel s’évente comme parfum d’une bouteille
Qui n’a plus de bouchon.
Aux dires des astrophysiciens
Même le soleil ne serait pas aussi durable
Qu’il paraît. La dernière instance*
N’est qu’un bistrot où les avocats
Tuent le temps.
Le jugement dernier se fait attendre.
Patience, me dis-je, surtout pas de panique !
Qui sait si l’on peut vraiment se fier
À la finitude. Seule la mort,
Disent les mortels, serait définitive.
Mais nous réveillerons-nous, tous les deux,
Quand retentira la trompette ?
La remarquerons-nous,
Notre résurrection,
Moi et cette mite noire là-haut ?
* Zur letzten Instanz est le plus vieux restaurant de Berlin (ouvert au XVIIème siècle).
Eventuell

Vorläufig bin ich noch da. Ich harre aus,
wie dort oben der schwarze Nachtfalter
an der weißen Wand. Ich rühre mich nicht.
Einstweilig sind meine Verfügungen.
Nirgends ein Heureka. Nur ab und zu
winzige Offenbarungen, millimetertief,
vorübergehend wie das Glück, wie der Rauch
der beinahe letzten Zigarette.
Das meiste verdunstet wie das Parfum in einer Flasche,
die den Stöpsel eingebüßt hat.
Die Astrophysiker sagen,
selbst die Sonne sei nicht so dauerhaft,
wie sie scheint. Die letzte Instanz
ist bloß eine Kneipe, in der die Anwälte
ihre Zeit totschlagen.
Das Jüngste Gericht läßt auf sich warten.
Geduld, sag ich mir, nur keine Panik!
Wer weiß, ob auf die Vergänglichkeit
Wirklich Verlass ist. Nur der Tod,
sagen die Sterblichen, sei definitiv.
Doch ob wir beide erwachen,
sobald die Posaune erschallt,
ob wir sie bemerken werden,
unsere Wiedergeburt,
ich und die dunkle Motte dort ?
Ce poème récent d'Enzensberger a été publié dans le supplément littéraire de mars 2016 du Spiegel. Il est traduit par Alain Lance. Avec l’aimable autorisation d’Hans Magnus Enzensberger pour la parution dans Poezibao.
Alain Lance


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