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#BigData2016 : “Le machine learning n’est pas une boîte magique”

Publié le 16 mars 2016 par Pnordey @latelier

À l’occasion du Congrès du Big Data 2016 à Paris, Sébastien Boutin, directeur stratégie Data chez Orange, revient sur l’utilisation des données et du machine learning au service de la relation client.

Les opérateurs téléphoniques disposent de très nombreuses données. En Afrique, elles sont un levier de développement, lorsqu’elles permettent de proposer des plans d’électrification efficaces par exemple. C’est de ce constat qu’est né Data for good, le projet de Sebastien Deletaille d’utiliser des données télécoms anonymisées pour aider ses partenaires à répondre à des problématiques humanitaires. Orange mène justement une opération similaire avec Data for development.

Conscient de l’utilité de ses données, l’opérateur téléphonique a également souhaité les mettre “au service de [ses] clients”. La direction de la stratégie client et data a précisément été créée à cet effet. Désormais à sa tête, Sébastien Boutin a présenté les résultats d’une opération emblématique nommé “sauvons les livebox” au Congrès du Big Data 2016 et évoqué les projets en cours visant à améliorer la relation client grâce aux données. Une autre manière d’envisager le service-client, à l’heure où certaines entreprises le sous-traite et alors que d’autres cherchent de nouveaux canaux de communication comme TD Bank avec Facebook.

“Sauvons les livebox” : une opération réussie

Sébastien Boutin est conscient de la richesse des données d’Orange. “On a des données CRM, mais également des données d’interaction (tout ce qui est service client, boutique, chat, email, web), et des données opérateurs (techniques et réseaux) qui remontent un certain nombre d’information”. Son but : les utiliser pour améliorer l’expérience client. Mais toujours dans le respect de la vie privée. “On se positionne clairement en opérateur de confiance, nos données sont le plus sécurisé possible, et on est très à cheval sur la transparence : on dit quelles données on utilise, comment on les utilise et pourquoi on les utilise”. La direction de la stratégie data et client d’Orange, a mis en place il y a deux ans un projet pour être plus proactif en terme de relation-client. “Sauvons les livebox” est un succès et a même évolué pour intégrer le Machine Learning.

Au départ, le projet était réparti sur deux phases. La première dite préventive consiste à utiliser les données météo et prévisions d’orage achetées à Météo France avec les données de contact clients : “leur adresse de facturation est l’endroit où se trouve la box et on leur envoie un sms quand la foudre va tomber près de chez eux pour qu’ils la débranchent”, explique le directeur. La deuxième phase se produit après l’orage. “On mixe les données réelles d’impact de foudre avec nos données réseaux et CRM pour voir si les livebox ont été foudroyées ou pas et si on estime avec un taux de probabilité assez fort que c’est le cas, on essaye d’avertir le client avant qu’il ne s’en rende compte”. Le client ainsi prévenu, disposera immédiatement d’un bon d’échange pour récupérer sa nouvelle box en magasin. “92% des clients étaient satisfaits ou très satisfaits et nous ont demandé de multiplier ce genre d’actions, se souvient Sébastien Boutin.

Le succès de cette première année a permis de prouver l’intérêt d’une telle démarche à ceux qui la financent. “Les ROI [comprendre Return on investment pour Retours sur investissement], sont facilement quantifiables”, précise le directeur de la stratégie, “cela nous a permis de sauver 35000 livebox, c’est du matériel qu’on n’a pas eu besoin de remplacer et 8000 livebox échangés en boutique, et d’éviter des appels au service après vente et des interventions inutiles de techniciens”. Au total, sur 6 mois, l’opération a coûté un million d’euros et a permis un gain en ROI de 2,8 millions. Cela a également permis de satisfaire des clients qui sans cette opération auraient probablement été déçus et impatients.

Fort de ce succès, Orange a décidé d’ajouter une dimension machine learning en 2015. “En plus des données historiques, on a rajouté la nature de l’orage - on ne le sait pas forcément mais un orage de grêle ça foudroie moins qu’un orage humide -  le modèle de la livebox et la topologie - le périmètre de foudroiement est différent en plaine ou en montagne - et on a rajouté derrière des algorithmes”. Sébastien Boutin estime à 20% les livebox supplémentaires sauvées, même s’il n’y a pas eu le même nombre d’orages les deux années, et le gain à 3,6 millions d’euros. Cependant, ces résultats encourageants ne se sont pas produits sans mal. L’équipe a rencontré de nombreuses difficultés. C’est que les données de départ doivent être parfaitement fiables parce que tout repose sur elles. “Si on rentre dans le système des données fausses alors la machine va les interpréter et établir des modèles sur des données fausses donc vous allez avoir des résultats qui sont faux”, détaille, pédagogue, le directeur du département data et client. “Le machine learning n’est pas une boite magique, ce n’est pas forcément simple mais ça vaut le coup.

Au départ, les équipes obtenaient de résultats moins bons avec le machine learning mais ne se sont pas découragés pour autant. Ce qui leur a permis de dompter la bête? “On a fait travailler un expert métier qui connaît bien le sujet, avec un data scientist qui maitrise les usages, c’est un binôme très performant et c’est ce qui nous a permis d’avancer”, confie M. Boutin, qui croit en cette technologie. “Le machine learning peut vraiment être un critère de différenciation en terme de service client aujourd’hui et sans doute demain.” D’autres projets sont d’ailleurs en phase de test.

Les projets en cours comme autant de preuves de l’intérêt de la data pour améliorer l’expérience client.

L’idée en 2016 c’est de capitaliser sur l’apprentissage du machine learning pour améliorer encore notre proactivité dans l’expérience client.” L’ambition du directeur est à la hauteur des projets. Trois, en particulier, retiennent son attention. Ils sont déployés en mode pilote sur un certain nombre de régions en France.

Le premier objectif est de parvenir à prédire les besoins matériels en intervention terrain, grâce aux données. Imaginons par exemple qu’une livebox tombe en panne et qu’un technicien doive se déplacer. Il est équipé de son matériel habituel et le client l’attend. Si, en arrivant, le technicien s’aperçoit que les réparations doivent en fait s’effectuer en hauteur sur un poteau, il devra revenir avec une nacelle et le client aura perdu son temps. Orange voudrait mettre fin à ce type de situations grâce à la data et déployer cette opération sur tout le territoire en 2016.

Dans une même optique, le département stratégie client et data vise à utiliser les données pour un “meilleur filtrage des interventions” pour que toutes soient efficaces. Autre sujet : la modélisation de la satisfaction des clients. L’idée est tout simplement de comprendre et savoir quels sont les clients satisfaits et quels sont les insatisfaits. “Comme tout le monde on a des sondages mais on essaye d’aller plus loin et d’utiliser les données techniques anonymes pour évaluer la satisfaction qu’a chaque client de son réseau et comprendre quels sont les causes racines” et ainsi pouvoir agir, explique Sébastien Boutin. Plus traditionnellement, d’autres projets sont également menés autour de la protection des données personnelles, du marketing et de la communication. Dans ce secteur comme dans d’autres, chaque opération réussie encourage les suivantes.


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