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[critique] the Diary of a teenage girl

Par Vance @Great_Wenceslas
[critique] the Diary of a teenage girl

Distribué en VOD en France sur les principales plateformes ( Wuaki, CanalPlay ou Orange), le premier film de Marielle Heller a tout du métrage indépendant, à la fois piquant et intriguant par sa liberté de ton, charmant et fascinant par ses parti-pris esthétiques et agaçant par certains tics de réalisation.

Bien que n'ayant pas bénéficié d'une sortie en salles, c'est tout de même auréolé d'une bonne réputation acquise à Sundance et même d'un prix du meilleur premier film aux Independant Spirit Awards que the Diary of a teenage girl est apparu depuis le 21 mars dans les catalogues de VOD.

Marielle Heller n'est pas une totale inconnue. Si le grand public l'a découverte en tant qu'actrice dans Spin City (elle fait aussi une apparition dans Balade entre les tombes), elle officiait déjà en tant que scénariste sur de nombreuses séries, ce qui lui a valu d'être remarquée dans plusieurs festivals. Et c'est avec l'adaptation d'un roman graphique qu'elle s'affirme en tant que réalisatrice à suivre, dans un style particulier mêlant le témoignage (à la première personne donc) de la narratrice en voix off avec des inserts animés psychédéliques rappelant Robert Crumb par la précision du trait et certains détails farfelus mais surtout sa femme Aline Kaminski (auteure de Twisted Sisters) qui joue un rôle non négligeable dans le développement intellectuel de l'héroïne.

[critique] Diary teenage girl

Située en 1976 dans un San Francisco enveloppé dans la béatitude du mouvement hippie, l'action du film suit essentiellement les tribulations de Minnie, ado pubère au physique quelconque que les hormones travaillent au corps d'autant que sa mère qu'elle admire vit à fond le rêve éveillé des jeunes adultes de l'époque et s'adonne à tous les excès possibles, tant de substances stupéfiantes que de boissons alcoolisées. Minnie qui entame le film par la phrase

I had sex today.

Les rapports sexuels, la découverte des sensations décuplées par l'intimité avec l'autre deviendront une obsession de tous les instants pour cette jeune fille qui n'hésite pas à enriegistrer sur cassette chacun des moments forts de cette nouvelle vie. Le problème est que l'homme qui l'a déniaisée n'est autre que le compagnon de sa mère, un gars bien bâti et sympa qui squatte souvent le canapé du salon une bière à la main. Le bonhomme est certes gêné par l'attitude de cette fille dont il découvre à la fois les formes et l'appétit sexuel, mais l'ambiance libertine de l'époque n'est pas du genre à décourager l'adulte qu'il est. Sauf que pour une jeune fille qui explore également avec ses amies les possibilités infinies offertes par le LSD et les soirées arrosées (on fume, on boit, on se drogue et on couche allègrement à Frisco dans les années 70), il faudra davantage que quelques coucheries pour la satisfaire. De temps à autre, l'imaginaire de Minnie, très riche et agrémenté des délires du comix underground - elle-même dessine beaucoup - transperce l'image et laisse apparaître quelques hallucinations colorées, les personnages devenant dessins, les dessins prenant vie et les fleurs éclosant par milliers à l'écran.

Si le ton est léger (Minnie n'a pas sa langue dans sa poche et il y a parfois ces fulgurances qu'on trouve chez Zach Braff), les thèmes abordés sont graves : la maturité sexuelle, donc, la pédophilie mais aussi et surtout les responsabilités parentales et les déviances engendrées par trop de liberté dans l'éducation - ce que vient rappeler un peu abruptement le père de Minnie, médecin qui s'est installé à New-York (la côte "sérieuse") car il ne supportait pas le laxisme de son ex. The Diary... est souvent formidable par sa vision très singulière de la condition féminine et notamment ce pouvoir particulier que peuvent détenir des jeunes femmes, pas forcément des canons de beauté (l'actrice Bel Powley a justement été récompensée dans plusieurs festivals par sa pertinence et son impudeur), lorsqu'elles sont sûres d'elles et n'ont pas froid aux yeux. Sans être pervers ou voyeuriste, le film de Marielle Heller explore les besoins en sensations nouvelles de Minnie et ses copines qui s'essaient à la prostitution, au lesbianisme et au triolisme juste pour voir, comme on essaie un joint ou un rail (ce qu'elles font d'ailleurs régulièrement).

[critique] Diary teenage girl

Dans cette cité de San Francisco embrumée par les souffles colorés de ses joyeux marginaux - et superbement reconstituée - se joue l'avenir d'une jeune fille qui se cherche, teste son corps et teste l'amour en éprouvant les limites physiques et spirituelles de ses partenaires, jusqu'à ce qu'une mère trop occupée par son propre plaisir prenne enfin conscience du drame qui se joue sous son toit. C'est Kristen Wiig qui interprète cette femme magnifiquement déraisonnable tout en nuances de passions et de doutes.

[critique] the Diary of a teenage girl

The Diary of a teenage girl s'avère donc une chronique douce-amère enlevée et gentiment décalée faisant semblant de briser les barrières de la morale pour mieux faire ressortir les valeurs parfois oublier de la famille moderne. Caustique et drôle, parfois hésitant et maladroit comme tout bon témoignage, et, surtout, sincère.

[critique] Diary teenage girl

Titre original

The Diary of a teenage girl

Date de sortie France

21 mars 2016 avec Sony Pictures Releasing en VOD

Marielle Heller d'après l'oeuvre de Phoebe Gloeckner

Musique

Nate Heller

Brandon Trost

San Francisco, 1976. Une adolescente découvre l'amour dans les bras du petit ami de sa mère...

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