Reçu dans le cadre de la sélection 2016 pour le Prix des Lecteurs Livre de Poche, j’appréhendais un peu de lire ce livre car j’avais peur que le climat politique soit trop présent au dépens d’une histoire d’amitié et la politique n’est pas forcément ce que j’aime lire le plus. Mais j’ai été agréablement surprise car ce roman est très bien écrit, l’amitié qui lie nos quatre personnages y est touchante et le climat politique présent se liant parfaitement aux destins de ces quatre français.
Quatrième de couverture:
« Le 10 Mai 1981, la France bascule à gauche. Pour Paul et sa bande – Rodolphe, Benoît et Tanguy – tous les espoirs sont permis. Issus de milieux différents, ils ont dix-sept ans et s’apprêtent à passer leur bac. Une trentaine d’années plus tard, ils se retrouvent, à la fois transformés et fidèles à eux-mêmes.
Que reste-t-il de leurs rêves, au moment où le visage de François Hollande s’affiche sur les écrans de télévision?
Chronique générationnelle, roman d’apprentissage, Le Bonheur national brut nous fait revivre, à travers le destin croisé de quatre amis d’enfance, la France de ces trois dernières décennies, restituant admirablement son climat social, politique et affectif. »
Mon avis:
Le Bonheur national brut est un roman qui m’a beaucoup plu et que j’ai été triste de terminer. Le destin de ces quatre amis m’a accompagné pendant ces quelques jours de lecture et je me suis prise d’affection pour ces personnages, toutes leurs différences de caractères et de personnalité confondues.
Je vous ai beaucoup parlé du roman de Julie de Lestrange « Hier encore c’était l’été » et bien ce roman lui ressemble un peu, le climat politique en plus. Une histoire d’amitié et quatre histoires différentes en même temps. Chacun évolue comme il le peut, le poids du passé en ralentissant certains. Entre un Paul manquant cruellement de confiance en lui, un Rodolphe qui ne mâche pas ses mots et qui désire plus que tout entrer dans le monde politique, un Benoît qui veut vivre de sa photographie et un Tanguy voulant percer les hautes sphères de la société en mémoire de son père mort plusieurs années auparavant, François Roux nous dépeint ici la vie dans tous ses états: de l’amour frustré ou réalisé, de l’affrontement face à la vie et à ce qu’elle ne nous épargne pas, de l’amitié et de la trahison, du courage et de l’abattement, tout ce qui peut constituer une vie.
« Nous avions tellement voulu grandir et nous frotter à la vie que nous en avions oublié de préserver la part la plus belle de nous-mêmes: notre innocence. (…) Chacun de nous devrait batailler, contre les autres mais surtout contre lui-même. Chacun de nous, pour tenter de survivre – pour tâcher d’être heureux?-, s’efforcerait à sa façon d’enfouir les monstres cachés qui n’avait cessé de nous poursuivre depuis l’enfance. »
J’ai aimé la fragilité de Paul et sa présence discrète auprès de ses amis, Benoît m’a émue par sa force de caractère et par ce qu’il s’efforce de cacher. Tanguy m’a parfois énervée par son comportement puis touchée par son changement d’attitude. Quant à Rodolphe, sa volonté d’être droit et franc dans un monde politique où tout n’est que faux semblant et coups bas m’a également touché.
Les autres personnages évoluant dans la vie de ces quatre amis sont tout aussi importants et agrémentent très bien cette histoire. Une histoire qui se déroule sur trente ans, où l’on voit quatre hommes avancer, parfois trébucher mais aussi se relever et s’affirmer. L’hésitation de la jeunesse face à la maturité de l’âge adulte, le tout enveloppé d’une France qui tente de se relever de la crise, d’une France tiraillée entre la droite et la gauche et d’un climat social parfois pesant.
« Et si tout ceci était complètement faux? Et si le bonheur était la plus grosse arnaque de ce siècle et de tous ceux qui l’ont précédé? Et si le soucis d’atteindre le bonheur était précisément la chose qui nous faisait le plus souffrir? Ceux qui, comme moi – et des milliards d’autres- sont trop faibles pour renoncer complètement aux ambitions délétères de leurs désirs devraient simplement se contenter d’espérer sans rien attendre. La teneur de nos rêves, ce qui en constitue la matière secrète et brûlante, ne vient-elle pas de ce qui échappe totalement à notre volonté? J’en suis aujourd’hui intimement convaincu, ne pas souhaiter atteindre son but est, en la circonstance et de manière paradoxale, la façon la plus judicieuse de s’en approcher. Nous devrions être des promeneurs de nos vies au lieu d’en être des marcheurs entêtés. »
Une belle histoire sur la quête du bonheur que je conseille car sensible et vraie. On s’y attache , on s’y accroche pour ne plus vouloir la lâcher.
» Tout en parlant, je réalisai combien les mots, s’ils ne sont pas flétris par l’orgueil, le mensonge ou la honte, peuvent devenir apaisants et merveilleusement libérateurs. »
Bonne lecture!
Je remercie les Editions Livre de Poche pour cet envoi.
Le Bonheur national brut, François Roux, Albin Michel, 2014, Livre de Poche, Janvier 2016, 764 pages.