Le Livre perdu des Sortilèges de Deborah Harkness. Je me suis lancée dans cette lecture sans vraiment savoir de quoi il retournait. Je ne voulais pas en savoir plus d’ailleurs, de peur de faire marche arrière. Quand on lit « sorcière » et « vampire » dans la même quatrième de couverture, on se dit qu’on va encore avoir droit à une énième romance d’urban fantasy. Heureusement, ce roman s’est révélé être beaucoup, beaucoup plus cela.
Diana est historienne, elle passe ses journées à la bibliothèque d’Oxford pour préparer sa soutenance sur l’alchimie. Mais ce que ses collègues savent moins, c’est que le monde est peuplé de démons, de vampires mais aussi de sorciers. Et bien que Diana fasse tout pour le nier, elle fait partie de cette dernière catégorie. En effet, la jeune femme a refusé très jeune la magie dans sa vie, sûrement à cause du traumatisme d’avoir perdu ses parents trop tôt. Mais on ne décide de devenir une sorcière ou d’arrêter de l’être, les choses ne sont pas si simples. Au cours de ses recherches, elle tombe sur un manuscrit mystérieux : l’Ashmole 782. Sans qu’elle le sache, une terrible machine vient de se mettre en route. Ce livre ancien contient en effet un secret que tout le monde désire connaître ardemment. Diana rencontre alors un certain Matthew Clairmont, un vampire qu’on dit redoutable, énigmatique, et qui va devenir pour elle le symbole d’une nouvelle quête, d’un amour impossible.
Stop, ne fuyez pas. Je vous promets, l’auteure ne commet pas les erreurs de Twilight ! Les vampires ne brillent pas comme des boules à facette, et l’héroïne n’est pas dépressive. Ce roman est un premier tome (ce que j’ai découvert en finissant ma lecture…) et fait plus de 500 pages en grand format. Autant vous dire qu’il y a de la matière, mais que cela ne vienne pas vous effrayer. Il y a tant à apprendre et à découvrir de cet univers inconnu : les familles de vampire, la créativité des démons, les éléments sorciers, les ordres secrets… De plus, il faut prendre le temps de faire la connaissance de nos personnages principaux. Et c’est surtout en cela qu’excelle l’auteure : la profondeur psychologique des personnages est vraiment réussie. Ce ne sont pas des êtres de papier qui évoluent devant nos yeux, mais de vrais personnes. Il est vrai qu’il y a certains stéréotypes : le vampire protecteur, la jalousie entre hommes, mais avouons que certains poncifs fonctionnent très bien et qu’on en redemande. En parallèle, il y a vraiment des éléments novateurs, originaux, intéressants : cette héroïne passionnée par son travail qui fait de l’aviron chaque matin, ce vampire qui cache des secrets vraiment étonnants (mais je ne peux pas en dire plus…), cette tante qui vit avec sa chérie, la maison qui a ses propres humeurs.
Et puis je dois avouer que j’ai adoré le cadre de l’histoire : Oxford d’un côté, université prestigieuse que je rêverais de visiter, et l’Auvergne de l’autre, où j’ai passé dix étés. Et en plus, il y a des petits bouts de dialogues en occitan, ô joie ! J’avoue que j’ai été très surprise par des éléments de l’arrière-plan, mais aussi par des rebondissements de l’intrigue. Il faut avouer que parfois, on se dit que l’auteure en rajoute, en fait trop, qu’il y a une avalanche de péripéties et de révélations. Mais je dois dire… que ça marche assez bien ! On se laisse porter par cette histoire, et on tourne les pages frénétiquement : la romance entre Diana et Matthew, les relations entre les personnages secondaires, la construction de cet univers complexe, les témoignages du passé pour revenir à l’origine des choses, l’enquête sur la mort des parents de Diana… Pfiou ! Parfois, on dirait que ça tombe un peu de nulle part, mais globalement, tout s’articule parfaitement. Ce n’est pas un roman qui nous laisse le temps de nous reposer.
J’ai rarement vu un livre qui était si ancré dans un genre (bit-lit notamment) tout en s’en éloignant au maximum. C’est là où on voit les limites de ce roman : il essaie d’être différent des autres sans y parvenir complètement. Mais, après tout, ça me va très bien ! C’est un pari réussi ! Cette lecture a été divertissante, agréable, addictive, et j’en redemande ! On tourne les pages avec facilité, et même si je désapprouve certains dialogues vraiment clichés, je fonds devant certaines scènes dignes des romances Harlequin. En fait, la force de cette lecture est son équilibre entre l’action, la narration pure et dure, les flash-back, les dialogues. On sent parfois derrière l’écriture les petites maladresses d’un premier roman (retournements de situation trop simplistes, mauvaise gestion du temps entre passages trop lents, passages trop rapides et ellipses), mais je pardonne aisément à Deborah Harkness car elle nous offre là le début d’une saga très prometteuse !Deborah Harkness, Le Livre perdu des Sortilèges, aux éditions Le Livre de Poche 8€90.