Synopsis :
A la naissance de la petite Lucy, sa mère la rejette et s'enfuit, laissant l'enfant grandir avec son père Sam Dawson, un modeste employé de café déficient mentalement. Pour ce dernier, rien au monde ne compte plus que Lucy. Cependant, après quelques années, il se voit retirer la garde de sa fille par les services sociaux qui ne le trouvent pas apte à s'occuper de son éducation. Ces derniers souhaitent la placer dans une famille d'accueil. Se retrouvant seul, Sam tente l'impossible pour regagner sa fille. Rita Harrison, une avocate brillante et surmenée, accepte de défendre gratuitement son cas devant le tribunal. Progressivement, par-delà les préjugés, elle va découvrir la force exceptionnelle du lien qui unit Sam à Lucy.
Bonsoir chers lecteurs,
Je reviens du coma, les yeux bouffis par la fatigue et une tisane aux lèvres, pour vous parler d’un film – encore et toujours. Un film qui m’a bouleversé, touché, et ce comme ce fut hélas, peu le cas depuis longtemps déjà. Si la présence de Michelle Pfeiffer – actrice que j’adore – et de Sean Penn au casting constitue une source d’attraction majeure en faveur du film, elle ne représente finalement qu’un de ses atouts – certes, considérable – secondaires. Car ce qui forme la principale force du film et qui selon moi, fait de lui une œuvre qui s’apparente à une véritable et frappante leçon de vie, est bien entendu son message. Evidemment, les performances du duo d’acteurs vedette sont renversantes, en particulier celle de Sean Penn qui est hallucinante de vérité, mais le discours qui émane de ce film, bien qu’il soit calibré dans ce traitement un tantinet précipité, est tout à fait notable, voire crucial à mon sens. Jessie Nelson, qui choisit de filmer cette immersion consternante dans cet urbanisme américain où grincent les idées arbitraires et préconçues de certains, avec un filtre sobrement morose et froid qui pourrait à lui seul résumer l’atmosphère du film qui oscille entre sensibilité saisissante et austérité, nous emmène durant deux heures à la rencontre – de nouveau – de la bêtise humaine, dans tout ce qu’elle a de plus alarmant et de plus écœurant. Nelson a d’ailleurs pour mettre ce thème en exergue, une manière ingénieuse de planter son décor, en confrontant deux personnages de prime abord foncièrement différents : l’un est un adulte plein de candeur et déficient mental, l’autre est une avocate peu patiente, semblant même un brin antipathique au premier coup d’œil. Grâce à l’emploi de ce contraste intelligent, l’empathie suscitée à l’égard du personnage de Penn chez le spectateur est accentuée, et sa grande vulnérabilité, quasi-infantile devient évidente. En effet, l’interprétation de Penn, et ses traits, qu’il prête merveilleusement bien au personnage de Sam traduisent à eux-seuls le message que veut transmettre ce même protagoniste. Son regard et son visage transpirent une innocence enfantine, - aspect qui tranche rudement avec l’univers juridique qu’il est obligé de subir - mais également une bonté, ainsi qu’une bienveillance incommensurable. Des adjectifs qui m’amènent à aborder le message central du film : l’idée que même étant différent, handicapé, déficient, l’amour porté à un être cher vaut tout l’or du monde, terrassant ainsi les maux d’irréversibles failles.
Si la manière qu’a Jessie Nelson de traiter la question est parfois légèrement maladroite, en particulier dans la rencontre qu’elle met en scène entre le personnage de Sean Penn et celui de Michelle Pfeiffer que j’ai trouvé plutôt soudaine, et à la gradation inégale, la force qui s’attire dans le fond du long-métrage compense considérablement les échecs de la forme. En tant que spectateur, j’ai très rapidement été réceptif et sensible au vice que Nelson dénonce dans son film, à savoir : l’intolérance manifestée quant à l’idée qu’un parent handicapé puisse faire preuve de responsabilité dans la prise en charge de son enfant. Cette simple idée a d’abord suffit à faire s’hérisser mes poils, exaspéré, avant même d’entièrement rentrer dans le film de Nelson. Et une fois pleinement embarqué, j’ai été littéralement charmé par la réponse qu’apporte Sam, je suis Sam à cette affirmation glaciale, arbitraire et sans la moindre once de compréhension et de discernement. J’ai trouvé l’idée de choisir de se pencher sur l’amour d’un père – et d’un père avant tout -, qu’il soit handicapé ou non, pour rétorquer à ces intolérances tellement juste et touchante que cela m’a suffit à hisser Sam, je suis Sam au rang de «grand film», et ce pour le simple bonheur d’avoir assisté pendant ces deux heures à un message qu’il est réellement plaisant de prendre en compte, de considérer. Le fait d’avoir pu contempler ces scènes de duo Pfeiffer/Penn de grande complicité, où ces deux protagonistes pourtant si différents l’un de l’autre, se dévoilent finalement complémentaires l’un envers l’autre fut une expérience renversante. La séquence où Rita, personnage de Michelle Pfeiffer, fait l’aveu auprès de Sam, que ce qu’il lui a apportée est peut-être bien plus que ce qu’elle, lui a apporté, m’a fait chavirer, et c’est bel et bien, peut-être, ce passage qui illustre à merveille la beauté de ce film : la mise en images de barrières brisées, de préjugés achevés, pour laisser place à l’empathie, la compréhension, et pour célébrer sans tabous, la richesse et la force inébranlable de l’amour. Oui, plusieurs chemins auront croisé celui de Sam, croisements parfois difficiles, même s’ils auront quelque fois, débouché sur une magnifique amitié, comme avec sa camarade Rita (Michelle Pfeiffer). La dernière séquence du film, lors d’un match de la petite Lucy, fille de Sam, qui réunit de nombreux sourires sur la pellicule, et parmi eux celui du personnage de Laura Dern – qu’on compte au sein des seconds rôles les plus poignants – peut sembler idyllique, mais elle fait follement chaud au cœur. Nous arrachant presqu’une larme, clôturant cette ode à la tolérance, pratiquement utopique. Il est 2h du matin, je ne m’en remets toujours pas.
Lewis