Aujourd’hui on va faire un petit topo sur l’avortement durant l’Antiquité à Rome mais aussi en Grèce. L’avortement n’est pas interdit par un texte de loi, mais on ne l’encourage pas… L’avortement prive l’homme de décider pour son enfant.Évidemment, il existe des moyens de contraception, mais la plupart d’entre eux sont complètement inefficaces, d’autant qu’on ne comprends rien à l’anatomie ni au cycle de la femme. Du coup, c’est pas super simple quoi… On ne connaît pas la fréquence des avortements, ni le nombre de femmes qui se font avorter, mais on connaît les différents moyens, et c’est déjà pas mal. Je vous laisse les découvrir…
Avorter : les (mé)connaissances antiques
Le sperme garçon – le sperme fille
Selon Pline l’Ancien, le fœtus se forme à partir du 10e jour de grossesse, certains auteurs pensent 40. Faut dire qu’il est coutume de penser que les garçons se forment plus rapidement que les filles. Parce qu’ils ont un pénis et que le pénis est plus fort que tout. Les auteurs affirment que la semence plus faible et plus humide donne naissance à des filles. Évidemment.
La philosophie, le sperme et de l’éthique
Pythagore ainsi que ses disciples pensent que le sperme est un morceau de cerveau. A l’intérieur de ce morceau de cerveau, il y a de la vapeur chaude. Cette vapeur est l’âme du gamin. Bien. La présence de cette âme c’est aussi ce qui fait que l’avortement est réprouvé.
Pour les platoniciens et les stoïciens, l’âme vient de l’extérieur, de fait, jusqu’à la naissance, le gamin n’a pas d’âme.
Du coup, durant l’Antiquité, on ne se pose pas l’épineuse question : mais alors jusqu’à quand on peut avorter ? Les Grecs et Romains, à l’époque, ne pensent pas que l’avortement est un meurtre, un infanticide ni quoi que ce soit dans le genre. On parle simplement de « perte » ou de « dissolution ». La volonté d’avorter n’est pas non plus une offense aux dieux. Les dieux ont autre chose à foutre à vrai dire.
En fait, seul le géniteur peut porter plainte contre la femme qui avorte s’il se sent victime de perdre un héritier. Mais c’est rare. Il faut attendre le IIIe siècle pour voir les premières condamnations et je vous le mets dans le mille : c’est le début du christianisme bien relou. Mais il existe aussi à Rome une politique nataliste, de fait : il faut produire des gamins pour remplir les rangs de l’armée. Et ça que ce soit à Rome ou en Grèce, y’a pas à dire, on sait comment faire pour fabriquer des enfants.
Avorter : Pourquoi ?
Durant l’Antiquité, les avortements sont pratiqués exactement pour les mêmes raisons qu’aujourd’hui. Les familles n’ont pas de fric ou sont déjà trop nombreuses. Lorsque la femme est âgée et ne veut pas prendre de risque (pour elle et ses enfants). Mais aussi pour le coté héritage. Bin oui. C’est chiant. Enfin, une autre raison et pas des moindres, si l’époux légitime part en campagne pendant de longs mois et que la femme tombe enceinte d’un autre sans pouvoir berner tout le monde. Bin ouais, ça la fout mal. Le mec pourrait faire la gueule et décider de tuer le gamin sans que rien ne lui soit reproché. Enfin, les prostituées ont recours à l’avortement.
Avorter : les méthodes plus ou moins efficaces
Pour avorter les femmes font des choses concrètes (avaler des herbes, se frapper le ventre ou encore se faire ouvrir le ventre) et la plupart du temps, tous les actes s’accompagnent de magie ou d’astrologie.
Les abortifs oraux
Pour Pline l’Ancien, la femme doit consommer du lait de chienne avec des décoctions de chicorée pour avorter. Mais aussi du thelypteris (une sorte de fougère) mélangé avec du vin et du miel. On retrouve aussi des graines de giroflées, de la menthe, du concombre d’âne mais aussi des trucs un peu plus drôles : des testicules de castor, du sang de chèvre mélangé à des épices… C’est peu commun.
Oribase, le médecin de l’empereur Julien, note le genévrier sabine, la myrrhe, le lupin et la centaurée. On cite également l’opopanax. Tu peux le prendre en prévention, comme contraception, et comme méthode pour avorter. Enfin, le silphion est une plante qui ne poussait que dans les alentours de l’actuelle Libye et qui possédait de nombreux atouts. Pline fait remarquer son efficacité contre toutes les irritations et inflammations, mais aussi contre les verrues. En ce qui concerne l’avortement, la plante avait un effet œstrogénique qui empêchait l’implantation de l’œuf fécondé dans l’utérus. Hippocrate, Dioscoride et Galien le prescrivent souvent. Cette plante a aujourd’hui disparu.
La magie
Parmi les trucs peu rationnels, Pline préconise à la femme enceinte de marcher au dessus d’un œuf de corneille. Soit disant ça fait avorter direct. Et petite fantaisie, la femme avorte par la bouche. Oui.
Les pessaires
Dernière méthode « douce », s’insérer du poison dans le vagin ou l’utérus. Ça fait rêver. En général, il s’agit de boules de laine contaminées de mélanges irritants, souvent à base de figues mélangées avec du carbonate de sodium. Certaines crèmes à base de cyclamen peuvent être massées sur le ventre. Mais euh… C’est peu efficace et pourtant, ça peut être dangereux : provoquer des ulcères, des infections et même la mort. Et quand l’avortement ne marche pas, il faut y aller plus fort… Il reste la violence et la chirurgie.
La fatigue et les coups
Afin que la femme perde le gamin, il est important qu’elle rende son corps hostile. Genre, on lui fait des saignées pour qu’elle soit très fatiguée. Elle doit également boire du vin et manger des aliments aigres. Autre méthode : on frappe le ventre. Violemment. Pour décoller le truc et le perdre. Il est également conseillé pour avorter de beaucoup marcher, de courir, ou de faire du talon/fesse dans les escaliers… Galien propose aussi de faire monter une femme enceinte sur une échelle et de remuer la-dite échelle jusqu’à ce que le fœtus tombe. C’est moche et peu efficace.
La chirurgie
Les opérations semblent très peu utilisées. Faut dire que les risques sont nombreux. Entre les infections, les hémorragies et le manque de connaissances sur l’anatomie… Du coup, les médecins ouvrent principalement lorsque la femme est en danger. Voici quelques instruments chirurgicaux retrouvés à Pompéi.
« Lorsque, dans la grossesse, l’enfant venu presque à terme meurt dans le sein de la mère, et ne peut en sortir par un travail naturel, il faut bien se résoudre à l’opération, et la chirurgie n’en a pas de plus difficile. Elle exige, en effet, une rare prudence et des ménagements extrêmes, parce qu’elle fait courir un immense danger. » (Celse, « Traité De La Médecine », VII – 29.)
L’avortement durant l’Antiquité est aussi dangereux que n’importe quel avortement clandestin au XXIe siècle. Les conséquences peuvent être terribles. D’où l’importance de légaliser et rembourser l’avortement.
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