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Charles Gleyre, le romantique repenti

Par Mpbernet

après le déluge

C’est tout à l’honneur d’un musée vibrant comme le musée d’Orsay de faire découvrir un artiste méconnu comme Charles Gleyre (1806 – 1874). Jamais je n’avais entendu parler de ce peintre suisse, classé parmi les peintres académiques marquants du XIXème siècle et qui pourtant fut un maître d’atelier où passèrent plus de 500 élèves, dont les plus grands noms de l’impressionnisme : Claude Monet, Auguste Renoir, Alfred Sisley, Jean-Léon Gérôme, Paul Delaroche, Frédéric Bazille …

autoportrait

J’ai apprécié de pouvoir visiter cette exposition le jour de son inauguration, et avec Claude à nouveau.

Peinture académique ? Pas tant que ça ! Le premier tableau de l’exposition (120 œuvres dont 76 prêtées par le Musée Cantonal des Beaux-Arts de Lausanne) représente une scène d’une violence inouïe : des Brigands romains (1831) ont intercepté un couple de voyageurs. Ils ont attaché le mari à un arbre pendant qu’ils s’apprêtent à violer sous ses yeux son épouse … C’est tellement peu académique que le tableau ne pourra être exposé ! Un thème romantique, certes, mais tellement cruel …

En 1835, Gleyre attache ses pas à un riche américain qui va l’emmener jusqu’à Khartoum en le chargeant de croquer les vues archéologiques et les personnages locaux. Au retour, l’artiste reprendra ces thèmes orientalisants puis il s’essaiera au grand genre et à la décoration de palais.

Le succès viendra en 1843 avec la grande composition « le Soir », rebaptisée « Les illusions perdues » qui triomphe au Salon et fut longtemps l’un des tableaux-vedettes du Louvre.

Cette renommée lui vaut d’importantes commandes de scènes "de genre" et mythologiques - comme "Les Romains passant dous le joug" d'un pompierisme assumé -  de la part du musée de Lausanne (1858) …

les brigands de Roma

Mon tableau préféré est Le Déluge (1856) : après le reflux des eaux, la nature dévastée laisse entrevoir l’oiseau qui porte en son bec le mince rameau d’olivier alors que deux anges flottent dans les airs, selon une inspiration hautement symboliste. Le format panoramique, l’utilisation mêlée du pastel et de l’huile donnent un résultat poétique et fantastique. Ce tableau n’est jamais sorti de son musée depuis son acquisition en 1899. C’est une chance de le voir à Paris.

prêtre arménien

femme

Evidemment, ce n’est pas particulièrement « moderne » à l’époque où naît le mouvement des « Refusés » bientôt qualifiés par un critique imbécile d’« Impressionnistes ». Mais pour s’affranchir des règles, il faut les avoir apprises. En particulier dans l’atelier de Charles Gleyre, ce Républicain obstiné qui refusa d’exposer et de vendre pendant toute la période du Second Empire. Et qui succomba subitement en visitant une exposition de peinture !

le soir ou les illusions perdues

Cette première rétrospective d’un artiste oublié est donc parfaitement légitime. On avait apprécié les « Préraphaélites » (actifs entre 1848 et 1855) pourtant largement moins oubliés que Gleyre aujourd’hui … Merci à Guy Cogeval, récemment reconduit à la tête du musée d’Orsay…

Charles Gleyre, le Romantique repenti, exposition au musée d’Orsay jusqu’au 11 septembre ; au 5ème étage - fermé le lundi.


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