En direct du salon Étonnants Voyageurs qui se déroule à Saint-Malo du 14 au 16 mai, nous avons posé quelques questions à Richard Werly, le directeur de la collection L’âme des peuples des éditions Nevicata. Son mot d’ordre ? Connaître les peuples pour mieux les comprendre. Fidèles compagnons de bourlingue à glisser dans la poche, ces petits ouvrages aux couleurs bigarrées n’ont pas fini de vous faire voyager.


La collection L’âme des peuples fait partie de la maison Nevicata. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
En termes de références, cette collection est pour moi la digne héritière de “Terre Humaine”, la collection des éditions Plon. Jean Malaurie, le fondateur et directeur de cette collection a d’ailleurs préfacé plusieurs ouvrages de chez Nevicata.
Plus précisément, comment est née L’âme des peuples ?
La devise de “L’âme des peuples” est “Parce que pour connaître les peuples, il faut d’abord les comprendre” ; elle s’intègre donc parfaitement dans le projet de Nevicata. A cette dimension globale s’ajoute une double rencontre, qui fut directement à l’origine de la création de cette collection. A l’époque, j’étais correspondant du journal suisse Le Temps à Bruxelles et ce depuis six ans. Mon travail consistait à courir l’Europe afin de réaliser des reportages et des interviews. J’ai, par le biais de mon travail, rencontré Paul-Erik Mondron et ai été immédiatement séduit par son approche. Parallèlement à notre entrevue, j’ai également fait la rencontre d’un journaliste qui s’exprimait à propos de la Belgique en soulignant qu’il serait impossible de la réformer sans comprendre son peuple au préalable. Bien sûr, rien de révolutionnaire à cette déclaration : pour comprendre, il faut connaître. Cet article a cependant bénéficié d’une certaine résonance en Belgique au moment de sa parution et c’est à ce moment que j’ai eu envie de porter ma pierre à l’édifice : il fallait créer une maison qui permettrait de mieux comprendre les peuples afin de pouvoir éventuellement en gérer les crises.

D’un point de vue purement littéraire, “L’âme des peuples” est la fille de deux collections que je considère comme mythiques bien qu’elles n’existent plus aujourd’hui : “Petite planète” publiée au Seuil à partir de 1952 et dirigée par Chris Marker, ainsi que “Monde” des éditions Autrement. Fort de ces deux filiations, il fallait trouver comment entretenir leur démarche tout en apportant une nouvelle dimension. C’est alors que j’ai eu l’idée d’un petit livre en version française mais rédigé par des auteurs locaux. Une sorte de version originale française.
Comment sont organisés ces ouvrages ?
Nos auteurs sont des intimes du pays qu’ils traitent, et nous leur faisons entièrement confiance. Nous avons fait le choix de publier des livres dans un petit format parce qu’aujourd’hui je crois que les gens lisent plus vite et surtout un peu partout. Pour ces différentes raisons, il m’a semblé évident de proposer des ouvrages faciles à transporter et surtout rapides à lire. Parallèlement à ce constat, je suis persuadé que le gros guide de voyage tel qu’il existe depuis longtemps est en train de mourir. Internet permet de trouver toutes les informations fournies par ce genre de guide très facilement et son accessibilité est quasiment inégalable. Je ne voulais donc pas proposer quelque chose de déjà existant. Attention, je n’ai jamais eu l’intention de remplacer ces guides de voyage mais simplement de les accompagner, de les compléter avec des récits axés sur la culture du pays. Pour tenir compte de toutes ces nouvelles variables, j’ai finalement opté pour des petits ouvrages à lire le temps d’un trajet.
Quel a été votre parcours professionnel ? Pouvez-vous nous parler de votre rôle d’éditeur sur les publications ?
J’ai toujours eu un pied dans la politique internationale. J’ai d’abord été journaliste en France pour des journaux tels que La Croix, La Vie, Télérama, Libération puis par la suite en Suisse pour Le Temps. J’étais par ailleurs régulièrement envoyé comme correspondant à l’étranger et principalement en Asie. J’ai ainsi vécu entre autres à Bangkok, Hong Kong, Tokyo. Je n’ai bien sûr pas voyagé dans tous les pays que présente “L’âme des peuples”, mais disons que j’ai une bonne connaissance de ces derniers.
Comment choisissez-vous les pays qui vont figurer dans votre catalogue ?
A qui exactement s’adresse votre catalogue ?
Plus concrètement, notre public est selon moi divisé en quatre catégories : les étudiants qui doivent travailler sur un pays, les touristes ayant prévu un voyage ou tout simplement les curieux qui fréquentent déjà les éditeurs de voyage sans avoir de destinations précises en tête. Il ne faut également pas sous estimer la clientèle de gens qui font des cadeaux, elle est plus importante qu’on le croit. Dans tous les cas, ces lecteurs sont tous des voyageurs, qu’ils soient réels ou potentiels.
La construction du livre dépend du pays choisi. Comment cela s’est-il passé pour Cuba, par exemple, où la censure est encore de mise ?
La France est-elle au programme de L’âme des peuples ?

Nous allons devoir le faire, c’est évident ! La France est un incontournable du tourisme et je tiens personnellement à publier un livre dessus. En revanche comment faire ? Le mystère est encore complet. Devons-nous choisir un jeune auteur ou bien un écrivain confirmé comme Jean d’Ormesson ? Nous sommes actuellement en cours de réflexion chez Nevicata, cela fait partie de nos projets en cours, mais je n’ai pas encore tranché sur l’approche à choisir. J’hésite encore. La difficulté est que nous serons beaucoup jugés par les lecteurs avec cette publication qui les concernera directement ! J’ai évité ce biais en commençant par publier des livres sur des villes comme Bordeaux, ce qui est un peu plus facile. Je suis actuellement en train de réfléchir à des auteurs connus qui auraient envie de parler de leur pays, comme Michel Houellebecq ou encore Virginie Despentes, même si je ne les connais pas directement et que je ne leur en ai encore jamais parlé !