Les joies et les mystères de la recherche des origines. Déjà, au départ, deux versions s’affrontent, peut-être sont-elles complémentaires, pour l’apparition du mot blanquette ? Il viendrait de l’allemand blanck qui signifie blanc, couleur de la sauce, ou serait un diminutif de blanc emprunté au provençal blanquetto.
En tout cas, le terme « blanquette » apparaît pour la première fois dans le livre Le Cuisinier moderne de Vincent La Chapelle en 1735. Dès le départ, il s’agit d’une fricassée de viandes blanches, en majorité de veau, et plus rarement d’agneau et de volailles liées avec des jaunes d’œufs et de la crème fraiche, servies avec une garniture de petits d’oignons, de champignons, et parfois avec du riz ou avec des truffes.
Depuis la révolution de 1789, moment où la bourgeoisie triomphante impose ses règles de vie également en gastronomie, le veau devient, au même titre que le bœuf symbole de puissance, un mets de luxe. Au XIXème siècle, il est perçu comme un aliment de croissance et de vitalité mais aussi comme un signe de bien-être social.A partir de 1970, suite à la transformation radicale du rapport à la nourriture à cause des grandes surfaces et de l’aliment devenu « objet indéfini », le veau et surtout le veau de lait se posent en viandes nobles dont la couleur se doit d’être laiteuse pour justifier son nom. La production va s’orienter vers ce type de viande jusqu’au scandale du veau aux hormones qui va ternir pour longtemps l’image de la bête pour atteindre une consommation à deux vitesses différenciée par le prix en fonction de l’élevage.
Une tendance qui se retrouve et se retrouvera de plus en plus dans de nombreux produits (saumon, poissons sauvages, caviar, etc.).
Le veau, viande blanche et non grasse par excellence, retrouve une seconde jeunesse dans l’obsession actuelle de la minceur et de la chasse au gras. Pour la blanquette « de tradition », voici la recette complète extraite de la « bible » Escoffier.
« Marquer en cuisson les morceaux de veau avec assez de fonds blanc pour les couvrir. Faire prendre l’ébullition doucement en remuant souvent les viandes, saler très peu, et écumer.
Ajouter une petite carotte, un oignon piqué d’un clou de girofle, un bouquet composé d’un poireau, queues de persil, thym et laurier. Cuire doucement pendant une heure et demi (pour 1,500 kg de viandes).
Préparer un velouté avec 100 g de roux blanc et 1,75 l de la cuisson du veau. Ajouter une petite poignée d’épluchures de champignons frais et laisser cuire ¼ d’heure.
Égoutter les morceaux de veau et les mettre dans une autre casserole avec 20 petits oignons cuits à blanc et autant de petits champignons.
Au dernier moment, compléter la sauce avec 5 jaunes d’œufs, un filet de citron, muscade râpée, et un décilitre de crème passée à l’étamine sur les morceaux et la garniture. Chauffer sans laisser bouillir et servir en saupoudrant de persil haché. »
Dont acte, mais la majorité des recettes actuelles sont assez loin de l’original.
Nos bonnes (et moins bonnes) adresses
1 – Chez Monsieur
Blanquette « Chez Monsieur » servie en cocotte
Réalisée de main de maître par le chef Martin Harispe, elle est à base d’épaule de veau, du jarret de veau et de la basse noix. Mijotée au minimum trois heures avec carottes, champignons et pommes de terre grenaille ensemble. La sauce est à base de crème, jaune d’œuf, et lardons, sans aucun autre ajout. Une petite pluie de ciboulette avant de servir. Résultat ?Un magnifique et appétissant plat présenté en cocotte fumante et où le client se sert joyeusement et qui permet de le garder au chaud. Copieux, une sauce parfaite de goût et de texture, lisse mais pas liquide, où les légumes et les lardons donnent un goût unique au plat et où la qualité et le mélange des trois morceaux de veau différents, là aussi d’un fondant parfait, donnent un goût unique pour cette meilleure blanquette goûtée à ce jour. Bonne nouvelle : elle est à la carte toute l’année.
Servie avec un Mâcon Bussières domaine de La Garenne 2014 dont les notes d’agrumes et la belle minéralité font merveille sur la blanquette.
Prix : 26 € 11, rue du Chevalier Saint-Georges
75008 Paris
Tél : 01 42 60 14 36
www.chezmonsieur.fr
M° : Madeleine
Ouvert tous les jours
2 – Aux Charpentiers
Blanquette de veau de Corrèze « Marie Louise », riz créole
Un veau d’une excellente qualité, tendre et savoureux à souhait choisi dans l’épaule, une cuisson parfaite pour bien conserver la tendreté, une sauce goûteuse à la texture crémeuse et à la belle couleur tirant sur le jaune (grâce à l’œuf), avec des champignons de Paris comme le veut l’usage. Bref, un petit chef-d’œuvre de blanquette fidèle à la tradition, réalisé avec soin et talent mais avec quelques touches personnelles comme cette julienne crue de poireaux et de carottes et un riz créole parfaitement cuit d’ailleurs. Un très joli plat, savoureux, et une blanquette globalement excellente.
Pour l’accompagner, Pierre Bardèche propose un Côtes de Gascogne rouge, Harmonie de Gascogne, du Domaine de Pellehaut, qui finalement se comporte mieux que le blanc de la même maison.
Prix : 26,50 €
10, rue Mabillon
75006 Paris
Tél : 01 43 26 30 05
www.restaurant-auxcharpentiers.com
M° : Mabillon
Ouvert tous les jours
3 – Au Petit Tonneau
Blanquette de veau à l’ancienne
La Blanquette de veau est indétrônable de la carte et on vient de loin pour la savourer. A juste titre. L’assiette est généreuse avec beaucoup de viande, majoritairement de l’épaule, une sauce crémeuse et savoureuse à souhait, crémée, avec un trait de citron et de cardamome pour relever l’ensemble et donner un poil d’acidité. Pour les légumes, champignons de Paris, carottes et oignons comme le veut la tradition. Un beau plat remarquablement réalisé. On l’accompagne d’un Marsannay Château Marsannay 2013
Prix : 22 €
20, rue Surcouf
75007 Paris
Tél : 01 47 05 09 01
www.aupetittonneau.fr
[email protected]
M° : Latour-Maubourg
Fermé lundi soir
4 – Mon Vieil Ami
Blanquette de veau au bouillon de légumes, riz pilaf
Pour deux, elle est servie dans une coquelle en céramique du plus bel effet. Copieuse, généreuse, chacun se sert et se ressert à son envie. Le veau, par ailleurs de bonne qualité, est assez moelleux et composé uniquement d’épaule. Les légumes, superbes carottes, champignons de Paris, oignons, sont formidables, en provenance d’un maraîcher du sud-ouest. Toujours l’exigence Westermann. La sauce est un poil liquide mais de bon goût. Excellent riz pilaf. Au final, un très beau plat classique qui s’accompagne bien d’un Bourgogne Pinot Noir 2014 de F. Coche (7 €).
Prix : 16 € (au semainier le dimanche midi uniquement)
69, rue Saint-Louis-en-l’ Île
75004 Paris
Tél : 01 40 46 01 35
M° : Pont Marie
Fermé lundi et mardi, toute l’année
www.mon-vieil-ami.com
5 – Champeaux
Blanquette de veau à l’ancienne, riz pilaf
Bonne nouvelle de voir ce plat dans le semainier dans la nouvelle brasserie d’Alain Ducasse (le lundi). Elle arrive dans une belle coquelle, fumante et généreuse, avec de beaux morceaux d’épaule de veau bien découpés, fondants et savoureux. La sauce est à base de crème, sans œufs, d’une belle texture enveloppante peut-être un poil trop liquide, mais de bon goût. Seul bémol, la cuisson des légumes un peu al dente, surtout les oignons blancs et les carotte, mieux pour les champignons de Paris.
Le riz, lui aussi servi dans une adorable petite coquelle à part, est bien cuit et bien parfumé.
Un plat bien réalisé, agréable mais qui reste sur une légère fadeur générale sans vraiment être bouleversant. Un bon plat de semainier cependant qui se retrouvera avec plaisir chaque lundi.
Prix : 22 €
La Canopée
Forum des Halles – Porte Rambuteau
75001 Paris
Tél : 01 53 45 84 50
www.restaurant-champeaux.com
M° : Les Halles
Voiturier
Ouvert tous les jours de 11h30 à minuit
6 – Chez André
Blanquette de veau à l’ancienne
Une assiette bien présentée, le veau en petits cubes moelleux, la sauce blanche à tendance light mais savoureuse, et les carottes, champignons et les délicieux petits oignons grelots sont au rendez-vous. Un ensemble léger, savoureux, fort bien fait et très bien présenté, bien servi et même copieux, et une timbale de riz pilaf en son centre.
Pour l’accompagner, un rouge léger et fruité fera l’affaire comme un Brouilly (5,70 € au verre) plaisant et intéressant pour ce beau plat du dimanche.
Prix : 25 € (le dimanche dans le semainier)
7 – N°41
Blanquette de veau « Grand Mère », riz pilaf
Dans la famille Boudon (La Fontaine de Mars, etc.), je voudrais le fils. Il vient d’ouvrir sa brasserie avenue Mozart dans les traces de sa mère en déclinant les grands classiques de la cuisine bourgeoise à travers un semainier et à la carte. Décor brut : carrelages, murs nus, tables en bois, et une ambiance de joyeux mangeurs.
La blanquette est servie en assiette creuse avec tous les ingrédients mélangés. Le riz pilaf est agréable et bien cuit sûrement sous vide. Les morceaux d’épaule de veau sont nombreux ce qui en fait un plat copieux, un peu surcuits et donc secs, champignons de Paris et oignons uniquement pour les légumes (pas de carottes), et la sauce très claire et presque blanche prouve l’absence de jaunes d’œuf ce qui la rend un peu fade et à la texture liquide.
Un plat un peu décevant au niveau du goût, malgré la générosité.
Prix : 13,50 €
41, avenue Mozart
75016 Paris
Tél : 01 45 03 65 16
www.n41.fr
M° : Ranelagh
Ouvert tous les jours de 7h à 23h
8 – Le Petit Rétro
Blanquette de veau « à peine grand-mère », riz noir vénéré, épices du moment
L’aspect extérieur est pour le moins étonnant. Des légumes verts hors saison (début mars) et hors de 0propos, pois gourmands et haricots verts, du cèleri, et du riz noir. Si le but est de surprendre, c’est réussi. Le reste l’est moins. Du veau sans saveur, une sauce liquide et grise (pas d’œuf, mais eau, farine, et beurre) sans goût, et une blanquette qui n’a que le nom.
Prix : 23,50 €
5, rue Mesnil
75116 Paris
Tél : 01 44 05 06 05
www.petitretro.fr
M° : Victor Hugo
Fermé le dimanche