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[DOSSIER][D'actrice et sex-symbol à auteure engagée] Cameron Diaz, drôle de dame

Par Lewis_ @LewisCritique

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Décembre 2014, sort dans les salles obscures américaines une énième adaptation du musical canonisé Annie, véritable figure sacrée au pays de l’Oncle Sam depuis de nombreuses décennies, et librement inspiré des bandes dessinées d’Harold Gray. Que ce soit à Broadway – par une prédilection acclamée - au cinéma, illustrée par John Huston en 1982, ou à la télévision, narrée par Disney en 1999 ; Annie et sa tignasse rousse ont marqué au fer rouge le paysage culturel américain.

À tel point, que les enfants ricains sont régulièrement invités à entonner lors de kermesses scolaires par exemple, un Tomorrow ou un It's the Hard Knock Life. L’histoire de la petite orpheline s’inscrivant de manière intergénérationnelle comme une référence nationale et indémodable. Un enthousiasme infatigable que Jake Kasdan caricaturait d’ailleurs dans son Bad Teacher en 2011. Avec ce spectacle qu’Amy, l’enseignante frappadingue et psychotique campée par Lucy Punch s’acharnait à mettre en œuvre. Et cette perruque rousse, à la Jackson Five, que portait Cameron Diaz pour duper Thomas Lennon dans le film, qui n’était autre qu’une réplique de l’incontournable coiffure de la petite Annie.

Un clin d’œil qui fait sourire, quand on sait qu’à peine quelques années plus tard, Diaz s’est vue « castée » pour le rôle de la névrosée et peu commode Miss Hannigan dans un remake de la comédie musicale culte. Un choix suscitant d’ailleurs une surprise quasiment générale, quant à ce personnage qui devait initialement être campé par Sandra Bullock.

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 À gauche : l'affiche du Annie de Will Gluck / À droite : Cameron Diaz en plein tournage du film, à New York

Le 19 décembre 2014, le film fait son entrée en salles, malgré le raz-de-marée de polémiques ahurissantes quant au casting d’une Annie noire, notamment interprétée par la petite prodige oscarisée, Quvenzhané Wallis. La remise en cause des capacités de Will Gluck, qui n’est autre que le réalisateur de la comédie lubrifiée Sexe entre amis, avec Justin Timberlake et Mila Kunis, à porter ce film, s’inscrivant dans un registre inédit pour le bonhomme. Et la participation de Cameron Diaz dans un rôle où avait brillé Carol Burnett, trente ans plus tôt, dans le film éponyme de 1982.

Sans surprises, le film n’échappe pas à la sentence auquel il était d’avance condamné : un assassinant critique presque unanime. Où l’on pointe du doigt une bande originale vocodée, désastreusement chantée – hormis pour Jamie Foxx, chanteur de RnB à ses heures perdues, ce qui peut s’avérer pratique -, des jeux d’acteurs caricaturaux - en particulier pour Madame Diaz -, des changements jugés malvenus dans l’intrigue, dans un film qui semblerait avoir été sponsorisé par Fisher-Price. Un long-métrage aux couleurs criardes et irritant la rétine où Cameron Diaz, ex-Totally Spie en herbe dans Charlie's Angels s’adonne à de multiples singeries en tout genre. Dans ce dernier rôle en date sur sa filmographie, où l’actrice semble décidemment, enfermée dans cette caricature d’elle-même, à laquelle on semble l’avoir laissée clouée depuis quelques années.

Alors Cameron Diaz,  souffrirait-elle du syndrome qui frappe de fantastiques acteurs comme Johnny Depp ? Qui voudrait que l’on s’enferme sans crier gare, dans un créneau dont nous sommes parfois l’auteur, nous ayant hissés au succès. Ne pâtirait-elle pas d’un revers de médaille la condamnant à rester l’éternelle blonde écervelée dont Natalie Cook, représentait d’ailleurs un archétype clownesque ? 

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À gauche : Cameron Diaz reçoit son étoile sur le Hollywood Walk of Fame, en juin 2009 (en haut)/ dans Dans la peau de John Malkovich (1999)/ en plein doublage de Shrek (2001) (en bas)/ À droite : sur le tournage de Gangs of New York (2002) (en haut)/ avec Julia Roberts aux Golden Globes en janvier 2000 (en bas)

Au cinéma, elle est désormais devenue la ravissante idiote, trop souvent cantonnée à des rôles de potiches hystériques qui ont hélas, fini par engloutir ses performances remarquables dans des films majeurs comme le Dans la peau de John Malkovich de Spike Jonze ou le fantastique Mary à tout prix des frères Farrelly, qui lui a d’ailleurs value sa consécration comique. Cameron Michelle Diaz se fait désormais discrète au cinéma, et cela fait près de deux ans que nous ne l’avons plus vue sur nos écrans, ni même affublée sur les affiches qui décorent les façades de nos cinémas.

De Martin Scorsese à Ridley Scott, en passant par Michel Gondry et les studios de la DreamWorks Animation, l’actrice a souvent oscillé entre excellence et médiocrité, peut-être par un éclectisme invétéré, une indifférence à l’élitisme : mystère. Seule Cameron elle-même pourrait l’expliquer de sa grande bouche béate, arborant toujours cet infatigable sourire exalté et enthousiaste. Qu’elle ait côtoyé les plus grands, de Julia Roberts à Di Caprio, en passant par Tom Cruise et Jim Carrey. Qu’elle exaspère de par le stéréotype irréfléchi qu’elle semble incarner à son insu, qu’elle s’attire des jalousies de par son physique botticellien ou que l’on remette en cause la légitimité de son succès. On s’accorde tous (ou presque) à reconnaître son talent comique indubitable, sa drôlerie inépuisable et qui fait parfois, quasiment de l’ombre à une intelligence palpable.

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 À gauche : The Longevity Book / À droite : Cameron Diaz signant des dédicaces à Los Angeles en janvier 2014

Il y a déjà plus d’un mois, Cameron Diaz surprenait encore à la parution de son livre, The Longevity Book. Un second ouvrage coécrit une nouvelle fois,  avec Sandra Bark, qui l’avait également épaulée à la conception de son premier écrit, (The) Body Book, paru en 2013 et hissé au rang de best-seller aux Etats-Unis. Après plus de vingt ans à sillonner les collines hollywoodiennes, portée par son corps de surfeuse californienne, Cameron Diaz continue à nous intriguer. Pour la énième fois, tentons d’élucider l’énigme Diaz, vedette « poupée russe » étonnante, visiblement, toujours là où l’on ne l’attend pas.

Après des échecs consécutifs au cinéma, de l’édulcoré et niaisé, mais mignon, Ce qui vous attend si vous attendez un enfant au Cartel de Ridley Scott écartelé par la critique, où elle campait pourtant brillamment une femme glaciale et sociopathe ; Cameron Diaz semble s’embarquer sur une pente glissante dans sa carrière, visiblement occasionnée par des choix peu judicieux. Ainsi le public et les critiques réitèrent à remettre en cause sa capacité à briller ailleurs que dans des rôles de midinettes ingénues et amoureuses. Et ses erreurs de parcours accumulées semblent commencer à faire oublier à l’opinion publique ses rôles notables : de son tout premier, glamour à souhait dans The Mask aux côtés de Jim Carrey, au tremplin comique que constituait l’étape Mary à tout prix, son interprétation mémorable d’une érotomane dans Vanilla Sky et sa fameuse scène de l’accident de voiture avec Tom Cruise, ainsi que cette réplique culte : « I swallowed your cum. That means something ! », ou encore son rôle de pickpocket devant la caméra du monumental Martin Scorsese dans Gangs of New York.

En décembre 2013, Cameron Diaz ne se prononce pas sur ses insuccès, et sort à la surprise générale un livre intitulé The Body Book, de son nom complet : The Body Book: Feed, Move, Understand and Love Your Amazing Body, qu’elle coécrit avec Sandra Bark. À peine quadra et donc désormais à un âge où Hollywood tire sa sonnette d’alarme, pour avertir les actrices que les rides qui commencent à marquer le territoire de leur visage pourraient bel et bien devenir leur talon d’Achille, Cameron Diaz choisit de pointer du doigt ce dictat de l’éternelle jeunesse avec cet ouvrage. Pour ce faire elle s’entoure entre autre, de nutritionnistes et personnes « médicalement compétentes » pour livrer le discours le plus pointu possible. Elle passe alors en revue l’anatomie féminine, les différents modes d’alimentation et autres théories purement scientifiques, pour aborder un livre qui ne désire pas être un régime ; mais une ode au corps, et à son acceptation, ainsi qu’à son amour. En expliquant d’abord son fonctionnement et par conséquent ses limites, Diaz invite les femmes des quatre coins du globe à s’accepter, ainsi qu’à aimer leur corps tel qu’il est, tout en ayant conscience de ses barrières et frontières. En somme, à le respecter. Le livre paraît le 31 décembre 2013, - de quoi donner à ses lectrices de bonnes résolutions pour l’année 2014 - ; et en mars de cette quatorzième année du 21ème siècle, The Body Book se classe en seconde position sur la liste des best-sellers du New York Times.

De nouveau étonnamment, l’ouvrage suscite une réception critique élogieuse, rimant alors avec un succès inattendu, mais ne faisant tout de même pas – bien évidemment – l’unanimité. En effet, même si par exemple, de nombreuses internautes et youtubeuses ont encensé la démarche de l’actrice, certains ont voulu dénoncer ce qu’ils recevaient comme une véritable hypocrisie de la part de la star, soulevant ainsi cette question : « Comment une femme ayant la facilité de se pavaner dans un corps de déesse, et été cliente d’injections de botox à plusieurs reprises peut-elle avoir le culot de parler au nom de femmes vieillissantes et complexées ? ».

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À gauche : Cameron Diaz dans Vanilla Sky en 2001 (en haut) et dans L'Enfer du dimanche en 1999 (en bas) / À droite : La star tourne Ce qui vous attend si vous attendez un enfant et Cartel 

Assurément, l’ex-Natalie Cook n’est pas dupe, et semble avoir bel et bien conscience du fait que son attitude étonnante puisse être jugée comme malvenue et culottée. Et c’est ce dont de nombreux médias ont conscience lors de la promotion du livre, certains d’entre eux n’hésitant d’ailleurs pas à confronter la star de Charlie’s Angels à leurs interrogations saugrenues. Notamment sur la question du bistouri qui pendait au nez de Cameron Diaz depuis un certain temps déjà, et à laquelle la star répondra sans gêne lors d’un entretien accordé à l’émission Entertainment Tonight en janvier 2014 : « (…) ça a changé mon visage d’une manière si bizarre, que je me suis dit : " Non (…) je préfère me voir moi, je préfère me voir vieillir, que de voir un visage qui ne m’appartient pas du tout " ».

Pour expliquer le cheminement caché derrière la parution de The Body Book, Cameron Diaz reviendra sur l’entraînement physique intensif qu’avait nécessité sa participation à la comédie d’action Charlie’s Angels, ainsi que sur ses récalcitrants problèmes d’acné l’ayant apparemment encombrée jusqu’à l’aube de ses vingt printemps. Stratégie marketing et communicative ou pas, Cameron Diaz retrouve après la parution de son livre, les plateaux de tournage et Nick Cassavetes, qui l’avait déjà dirigée dans le drame Ma vie pour la tienne. Cette fois-ci, quant à un projet intitulé Triple Alliance, une comédie girly et légère, qui s’apparente presque à ce que serait devenu le trio de Charlie’s Angels après avoir délaissé les coups de pied en talons aiguilles.

Le film, qui sort en avril 2014 aux Etats-Unis réconcilie Cameron Diaz avec le succès ; une réussite qui sera hélas de courte durée puisque dans la foulée, l’actrice enchaîne avec Sex Tape, un film potache pour lequel elle retrouve ses compagnons de Bad Teacher. Avec en effet, Jake Kasdan derrière la caméra, et Jason Segel qu’elle récupère comme partenaire de plateaux. Hélas, le film est un échec cuisant et ne rencontre, ni l’approbation de la critique ni celle des spectateurs. Si Bad Teacher avait su braver l’obstacle des critiques négatives et s’attirer l’enthousiasme du public, Sex Tape échoue sur les deux fronts. Et à l’aube de la fin d’année 2014, l’initiation de Diaz dans le registre de la comédie musicale, descendue en flèche par la critique peine à faire redécoller sa carrière, décidemment en salle posture.

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 À gauche : Cameron Diaz tourne Triple Alliance à New York / À droite : L'actrice dans Triple Alliance (en haut) et Sex Tape (en bas)

Puis l’actrice commence peu à peu à se faire discrète, on entend parler d’elle pour son mariage avec Benji Madden, mais sa carrière cinématographique est très peu mentionnée, même si cependant une suite de Bad Teacher est officialisée par Columbia Pictures. 

Avril 2016, le 5 du mois, nouvelle surprise : l’actrice fait paraître un nouvel ouvrage, toujours en collaboration avec Sandra Bark, intégralement intitulé The Longevity Book: The Science of Aging, the Biology of Strength, and the Privilege of Time. Un livre qui fait suite au (The) Body Book, et qui aborde toujours avec la même ferveur l’acceptation du corps, son respect, et plus spécifiquement le vieillissement chez les femmes. Dans une société aux nombreux dictats de beauté, où elles n’auraient presque plus le droit de vieillir, et devraient garder la fraîcheur de leurs vingt-cinq ans ; The Longevity Book se veut alors –selon les dires de son auteure – de dire « non » à ces obligations rédhibitoires et grotesques.

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À gauche : Cameron Diaz à New York en pleine promotion de The Body Book, en janvier 2014 / Au centre (avec Andy Cohen) et à droite : La star fait la promotion de The Longevity Book à la radio

À quarante-trois ans, et à l’image d’une poupée russe, il semble toujours difficile de cerner le personnage de Cameron Diaz. Elle paraît cachée sous différentes couches : l’une étant celle d’une jeune fille issue d’une famille modeste, ancien mannequin à l’aube d’une percée hollywoodienne, puis celle d’une femme cantonnée à l’étiquette de « ravissante idiote », celle d’une actrice enchaînant les erreurs de parcours après avoir brillé devant la caméra des plus grands… Puis celle d’une féministe ? « Cameron Diaz, féministe ? ». La question en offusquera probablement certain(e)s, l’actrice gardant toujours et quelque peu cette étiquette de « bombasse de service », mais nous sommes en droit de nous la poser. Après les surprises engagées de la star, le champ des possibles quant à la suite de sa carrière semble très dense. Suite au prochain épisode ?

Lewis


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