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Sincères condoléances, de Gisèle Totin

Par Liss

Les lettres africaines peuvent se réjouir de compter parmi elles une plume comme Gisèle Totin. Sa première oeuvre, Sincères condoléances, est de nature à vous laisser une impression si forte que vous vous promettez de suivre ses futures publications.

Sincères condoléances, de Gisèle Totin

Pour une première oeuvre, Gisèle Totin réussit à proposer des personnages consistants, avec un caractère, des origines, une situation sociale, familiale et et professionnelle différents les uns des autres. Aucun ne peut se confondre avec un autre et l'auteur parvient à se mettre dans la peau de ces personnages différents et à souligner leur singularité. Leur seul point commun, c'est de se sentir désarmé face à la mort, et c'est ce qui nous lie tous. On est désarmé quand on perd un être cher, même si l'on sait que nous partirons tous, on est désarmés face à une personne endeuillée : comment la réconforter ? Surtout éviter de dire des mots que l'on croit constructifs mais qui dévastent en réalité. Le titre, "Sincères condoléances", sonne comme un ricanement. L'auteur dénonce cette habitude d'utiliser des formules convenues, comme si tous les deuils se ressemblaient, alors que chacun d'eux est unique.

Le recueil compte quatre nouvelles : "Par amour", "Mamange" (qui associe les mots "maman" et "ange"), "Femme" et "Veuves". Elles sont toutes c onstruites de la même manière : chacune comprend deux récits à la première personne, qui n'ont apparemment rien à voir l'un avec l'autre, mais qui finissent par se recouper, par se rejoindre ; une construction en entonnoir que j'ai beaucoup appréciée.

Les personnages sont frappés de plein fouet par la disparition subite d'un être cher. Mais même lorsque cette disparition est l'issue prévisible d'une maladie comme le cancer, elle demeure innacceptable pour les personnages, et les autres ne perçoivent pas toujours notre mal-être, ils pensent que nous avons digéré l'événement : "Mes blessures sont invisibles, mais ma douleur est invincible", déclare Sorel dans "Par amour" (page 16).

Cet événement provoque comme un électro-choc chez les personnages qui sont obligés d'envisager les choses différemment, sous un autre angle. Ils se découvrent eux-mêmes sous un autre jour. Le drame casse les habitudes et plonge les personnages dans une autre dimension. Et le lecteur est le témoin privilégié de cette mutation progressive des personnages. Certains recourent au sexe, d'autres aux livres ou encore à la religion. Ces nouvelles montrent l'être humain dans toute sa nature, complexe pour le moins : égoïste et généreux, sincère et hypocrite, fragile et fort à la fois, prompt à prendre des décisions tout en refusant d'en considérer les conséquences...

On ignore parfois qui l'on est vraiment jusqu'à être confronté à une situation aussi bouleversante que le deuil. Ce qu'il faut retenir, semble nous dire l'auteur, c'est que tout peut arriver du jour au lendemain, et il ne faut jamais remettre à plus tard l'occasion de réparer les choses, de témoigner toute notre affection à nos proches, de nous réconcilier avec eux...

Le livre peint la société d'aujourd'hui, ouverte sur le monde. Les personnages se déplacent d'un continent à l'autre, d'un pays à l'autre, guidés par leur coeur ou par le désir de se construire une situation meilleure.

Sincères condoléances, de Gisèle Totin

(Liss et Gisèle au salon du livre de Paris 2016)

Gisèle Totin, Sincères condoléances, Nouvelles, Editions La Doxa, collection La Librevilloise, 2016, 184 pages, 15 €.


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