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Sans sarah, rien ne va !

Par Rob Gordon
Sans sarah, rien ne va !Dans l'attachante série How I met your mother (dont la qualité va de "hilarante" à "juste sympa"), Jason Segel interprète idéalement Marshall Eriksen, grand dadais naïf et rêveur. Tellement à l'aise dans ce rôle qu'on n'imaginerait pas un seul instant qu'il soit capable de faire autre chose de sa carrière. Grave erreur : acteur principal et scénariste de Sans Sarah, rien ne va !, Segel dévoile la pleine mesure d'un talent absolument vertigineux. Il en profite d'ailleurs pour montrer l'étendue de sa palette, également brillant auteur-compositeur-interprète (les fans de la série se rappelleront aisément ceci) et marionnettiste de choix. À tout juste 28 ans, ce grand échalas vient de frapper un grand coup.
Pourtant, Sans Sarah, rien ne va ! sent un peu le déjà vu. De Judd Apatow en Farrelly brothers, en passant par les mille et un films-plus-ou-moins-bons-avec-Ben-Stiller, on nous a déjà servi ce genre d'argument mille fois, au gré d'une flopée de comédies familiales souvent recommandables à défaut de marquer leur époque. Ils pourront tous aller se rhabiller en tenter leur chance ailleurs : car pour son premier scénario, Segel effectue avec aisance et modestie une véritable synthèse des thèmes et univers brassés par les quelques clowns cités plus haut. Sans Sarah, rien ne va ! est non seulement une comédie drôle, mais également une description pas loin d'être réaliste de la dépression post-rupture, et un état des lieux de la condition de mâle trentenaire en ces temps difficiles. On parvient à la fois à rire aux dépens des personnages et à éprouver de la compassion pour eux. À s'investir à 100% dans leurs déboires sentimentaux et à s'esclaffer en les regardant s'accoupler (ou tenter de s'accoupler) à qui mieux mieux. On déconseillera Sans Sarah, rien ne va ! à ceux qui sont assez petits pour aimer Narnia, puisque le réalisateur Nicholas Stoller filme le sexe de façon frontale, ne nous épargnant ni les positions étranges, ni les copulations ratées, ni même la bistouquette du héros. Il pousse au degré supérieur ce que Judd Apatow n'avait réussi qu'à moitié dans 40 ans, toujours puceau : entrer dans la chambre à coucher et jouer à la fois sur le tableau du graveleux et celui de l'étude sociologique. Très fort.
Sans Sarah, rien ne va ! n'est pas vraiment un film sur le départ de l'être aimé (la Sarah en question, jouée par la mimi Kristen Bell, n'est d'ailleurs pas si présente dans le film), mais bien sur celui qui reste après la rupture. Segel lui prête son regard de chien battu et son dos courbé, puis son énergie dévastatrice lorsque son personnage reprend du poil de la bête. De bout en bout, par l'intermédiaire de scènes souvent très courtes mais qui frappent juste, le film livre un portrait bigrement touchant et extrêmement drôle. Pas drôle à se taper sur les cuisses, non, juste drôle du début à la fin, comme si cela était évident. On pourrait décrire par le menu mille scènes très réussies parmi le demi-million de bonnes scènes que comporte le film ; ce serait extrêmement réducteur et dommageable tant le film possède un style unique auquel ne rendrait pas justice un résumé en forme de désamorçage.
Touchant, exubérant, sexy, tonique, déprimant, foutraque et très très cul : il y a de tout dans cette très grande comédie américaine, qu'il ne faudrait cependant pas réduire à une sorte de catalogue d'adjectifs trop généraux et pompeux pour lui rendre justice. Il faut juste courir voir un film qui risque d'être boudé par le public tant les sorties sont nombreuses en ce début d'été. Parce que Jason Segel est grand. Parce que les autres sont tout petits à côté de lui. Et parce que Sans Sarah, rien ne va !, malgré son titre français un peu encombrant, est certainement la comédie de l'année.
9/10

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