Tout n’est pas perdu de Wendy Walker 3,75/5 (28-05-2016)
Tout n’est pas perdu (341 pages) est disponible depuis le 12 mai 2016 aux Editons Sonatine (traduction : Fabrice Pointeau)
L'histoire (éditeur) :
Alan Forrester est thérapeute dans la petite ville cossue de Fairview, Connecticut. Il reçoit en consultation une jeune fille, Jenny Kramer, quinze ans, qui présente des troubles inquiétants. Celle-ci a reçu un traitement post-traumatique afin d’effacer le souvenir d’une abominable agression dont elle a été victime quelques mois plus tôt. Mais si son esprit l’a oubliée, sa mémoire émotionnelle est bel et bien marquée. Bientôt tous les acteurs de ce drame se succèdent dans le cabinet d’Alan, tous lui confient leurs pensées les plus intimes, laissent tomber leur masque en faisant apparaître les fissures et les secrets de cette petite ville aux apparences si tranquilles. Parmi eux, Charlotte, la mère de Jenny, et Tom, son père, obsédé par la volonté de retrouver le mystérieux agresseur.
Mon avis :
A Fairview petite ville du Connecticut où tout le monde connait tout le monde, Jenny Kramer, 15 ans, est sur le point de connaître sa première relation. Pourtant belle, intelligente et athlétique, Jenny fait partie de ces filles qu’on remarque peu et qui sont habituellement moins convoitées par les garçons, alors quand Doug Hasting l’invite à la fête où tous les jeunes doivent se rendre, elle est aux anges. Malheureusement, sur place, déçue par l’attitude de Doug elle force un peu sur l’alcool et, patraque, elle décide de rentrer. Mais, sur le chemin du retour, elle est sauvagement agressée. Son calvaire dure une heure, avant qu’elle soit repérée et transportée à l’hôpital.
Sur les conseils des médecins, ses parents prennent alors la décision d’autoriser le corps médical à lui administrer un traitement spécifique jouant sur sa mémoire afin de réduire les troubles post traumatiques. Parce que l’agresseur a pris toutes ses précautions (aucune preuve matérielle ne permet de suspecter qui que ce soit) et que Jenny ne semble pas avoir vu grand-chose, ils sont prêt à perdre la crédibilité d’un éventuelle témoignage de la victime en chassant de sa mémoire les souvenirs du drame.
Les semaines passent, Jenny guérit de ses blessures physiques et n‘a aucun souvenir du viol, mais sa mémoire émotionnelle est de plus en plus présente et essaye de s’imposer. Jenny incapable de gérer ce stress qu’elle ne comprend pas est contrainte de suivre une thérapie avec la docteur Alan Forester, spécialiste de ce genre de troubles. Ce dernier va peu à peu prendre une importance insoupçonnée dans l’enquête, pris malgré lui en plein milieu d’une lutte pour la vérité.
Raconté du point de vue du psychiatre, Tout n’est pas perdu a le mérite de nous plonger de manière minutieuse dans la psychologie des personnages. L’intrigue en devient du coup extrêmement riche et intéressante. Traumatisme et gestion des souvenirs (sur le plan physique, comportemental et psychologique) sont rigoureusement détaillés. C’est d’autant plus pertinent que la parole est donnée à tous les acteurs et que Wendy Walker a pris un grand soin à la construction de son récit. Ce qui nous semble souvent hors de propos (et nous apparait comme des digressions inutiles) se révèle finalement important pour la suite.
Cette quête incessante est longue et fastidieuse et du coup la lecture est parfois éprouvante et longue. Heureusement l’auteure tient bien son lecteur par un rythme soutenu dans les échanges de points de vue et de paroles. Les thérapies s’enchaînent et l’intérêt est bien maintenu et contant malgré la lenteur dans la progression de l’intrigue et de l’enquête (qui n’en devient d’ailleurs une que très tardivement).
Autre point fort : la manipulation ! Si Wendy Walker tient à montrer les limites de la manipulation psychologique (médicamenteuse ou autre), elle se ne gêne pas nous mener en bateau et nous attirer insidieusement dans les pièges de son intrigue. Le dénouement arrive un peu vite mais tient la route et relève une fois de plus le travail méticuleux de l’auteure (par le biais de son narrateur) dans la construction des différentes pièces de son scénario et des personnages, pour lesquels l’empathie est d’ailleurs indiscutable.
J’ai été bluffée par la force des rebondissements et la révélation finale a finalement eu raison de mon manque d’enthousiasme du départ. Tout n’est pas perdu est un thriller innovant à qui il faut donner le temps de se mettre en place pour ensuite se révéler étonnement bon.