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Alice de l’autre côté du miroir : des merveilles si convenues

Par Rémy Boeringer @eltcherillo

Alice de l’autre côté du miroir : des merveilles si convenues

Le premier épisode d’Alice au Pays des Merveilles, réalisé par Tim Burton, nous avait laissé de glace, lorgnant bien trop vers un Seigneur des Anneaux revisité par Jeanne d’Arc. Alice de l’autre côté du miroir de James Bobin, bien moins grandiloquent, perd cet aspect baroque pour revenir à une imagerie plus proche de l’oeuvre originale. Mais l’un comme l’autre ont totalement travesti et le sens et l’esprit enfantin de Lewis Carroll et peinent à nous émerveiller tout autant.

Alors que le Chapelier Fou (Johnny Depp) se laisse mourir de chagrin, convaincu que sa famille est encore vivante, Alice (Mia Wasikowska que l’on a vu dans Maps to the stars et Crimson Peak) décide d’aller demander l’aide du maître du Temps (Sacha Baron Cohen) pour revenir le jour de leur disparition.

Alice de l’autre côté du miroir : des merveilles si convenues

Alice (Mia Wasikowska)

Soyons d’accord sur un point fondamental, nous n’avons rien contre les adaptations les plus libres, nous avons toujours considéré qu’une oeuvre cinématographique, même inspirée d’une oeuvre littéraire, devait se suffire à elle-même. Encore faut-il, si on la dénature, le faire avec discernement et offrir en contre-partie aux spectateurs, une originalité inattendue voire novatrice. C’est bien le souci avec Alice de l’autre côté du miroir qui n’offre rien de neuf et peine à nous éblouir tant l’univers et la narration proposée sont banales. Alors que le roman de Carroll mettait en scène Alice se démenant dans une partie d’échec à taille réelle et devenant reine du Pays des Merveilles à l’issue de la bataille, il est ici question de voyage temporel. Ce voyage temporel qu’il est si difficile de mettre en scène, tant le sujet a été rebattu, sans tomber dans les poncifs ennuyeux. Alice de l’autre côté du miroir n’échappe à aucun de ceux-ci, en commençant par la sempiternelle rencontre interdite avec un double du passé et la désagrégation de l’univers ainsi perturbé. Même l’idée d’un coeur-horloge a été repompé. On se souvient du concept dans Jack et la mécanique du coeur, long-métrage de Stéphane Berla et Mathias Malzieu, autrement plus onirique et poétique. Les décors ne sont pas en reste.

Alice de l’autre côté du miroir : des merveilles si convenues

Le Chapelier Fou (Johnny Depp)

Si l’on sent évidemment le budget alloué à ceux-ci, on est forcément déçu par l’aspect conventionnel qu’ils revêtent. Voilà que la demeure du Maître du temps est une horloge et qu’une course-poursuite se déclenche dans les couloirs du temps, sur un vaisseau qui n’est pas loin de celui de La planète aux trésors. Même les petites acolytes du maître du temps rappellent ceux de la Bête dans La belle et la bête de Walt Disney. Jamais cependant, on ne ressent ce mélange d’influence comme un hommage, le manque d’originalité flagrant qu’il dispense nous faisant plutôt penser à un plagiat de paresse. Seule originalité, peut-être, les gardes de la Reine de Coeur (Helena Bonham Carter que l’on a vu dans Cendrillon) qui deviennent des créatures tout droit sorti de l’esprit du peintre Giuseppe Arcimboldo, que la tyrannique souveraine prendrait soin de grignoter. Que dire, enfin, de l’émotion quasi-inexistante qui n’affleure jamais la surface du jeu lisse des acteurs ? La tentative de dramatiser l’histoire classique de paradoxe temporel en développant le triste sentiment de la perte par le Chapelier Fou échoue à aller plus loin qu’à poser des apparences. C’est que les liens qu’il a tissé avec sa famille sont maigrichons et ne repose que sur le regret.

Alice de l’autre côté du miroir : des merveilles si convenues

Le Reine de Coeur (Helena Bonham Carter)

Alice de l’autre côté du miroir risque à la fois de s’attirer les foudres des lecteurs de Lewis Carroll tout autant qu’il ne pourra séduire des amateurs exigeants de cinéma fantastique. Cette dernière salve d’adaptation reste décidément très dispensable, la référence la plus apte à faire rêver restant définitivement celle de 1951.

Boeringer Rémy

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