Cela fait deux ans qu'on n'était pas revenues aux Solidays. Les aléas de la vie. On y retourne cette année. Un peu en traînant des pieds, c'est vrai, mais quelque chose nous dit que ce premier jour va nous faire changer de comportement. En arrivant sur le site immense qui ressemble plus à une fête foraine qu'à un festival, on a déjà le sourire aux lèvres. Il fait beau, il ne fait pas trop chaud. Et on s'étonne : il n'y a pas trop de monde. Où sont les festivaliers ? On comprendra plus tard, qu'ils étaient soit bloqués à l'entrée (deux heures d'attente a-t-on lu), soit qu'ils avaient prévu d'arriver pour Flume.
Nous, on est arrivés quand Faada Freddy commençait tout juste. Le smile, l'énergie, des voix, des percus corpos et aucun instrument. À écouter le concert, écoutilles grandes ouvertes, on se dit que la voix est vraiment le plus génial des instruments. En quelques chansons, sur l'amour, la vie, le soi, le nous, Faada Freddy parvient à nous convaincre qu'on peut être heureux ensemble. Son concert à des airs de messes gospel. Dans une autre vie, il a dû être gourou. Dans cette vie-là, il est un fabuleux entertainer et il emporte la foule dans un tourbillon de bonne humeur. Avec Rover, le tableau change. On quitte Harlem, pour chevaucher une Harley, blouson en cuir, lunettes sur le bout du nez, avec le rock vintage de Rover. Il pourrait très bien être la B.O d'un road-trip sur les routes américaines. Oui, notre imagination est débordante, ce vendredi. Entre Harlem et la route 66, on a fait un détour par l'océan peuplé d'amicaux requins. Ceux qui tombaient du ciel étoilé du César Circus où jouaient We Are Match.
We Are Match et nous, c'est une grande histoire d'amour qui date depuis quelques temps déjà. Du temps où ils ne jouaient que devant une poignée de mélomanes avides de nouvelles découvertes musicales. Aujourd'hui, ils sont grands, ils chantent de mieux en mieux. Paco a la voix plus assurée, Simon a cette attitude de plus en plus punk. D'ailleurs, il enverra valser son pied de micro dans un geste rageur en fin de set (" Speaking Machines "). Sid Vicious aurait adoré. Pourtant, We Are Match n'a rien d'un groupe punk, au contraire leur pop teintée de nappes électroniques est tout ce qu'il y a de rêveur. Rêveurs, Feu! Chatterton aussi, ils le sont. Incarnés. Habités. Fous. Géniaux.On ne sait pas quel adjectif colle le mieux au groupe. Peut-être un peu tous à la fois. Ou à tour de rôle. Le groupe joue finalement à 22 heures, ils étaient prévus à 2 heures plus tôt, mais à cause d'un désistement de programme, ils ont changé de créneau. On est heureuses car, autrement, on aurait dû faire un choix cornélien entre eux et We Are Match. Feu! Chatterton jouait une heure. Deux fois plus que l'année dernière, devant deux fois plus de monde. Le nouvel horaire est propice à l'orgie fantasmée. C'est toujours sous-entendu dans les concerts du groupe parisien. Et toujours protégé, comme rapport, rappelle Arthur aux allures de parrain de la mafia italienne. Le set est intelligent mais moins contrôlé, moins figé qu'au Trianon. Un peu plus décousu, un peu borderline par moments, mais ça nous va. Ils commencent par " Ophélie ", terminent par " La Malinche " sous acide et agrémentent le concert d'une surprise : une reprise très personnelle de " J'aime regarder les filles ", sans basse. Nous, on aime regarder Feu! Chatterton, les écouter. Et on aurait préféré que les interludes du groupe ne soient pas noyées par les relents électroniques de la Green Groom qui polluaient l'arrière du site.
On termine la soirée avec une découverte live : The Qemists. Des Anglais. Des petits frères spirituels de Prodigy. Une guitare enragée, des beats agressifs et deux chanteurs écorchés qui crachent leur rage. On regrette que la scène où ils se produisaient soit aussi dépeuplée. Les festivaliers ont préféré se parquer en masse sur la scène principale où Flume triture ses platines. On a tenté, pour voir, on a tenu une minute trente. Pour voir la galerie complète, n'hésite pas à cliquer sur l'image ci-dessus.À LIRE AUSSI >> On y était : Feu! Chatterton au Trianon, acte II.
Texte : Sabine Swann Bouchoul | Photos : Emma Shindo