Marie-Diane Meissirel est franco-américaine. Après des études en France et à Hong Kong, où elle vit aujourd’hui, elle a travaillé dans de nombreux pays dont la Croatie. Huit mois pour te perdre est publié, hasard du calendrier, alors que l'Europe est en pleine crise identitaire.
Et si le livre explore la violence des sentiments maternels il offre aussi en parallèle un questionnement sur ce qui a secoué la Croatie encore fortement marquée par le conflit yougoslave au moment de son entrée dans l'Europe : on n'en a pas fini avec cette guerre. Et c'est pas parce qu'on va rentrer dans l'Europe qu'on va pouvoir faire comme si tout allait mieux. Tu sais, les Européens, j'aurais préféré les voir quand les Serbes nous tiraient dessus (...) Crois-moi ils s'en fichent bien des Croates, là-bas, à Bruxelles ! (p. 37)
La question des réfugiés est au coeur du livre (p. 47) comme elle agite aussi nos consciences.
L'auteur accroche le lecteur en donnant la parole à l'une puis l'autre femme. Emma et Dunja sont très différente l'une de l'autre, de par leurs origines géographiques, leur culture, leur niveau social, leur manière de considérer la géopolitique et leur approche de la maternité.
La Croatie est un pays que je ne connais en fait que de nom et Marie-Diane Meissirel m'a donné envie de m'y rendre. Une possible destination de vacances en somme.
J'ai entendu en fond sonore les musiques folkloriques des Balkans (comme celles de Goran Bregović) que nous connaissons bien depuis qu'Emir Kusturica les a popularisées dans ses films. J'ai découvert que les chants traditionnels s'appelaient klapa et le nom de chanteurs de variétés comme Oliver Dragojevic (p. 36)
Ce qui m'a manqué, c'est d'abord une carte parce que je n'avais aucune idée de la distance séparant les différentes villes où se passe l'action, et puis, peut-être parce que je bloggue régulièrement sur la cuisine, les recettes des plats qui sont cités dans le livre et que de plus en plus souvent les auteurs ajoutent en "bonus".
Il faudra que je trouve d'autres sources d'information pour envisager le goût du sarma, du strukli et du bajadera (p. 51) qui ne doivent pas évoquer grand chose pour vous non plus.
Ce troisième roman est néanmoins très abouti, avec une intrigue psychologique et policière bien ficelée. Maternité et engagement sont-ils incompatibles ? On reproche tellement facilement aux femmes de sacrifier la vie de famille à leur carrière. A sa manière, et avec subtilité l'auteure interroge su les limites des sacrifices qu'on est prêt à endurer pour sauver son enfant, qu'il soit au seuil de sa vie ou déjà adulte.
Emma est en bute avec une question dont elle trouvera la réponse. Son amour aura-til été une illusion ? Et Dunja comprendra qu'elle ne peut pas vivre (survivre) sans quelqu'un à aimer. Tout un chemin que les deux femmes parcourront en huit mois, pour se perdre ... ou se gagner.
Huit mois pour te perdre de Marie-Diane Meissirel, Editions Daphnis et Chloé, en librairie depuis le 23 juin 2016