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L'innovation entre grands groupes et startups : un modèle à la française ?

Publié le 08 juillet 2016 par Pnordey @latelier

[Décryptage] La première édition de Viva Technology a réuni startups, géants du web et grands groupes. Une préfiguration d’une exception entrepreneuriale à la française ?

Plus de 45 000 visiteurs dont le président de la République, le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron et la secrétaire d’Etat au numérique Axelle Lemaire, 5 000 startups présentes pour travailler avec des grands groupes français, dont BNP Paribas et une brochette des champions étrangers de l’Internet. La première édition de Viva Tech a été un succès.

Et elle a peut-être donné le ton de ce qui pourrait être la troisième voie française de la révolution Internet.

Les commentateurs tricolores, mais surtout étrangers de la French Tech aiment à répéter que notre pays n’arrive pas à créer le Google français. Dans un article récent, Jon Evans de TechCrunch s’en est d’ailleurs donné à cœur joie sur l’échec programmé de la French Tech et la fuite des talents.

Ce qui fait peser un risque sur la scène startup française n’est pas le taux élevé de mortalité des jeunes pousses dans l’Hexagone. Il n’est pas meilleur ou plus mauvais qu’ailleurs. Mais c’est la stratégie de sortie qui est la menace. C’est la volonté des grands groupes de racheter les start-ups et réciproquement. Et ce n’est pas vrai que dans la tech : Danone vient ainsi de mettre la main sur Michel et Augustin, plus belle réussite tricolore de l’agro-alimentaire de ces dernières années.

Une dynamique gagnant-gagnant… ou perdant-perdant, si l’on accepte la thèse selon laquelle ces rachats empêcheraient l’émergence des géants français de demain, notamment sur Internet.

La venue à Paris des champions américains du Web, les Eric Schmidt d’Alphabet-Google à John Chambers, patron charismatique de Cisco pourrait apparaître comme le baiser de Judas. Celui de stars venues vérifier que leur ami français, généreux pourvoyeur du Crédit impôt recherche, ne donnerait jamais naissance en son sein à un potentiel rival ?

Et pourtant ! A l’occasion de Viva Tech, on a vu fleurir des annonces de coopération entre startups et grands groupes, y compris un géant peu attendu dans ce domaine, comme LVMH, sans y percevoir l’habituelle domination capitalistique ou d’influence de nos multinationales. Des coopérations décomplexées, parfois décalées, où le grand affiche sans honte avoir besoin du petit, plus agile, plus innovant, plus ciblé. Et où le petit explique sans gêne accepter ce coup de pouce du géant sans avoir l’impression de vendre son âme ou son indépendance. On constate aussi que loin de vouloir absolument racheter des startups, les grands groupes cherchent maintenant des partenariats avec les nouveaux venus.

Certes, tout cela diffère du mythe américain de la naissance de la start-up dans un garage californien. 

Mais ce n’est pas si loin de l’esprit de la Silicon Valley où les patrons milliardaires investissent, eux aussi, à tour de bras dans les jeunes sociétés, dans l’espoir du bon pari.

La différence ? Dans ce frémissement français perçu à Viva Tech, il ne s’agit pas d’investissements de personnes physiques, de business angels ou de VC, mais de personnes morales !

Faut-il y voir une conséquence des mauvais souvenirs de certains capitalistes tricolores qui ont mal vécu l’éclatement de la bulle Internet, il y a 15 ans ? Ou un phénomène lié à la fiscalité française ?

Il importe peu. Ce qui compte, c’est de voir dans le temps s’il ne s’agit que d’un épiphénomène ou d’une tendance de fond. Il faut espérer que ce soit la seconde hypothèse, compte tenu des besoins de nos start-ups des importantes réserves financières de nos grands groupes et de la France à jouer un rôle, à nouveau, essentiel dans le marché globalisé de l’innovation.


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