Magazine

Nous sommes si nombreux sur cette terre, et je me sens si seul.

Publié le 10 juillet 2016 par Paulo Lobo
Nous sommes si nombreux sur cette planète et je suis si seul. Je viens de fermer les yeux, j'ai également éteint la lumière dans ma chambre, je me suis imposé une double obscurité. J'essaie de retrouver les souvenirs précis de ma vie passée. J'essaie de les projeter de la façon la plus vivante possible sur les parois de ma cavité crânienne.
Pendant longtemps, j'ai pensé que ces moments sélectionnés étaient gravés à jamais dans mon disque dur, mais là maintenant, je n'arrive tout simplement pas à les ressortir des tiroirs dans lesquelles je les avais rangés. Des années durant,  j'ai été le comptable de ma petite entreprise existentielle. Chaque fois que j'avais l'impression de vivre un instant spécial, je le fixais dans mes pensées et je m'empressais de le momifier en vue d'une conservation rallongée. Bien-heureuse illusion !
J'ai toujours voulu partir, mais je n'ai jamais osé le faire. Il me semble que ma chambre a toujours été mon point de départ et mon point d'arrivée, le point nodal de tous mes impossibles voyages.
Je n'ai pas peur de la mort. La mort, c'est des paupières qui plongent dans un profond sommeil, sans rêve ni cauchemar. Je sais que la mort est un fait bien avéré, et pourtant je ne peux l'accepter. Pourquoi les choses et les êtres ne durent-ils pas éternellement ? Pourquoi le temps lentement devient-il notre plus féroce ennemi?
Un jour, je découvrirai les paysages verdoyants de l'Irlande. Une nuit, je plongerai dans la vie trépidante de la grande pomme. Un jour, je reviendrai dans mon Portugal de juillet 1984, il faisait chaud et j'étais éveillé. Tout sera d'une évidence surnaturelle. C'est beau, l'espoir.
Un jour, je raconterai mon histoire, mes peines et mes joies, mes plongées en enfer et mes rebondissements. Je n'étais pas prêt, je ne suis toujours pas prêt.
Si loin, si proche. Ici ou ailleurs. Qu'importe la distance, c'est le cœur qui décide.
Il n'y a aucun sens dans ce que je dis. Mieux vaut vous narrer mon cauchemar de la nuit dernière. Ou du moins les quelques lambeaux d'images qui me restent.
J'étais dans une petite ville près de la mer, près de la côte, ce n'était pas l'été, plutôt l'automne, l'air était clair et non vicié, et la lumière était fragile et vibrante. J'étais dans un grand hôtel, enfin quand je rentrais, juste avant de franchir le seuil de la porte d'entrée, il me semblait que c'était un grand hôtel, un bâtiment imposant, victorien et victorieux qui dominait la grande plage de sable doré.
Une fois dans le hall d'accueil, celui-ci rétrécissait à vue d'oeil pour devenir une minuscule pièce à conviction, de quelque 20 m² peut-être, avec un petit comptoir adossé au mur au fond. Derrière le comptoir, une demoiselle en uniforme. Je m'approchai, je pensais que j'allais avoir droit à un sourire de bienvenue, mais pas du tout : la belle était de marbre vêtue et excessivement bureaucratique.
La suite de mon rêve se dilue dans un maelström d'images et de sensations contradictoires, entre le vertige, la peur, l'allégresse et l'excitation. Je me rappelle que j'étais à la fois l'un des invités et l'un des membres de la presse. Je me rappelle que nous devions observer certaines règles. Je me rappelle que j'étais dans l'ascenseur en compagnie d'une très belle fille en robe de soirée. Nous venions à peine d'entamer quelques bribes de conversation que soudain l'équipement s'arrête net dans un grand fracas assourdissant. Je commence à hurler comme un fou, car je suis claustrophobe. Ma compagne ne trouve pas d'autre moyen de me calmer que de me coller un gros bisou à pleines lèvres. Instantanément, cela me fait du bien.
Plus tard, je marche sur un sentier en haut d'une falaise surplombant la mer.
Le rêve a eu du mal à avancer, je me réveillais très souvent en sueur et le cœur anxieux. Je me disais: cela a l'air d'un rêve, mais en réalité c'est un cauchemar.
Vers 5 heures du matin, je jetai un coup d'œil dehors, l'aube pointait le bout de son nez. Je voulais me lever pour aller courir les collines, mais mon corps me disait "reste tranquille, dors encore".
À quoi bon, en effet ?
La lumière et la vie.
Une certaine manière de bouger et d'avoir la foi.
Tout ceci est extrêmement complexe et passionnant, me disait mon psy.
Comment interprétez-vous votre songe?
Je ne sais pas. Je le regardais droit dans les yeux et je lui demandai : croyez-vous en Dieu?
Cela dépend, me répondit-il.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Paulo Lobo 1390 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte