Partager la publication "[Critique] SHARKNADO : THE 4TH AWAKENS"
Titre original : Sharknado : The 4th Awakens
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Anthony C. Ferrante
Distribution : Ian Ziering, Tara Reid, David Hasselhoff, Gary Busey, Cody Linley, Cheryl Tiegs, Masiela Lusha…
Genre : Comédie/Horreur/Suite/Saga
Date de sortie : 3 août 2016 (sur SyFy)
Le Pitch :
Cinq années se sont écoulées depuis le dernier sharknado. Finn, le héros de l’Amérique profite d’une existence paisible avec sa famille, tandis que le gouvernement a confié le soin d’éviter tout nouveau cataclysme à une entreprise spécialisée dans les nouvelles technologies. Pourtant, un nouveau sharknado ne tarde pas à s’abattre sur Las Vegas, semant le chaos sur son passage. L’occasion pour Finn de passer à nouveau à l’attaque…
La Critique :
On ne sait trop comment Sharknado a réussi à se hisser au dessus de la masse des navets produits à la chaîne tous les ans. Pourquoi cette histoire de requins charriés par des tornades est parvenue à gagner en popularité, par rapport à des trucs comme L’attaque du requin à trois têtes ? Mystère. Mais c’est un fait : aujourd’hui, Sharknado bénéfice d’une exposition assez large et ses fans sont nombreux. Au point d’encourager les producteurs d’Asylum, la boite responsable de cet outrage au cinéma, à enchaîner les épisodes avec la même régularité qu’un Steven Seagal bien décidé à enfiler les films d’action tout moisis tournés pour pas un rond en Europe de l’Est, plutôt que de se sortir les doigts. C’est donc un an après la sortie d’un Sharknado 3 absolument effroyable de nullité que le quatrième volet revient nous rappeler que la recette à la base d’un bon nanar n’est pas aussi simple qu’on pourrait le penser à première vue.
Car Sharknado 4 est une belle purge. Un produit boosté par un cynisme hallucinant, qui démontre d’une totale incompétence, quand il s’agit de détourner des codes bien connus à son avantage, pour livrer un spectacle prétendument divertissant et décalé.
L’outrance est toujours à l’ordre du jour. Si on peut reconnaître une qualité à Sharknado 4, c’est bien celle-là : avoir poussé tous les compteurs dans le rouge sans aucune retenue. Le problème ici, est pourtant toujours le même : oui, le film va loin dans le grand n’importe quoi, mais il le fait mal. Très mal. Prenez le récent Independence Day 2. Voilà un nanar qui en a sous la ceinture ! Une histoire débile, des dialogues à la ramasse et des effets-spéciaux soignés. Bon ok ce n’était pas volontaire mais au moins, le show a une certaine gueule. Car il ne faut pas se méprendre. Faire un navet, un bon gros navet bien dégoulinant, demande un minimum de talent. D’un côté il y a les types qui pensent faire bien mais qui livrent au final un truc difforme souvent hilarant bien malgré lui, comme Roland Emmerich avec Independence Day 2, et de l’autre, les petits opportunistes comme Anthony C. Ferrante qui font exprès de faire du nul mais qui au fond, n’arrivent jamais à rendre la chose stimulante d’une quelconque façon. C’est tout un art et non, Sharknado 4, peut-être encore plus que les trois volets qui le précèdent, ne se place pas dans la catégorie des bons nanars. Là, on se retrouve face à quelque chose d’opportuniste donc, de très laid, de parfaitement con et surtout d’ennuyeux au possible.
Plusieurs détails (qui n’en sont pas), sont à pointer du doigt pour expliquer cette catastrophe pharaonique. Tout d’abord les effets-spéciaux. Qui a dit qu’un navet assumé devait ressembler à un gros tas de pixels difforme ? Pourquoi ne pas avoir profité du succès de la saga pour booster un peu le budget et proposer autre chose que des pauvres trucages totalement indigents. Et on ne parle pas uniquement des tornades et des requins. Tout est nul ! Même quand il ne se passe rien de particulier à l’écran (comprendre : quand il n’y a pas de requin), les mecs trouvent le moyen de faire des incrustations sur fond vert probablement torchées par un stagiaire de première année shooté à la colle en pot. C’est pathétique. Il n’y a pas d’autres mots. Au point que souvent, l’action devient illisible. On ne comprend rien, c’est affligeant du début à la fin et puis, comme mentionné plus haut, jamais amusant. Un constat quand même hallucinant. Quand on compare Sharknado 4, qui sort donc en 2016, et des films comme Twister (1996) ou Peur Bleue (1999) (pour rester dans les tornades et les requins), le fossé est énorme. On peut voir sur YouTube des courts-métrages fauchés portés par des effets plus aboutis. C’est dire ! Alors oui, le but de Sharknado 4 n’est pas de mettre en avant des sfx hyper chiadés, on a compris, merci bien, mais un minimum serait le bienvenu. Là, le show tient plus de la bouillie indigeste et non, ça ne passe pas.
Ensuite, l’écriture. Même constat que précédemment : un bon navet, ça s’écrit avec un tant soi peu de talent et de finesse. Tous les délires sont permis quand on veut faire volontairement du bis. Regardez Kung Fury par exemple. Sharknado 4, malheureusement, a du être écrit sur un coin de table, à la fin d’un repas arrosé, par un je-m’en-foutiste juste pressé de finir sa journée pour aller écumer de la bière jusqu’à plus soif en regardant des rediffusions de La Famille Kardashian. Bourré de références hyper mal intégrées (Star Wars, mais aussi Terminator), le scénario (ou plutôt ce qui fait office de scénario), ne fait même plus le minimum syndical. Là, on est clairement dans le foutage de gueule intégral. Les dialogues sont crétins et l’écriture des scènes d’action parfaitement brouillonne.
Fatalement, un tel carnage n’épargne pas les comédiens.Tous ou presque livrent des performances moisies jusqu’à l’os. Tara Reid, que la chirurgie esthétique à outrance a transformé en sosie avec une perruque des frangins Bogdanov, signe ici l’arrêt de mort d’une carrière déjà pas reluisante, tandis que Ian Ziering s’amuse dans un rôle qu’il prend visiblement très au sérieux. Vu ce qu’on lui a proposé depuis la fin de Bervely Hills 90210, difficile de lui en vouloir et tant mieux si cela lui permet de revenir sous le feu des projecteurs. David Hasselhoff, qui a depuis bien longtemps fait le choix de s’enfoncer dans les tréfonds de la nullité, est fidèle à ses dernières performances (publiques et privées) et tous les autres, comme Gary Busey, ne font qu’admettre à demi-mot, en jouant comme des manches, que oui, à l’heure actuelle, il n’y pas mieux à se mettre sous la dent. C’est triste. Et ce ne sont pas les nombreuses guest stars qui peuvent y faire quoi que se soit. Ce joyeux petit monde lustre les cuivres du Titanic sans même se rendre compte que le bateau coule.
Le seul tour de force qu’accomplit Sharknado 4 est de ralentir le temps. Alors qu’il ne dure qu’1h25, il s’avère incroyablement barbant. Il répète tout ce qui a déjà été fait, ne fait preuve d’aucune audace, les costumes semblent avoir été confectionnés par un amateur de cosplay débutant âgé de 5 ans à peine, rien n’a de sens, la photographie est dégueulasse, etc… Les mots manquent pour qualifier ce quatrième volet.
Au début, Asylum produisait des navets pour un public restreint. Le succès des Sharknado a fait prendre conscience aux exécutifs de la boite qu’ils tenaient quelque chose et désormais, leur démarche a changé. Elle a perdu en innocence et gagné en cynisme putassier. Il y a toujours une part de hasard, d’imprévu, dans le fait de faire un film, de le louper et de voir ce dernier générer un véritable culte. On ne peut pas le faire exprès. En cela, le premier Sharknado est le meilleur du lot, vu qu’il n’est rien de plus qu’un petit délire bricolé par des artisans conscients de leurs limites. Le quatrième est tout le contraire. Il est le fruit d’une démarche pensée. La spontanéité s’est fait la malle. Une certaine innocence aussi. Le fond était atteint depuis longtemps. Ils avaient même bien creusé pour s’enfoncer un peu plus. Là, on bat des records.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : SyFy/Asylum