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Petit pays de Gaël FAYE

Par Lecturissime
Petit pays de Gaël FAYE

Au début des années 90, Gabriel fait les 400 coups avec sa bande de copain au fond de leur ruelle à Bujumbura au Burundi. Il respire le bonheur et l'insouciance mais une première déchirure transperce son quotidien quand ses parents décident de se séparer. Mais autour de cette famille désunie, de ce père français et de cette mère rwandaise dont la famille habite Kigali, rôde une catastrophe bien plus violente et sanguinaire...

Roman de l'enfance, Petit pays chante l'insouciance des jours sans fin passés à voler des mangues dans le jardin des voisins, à se raconter des histoires dans des vieilles voitures décatis, à se disputer pour mieux se réconcilier, à courir à perdre haleine en virevoltant dans le temps infini d'un avenir radieux, sur le sol d'un pays à la beauté pure et simple :

"Rien de plus doux que ce moment où le soleil décline derrière la crête des montagnes. Le crépuscule apporte la fraîcheur du soir et des lumières chaudes qui évoluent à chaque minute. A cette heure-ci, le rythme change. Les gens rentrent tranquillement du travail, les gardiens de nuit prennent leur service, les voisins s'installent devant leur portail. C'est le silence avant l'arrivée des crapauds et des criquets. Souvent le moment idéal pour une partie de football, pour s'asseoir avec un a mi sur le muret au-dessus du caniveau, écouter la radio l'oreille collée au poste ou rendre visite à un voisin." p. 81

Petit pays de Gaël FAYE

Puis, tout bascule quand tout à coup la politique rattrape l'enfance, quand les différences ethniques éclatent au grand jour :

"J'ai découvert l'antagonisme hutu et tutsi, infranchissable ligne de démarcation qui obligeait chacun à être d'un camp ou d'un autre. Ce camp, tel un prénom qu'on attribue à un enfant, on naissait avec, et il nous poursuivait à jamais. Hutu ou tutsi. C'était soit l'un soit l'autre. Pile ou face. (...) La guerre, sans qu'on lui demande, se charge toujours de nous trouver un ennemi. Moi qui souhaitais rester neutre, je n'ai pas pu. J'étais né avec cette histoire. Elle coulait en moi. Je lui appartenais." p. 133

Vient alors la perte des innocences "qui se débattaient à marcher au bord des gouffres.", l'horreur qui s'invite sur les terrains de jeu, les tueries incompréhensibles, les familles éplorées, la folie des uns pour combler le désespoir des autres. Les enfants deviennent alors des " exilés de leur enfance", parce qu'ils ont vu et vécu des choses qu'un enfant ne devrait jamais voir, ni même concevoir. Ils perdent leur enfance dans la peur dévorante, dans la haine, dans le sang.

Dans un texte puissant, à la poésie évocatrice, Gaël Faye nous raconte un peu de son histoire, un épisode de l'Histoire de son pays. Lui-même a dû se réfugier dans l'écriture pour survivre, comme le jeune Gabriel trouve refuge dans les livres prêtés par la voisine. Mais il chante aussi la joie de l'enfance, l'amour inconditionnel pour son pays, et, a u bout de l'horreur, l'espoir, comme un point ténu au fond de l'horizon...

"On en doit pas douter de la beauté des choses, même sous un ciel tortionnaire. Si tu n'es pas étonné par le chant du coq ou par la llumière au-desus des crêtes, si tu ne crois pas en la bonté de ton âme, alors tu ne te bats plus, et c'ets comme si tu étais déjà mort.

- Demain, le soleil se lèvera et on essaiera encore, a dit Prothé, pour conclure." p. 181

D'autres avis : Africultures ; Les avis sont nombreux, et unanimes ! Si vous ne devez en lire qu'un de la rentrée littéraire, lisez celui-là !

Petit pays, Gaël Faye, Grasset, 2016, 215 p., 18 euros

Il a obtenu le Prix du roman Fnac. Vous pourrez rencontrer l'auteur :

- à la Fnac Montparnasse le mardi 20 septembre à 18h

- à la Fnac de Nantes le mrecredi 28 septembre à 17h


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