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Un Lurçat peut en cacher un autre

Publié le 12 septembre 2016 par Pantalaskas @chapeau_noir
Maison Lurçat en 1930

Maison Lurçat en 1930

Le nom de Lurçat évoque immédiatement celui du peintre Jean Lurçat qui davantage encore que peintre a laissé une œuvre majeure comme créateur de tapisseries. Pourtant c’est l’actualité qui remet en lumière son frère André, architecte.

«L’esprit nouveau»

La maison du peintre, construite en 1925 par André Lurçat dans la cité d’artistes de la Villa Seurat dans le quinzième arrondissement de Paris atteste de l’incroyable créativité des années vingt. En France, un certain nombre de réalisations témoignent encore aujourd’hui de cette modernité : la maison Poiret conçue en 1921 par l’architecte Robert Mallet-Stevens qui laisse également la villa Cavrois près de Lille  et la villa Noailles à Hyères. Pour la Villa Besnus de Le Corbusier en 1922 à Vaucresson aujourd’hui défigurée et flanquée de trois magasins et un toit-terrasse, «L’esprit nouveau» s’est envolé. Plus chanceuse, la maison de Van Doesburg à Meudon, heureusement protégée, a conservé son extraordinaire rigueur. A Paris, il suffit de se rendre rue Mallet-Stevens pour vérifier combien la révolution artistique des années vingt propose encore cette même fraicheur.
La maison de Jean Lurçat est la première des huit  maisons construites pour des artistes par André Lurçat dans cette impasse Villa Seurat, l’un des trois ensembles urbains importants réalisés à Paris dans les années vingt. Maintenue dans son état d’origine avec son décor et son  mobilier, elle a été léguée par la veuve du peintre à l’Académie des Beaux-Arts avec les collections et le fonds d’archives qu’elle abrite

La maison Lurçat aujourd'hui

La maison Lurçat aujourd’hui

Aujourd’hui une restauration de ce bâtiment doit être entreprise et la Fondation du  Patrimoine qui s’en charge vient de mettre en place une souscription publique pour faire aboutir le projet. La notoriété d’André Lurçat n’est pas celle atteinte par un Mallet-Stevens ou un Van Doesburg quand bien même sa réputation de son vivant le plaçait parmi les architectes en vue.

« Maintenant il faut changer le monde ! »

Ses prises de position dès le début des années vingt participent de ces remises en questions radicales qui traversent à l’époque l’art, l’architecture avec cette ambition démesurée d’une approche globale, totale du monde après les convulsions de la première guerre mondiale.
Son engagement personnel prendra d’autres formes dans les décennies suivantes : après avoir édifié en 1933 pour la municipalité de Villejuif le groupe scolaire Karl-Marx,  il va travailler quelques années à Moscou, participe à la création du Front national des architectes résistants. Mais c’est bien cette maison de 1920 construite pour son frère Jean qui positionne le jeune architecte dans cette lumineuse voie des véritables révolutionnaires d’une époque dans laquelle Théo Von Doesburg clame « Maintenant il faut changer le monde ! ».
L’activité prolifique de Jean Lurçat, peintre, céramiste, créateur d’une nouvelle tapisserie,créateur de décors, de costumes, se déploie dans le monde entier, laissant peut-être au second plan l’autre Lurçat, son cadet deux ans.
Dans une autre génération deux frères oint eux aussi connu une situation de ce type : l’architecte André Wogenscky aujourd’hui décédé, a partagé l’aventure de la création avec son frère Wogensky Robert, peintre. Les deux frères avaient-ils trouvé dans la discrète différence d’écriture de leurs noms la solution pour se différencier dans leurs itinéraires artistiques ?
Chez les Lurçat, pas de jeu d’écriture pour assurer leur singularité. L’Académie des Beaux-arts remet en lumière le frère un peu oublié pour les besoins de cette restauration peut-être à la fois d’un bâtiment et d’un parcours de créateur.

Restauration de la maison-atelier de Jean Lurçat

www.fondation-patrimoine.org/32581


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