L’essor de l’Internet Mobile a profondément bousculé le commerce électronique. Les marchands doivent intégrer tablettes et smartphone dans leurs parcours d’achats sous peine de perdre leurs clients, mais déjà se dessine la nouvelle génération de e-commerçants.
La quête perpétuelle de simplicité d’Apple dans la conception de ses produits et applications fait désormais figure de modèle pour de nombreux marchands. Tous travaillent en priorité à simplifier au maximum le parcours d’achat comme l'a souligné Ghadi Hobeika, Directeur Marketing Digital de la Fnac lors de la conférence d'ouverture du salon E-Commerce Paris : "Le mobile, ce doit être la façon la plus simple de réaliser son achat. Nous retravaillons nos parcours d'achat afin de les simplifier au maximum dans un usage full web et, dans un usage drive to store, optimiser les usages multicanaux." Une course à la simplicité confirmée par Thierry Lernon, Directeur Général eCommerce, CRM et cross-canal des magasins But : "La difficulté que tous les marchands ont à rendre l'expérience simple efficace et fluide. Nous avons encore quelques années de travail devant nous afin d'offrir une expérience seamless, efficace, sachant que le smartphone et les autres outils d'interaction digitaux sont utilisé à la fois pour consulter les fiches produit, connaitre les services, vérifier les horaires des points de vente, prendre des rendez-vous. Le gros enjeu est de rendre tout cela simple et efficace."
L'UX est donc devenu la priorité numéro un chez beaucoup de marchands d'autant que le smartphone et surtout la tablette s'imposent de plus en plus dans les parcours d'achat, y compris pour des internautes qui achètent depuis leur domicile. Le commerce mobile a doublé en France l'année dernière et, avec un chiffre d'affaire de l'ordre de 7 milliards d’euros il représente 23,6% du E-Commerce en France. Cette année, les Français effectueront 15 achats depuis un device mobile, contre 10,5 en 2015.
Les enseignes doivent désormais s'adapter à cette évolution du comportement des internautes, le mobile n'est pas un moyen d'achat alternatif, il est devenu omniprésent dans le parcours d'achat des internautes. Après la grande vague du responsive design, on observe un regain d'intérêt pour les "apps" de commerce électronique natives, plus propices à une expérience client évoluée que ces sites Web à géométrie variable dont les fonctionnalités sont parfois très limitées. Une fois installées sur le smartphone de l'internaute, l'application native garantit un taux de fidélité bien plus élevée qu'un site Web responsive et c'est aussi un excellent outil pour tracer les clients via leur identifiant personnel. L'enjeu est de taille pour les enseignes qui ont besoin de "Data" pour alimenter leurs algorithmes de ciblage.
Des applications mobiles de nouvelle génération
Dans cette course à la simplicité, certaines applications mobiles repoussent les limites des sites de E-Commerce classique. Wish mais aussi Wanelo, Spring, The Hunt font partie de cette génération d’application de commerce mobile calquées sur Pinterest et ses "buyable pins". Il suffit d'un clic ou même ne faire qu'effleurer la photo du produit pour que la commande soit lancée. Si l'audience de Pinterest reste bien évidemment bien inférieure à celle de Facebook, l'application de partage de photo intéresse très fortement les marques de mode et pas uniquement parce que son audience est majoritairement féminine. Avec un taux de ré-épinglage de 80% contre 1,4% sur Twitter, l'engagement des utilisateurs Pinterest est hors du commun et surtout, aux Etats-Unis, Pinterest est devenu une source de trafic sur les sites de marques et les sites de E-Commerce significative, supérieure à Google+, LinkedIn et YouTube réunis.
De simple site de partage social d'images, Pinterest a multiplié les fonctionnalités afin de devenir une véritable plateforme de E-Commerce. Il est aussi le chef de file de nombreuses applications en termes d'interface utilisateur.
A ce type d’applications mobiles 100% graphiques où le parcours d'achat est réduit à sa plus simple expression, Facebook défend une autre voie, celle des chatbots. Ces agents conversationnels permettent de choisir un produit non plus en navigant dans un catalogue, mais en posant des questions par chat à une IA qui propose des articles en fonction des réponses fournies par l'internaute. Facebook a dévoilé aux développeurs sa plateforme de développement de bots lors de sa conférence F8, en avril 2016. De rares enseignes ont créé un bot pour Messenger, certaines comme H&M ou Sephora ayant préféré se positionner sur l'application de communication instantanée Kik ou WeChat. Ce n'est que le 12 septembre dernier que Mark Zuckerberg annonçait enfin l'arrivée du paiement en ligne sur Messenger. 4 ans après WeChat qui dispose déjà des coordonnées bancaires de 200 millions d'utilisateurs, il sera possible de mener une transaction de A à Z sans quitter Messenger. La fonctionnalité n'est encore qu'en mode beta, mais l'accès devrait être élargi à tous les marchands d'ici la fin de l'année.
L'internet des objets change la donne
Néanmoins lorsqu’on interrogeait les marchands sur qui était pour eux le modèle à suivre, un nom revient encore et toujours en matière d’innovation dans le e-commerce, celui d’Amazon. L’américain avait déjà réduite le tunnel d’achat Web à sa plus simple expression en plaçant un bouton d’achat en 1 clic sur chaque fiche produit, avait aussi montré l’exemple avec la simplicité du parcours d’achat sur mobile ou sur Kindle, mais depuis quelques mois le Lab126 d’Amazon a littéralement réinventé le e-commerce avec de multiples innovations de ruptures. En 2014, il y eu le lancement de l’Amazon Echo, cet objet connecté toujours à l’écoute du consommateur et qu’il suffit d’interpelle pour passer commande. Amazon Echo et sa version réduite Echo Dot arrivent en Europe. Lors de l’annonce du lancement de ses devices en Allemagne et au Royaume-Uni, Jeff Bezos a affirmé qu’Alexa, l’assistant vocal développé par Amazon comptaient déjà des millions d’utilisateurs.
Avec les différents modèles d'Amazon Echo et sa FireTV, Amazon aligne toute une gamme d'objets connectés capables de porter Alexa, son assistant personnel vocal.
Amazon a surfé sur la vague des assistants vocaux popularisées par le Siri d’Apple puis Google Go et Microsoft Cortana avec succès puisque, selon The Information, après avoir vendu 1 million d’Amazon Echo en 2015, Amazon aurait porté son objectif de vente à 3 millions pour cette année et à 10 millions pour l’année prochaine. Ces ventes auraient déjà rapporté un milliard de dollars à l’américain, un coup de maître pour Jeff Bezos qui a littéralement inventé une nouvelle catégorie d’objet connecté et à même pris de court Google dont on attend toujours le lancement de Google Home, initialement prévu pour cet automne. Sur le papier, l'objet connecté que prépare Google se veut plus ambitieux que l'Amazon Echo, l'objectif étant d'offrir une véritable interface vocale universelle pour l'ensemble des objets connectés de la maison. De son côté, Apple préparerait aussi un hardware pour Siri et la marque à la pomme pourrait bien griller la politesse à Google.
De fait, Amazon a pris de vitesse l'ensemble des acteurs du E-Commerce et profite aujourd'hui de son avance. Car si l'Amazon Echo pouvait sembler limité à son lancement, de nombreux partenaires sont venus enrichir de nouvelles fonctionnalités la plateforme connectée. Au début du mois, Amazon annonçait avoir franchi la barre des 3 000 "skills" développés par des partenaires au moyen de ses SDK Alexa Skills Kit (ASK) et Alexa Voice Service (AVS). Il est maintenant possible de piloter à la voix des équipements électroménagers General Electric de même que l’Amazon Echo peut lire des tweets ou les cours de la bourse via Bloomberg, appeler un Uber, ainsi que diffuser de la music via Spotify, Pandora.
Amazon a décliné Echo en famille d’objets connectés avec un modèle moins couteux, l'Echo Dot ainsi qu’un modèle portable, l'Amazon Tap. Si, en termes de design, Amazon est aux antipodes des produits Apple, le cybermarchand applique à la lettre la philosophie de simplicité martelée par Apple et le succès est à la clé.
Le « Push to Buy », une nouvelle forme de commerce ?
Alors que l'Amazon Echo a laissé les marchands KO, les éventuelles répliques provenant du projet Ivee ou d'éventuelles retombées du projet européen Dirha dans le E-Commerce se font toujours attendre. En mars 2015, Jeff Bezos enfonçait le clou avec ses boutons connectés Amazon Dash. Ce bouton connecté propose aux marques une solution de "Push to Buy" où le consommateur dispose d'un bouton physique pour chaque consommable qu'il souhaite voir renouvelé automatiquement via son abonnement Amazon Prime. Le concept a surpris et laissé septique de nombreux spécialistes puisque si le système est sans doute le plus simple que l'on puisse imaginer, il enlève toute possibilité de choix pour l'internaute qui commande inlassablement le même produit de la même marque. Le bouton, facturé 4,99 $, est remboursé au premier achat. Ghadi Hobeika, Directeur Marketing Digital de la Fnac commente l'approche inédite de son rival : "Nous essayons de faire venir les clients sur nos canaux de vente, que ce soient les réseaux sociaux, les canaux digitaux ou physiques, eux font la démarche inverse. Ils s'inscrivent dans le parcours de vie du client et s'immiscent afin que le geste d'achat soit quasiment effacé puisqu'il suffit d'un mot, d'un geste pour que l'achat soit réalisé sans aucune forme de friction ou d'effort demandé au client."
Amazon Dash, l'E-Commerce est réduit à sa plus simple extrémité : un bouton pour commander un produit. Les marques adorent, mais les consommateurs vont-ils suivre ?
L'Amazon Dash est-il un succès ? Si le nombre de boutons Amazon Dash effectivement vendus à ce jour n'a pas été rendu public par Amazon, selon une étude de Slice Intelligence, moins de la moitié des acheteurs du bouton connecté n’auraient effectué le moindre achat avec. Les consommateurs, même abonnés à Amazon Prime, ont encore du mal à s'habituer à ce nouveau mode d'achat, mais Amazon remporte un vrai succès auprès des marques qui se bousculent pour proposer des boutons à leurs couleurs. 50 nouveaux boutons sont venus enrichir la boutique Amazon Dash cet été, portant le total à 150 marques représentées. Désormais, Amazon Dash sort de ses frontières, avec une ouverture du service au Royaume-Uni avec 40 marques représentées.
Déjà bousculés sur le Web, les marchands français arriveront-ils à contrer l'Américain dans le monde de l'Internet des objets ? Hormis le bouton d'appel Darty, exclusivement dédié au SAV, aucune enseigne n'a dévoilé ses plans lors de cette édition 2013 du salon E-Commerce.