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Une vieille jeune histoire

Par Carmenrob

Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur est un livre remarquable à plusieurs titres. Rappelons que ce succès de librairie, prix Pulitzer de 1961, vendu à quelque quarante millions d’exemplaires, demeura le seul roman de Harper Lee jusqu’à tout récemment. En effet, en 2015, paraissait un deuxième roman de la discrète écrivaine, mettant en scène plusieurs des personnages du premier et dont l’histoire se déroulait une vingtaine d’années plus tard. Deuxième livre qui aurait peut-être été écrit avant l’autre. Mêlant tout ça, mais qu’importe. Livre remarquable donc, par sa longue carrière solo, mais surtout par la qualité de l’ouvrage considérée comme un grand classique de la littérature américaine du 20e siècle.

oiseau
L’histoire se passe en Alabama, dans une petite ville de l’Amérique profonde, anciennement esclavagiste et nostalgique de la belle époque de la suprématie blanche. Atticus Finch, avocat, se voit désigné d’office pour représenter un Noir accusé du viol d’une Blanche, cause vouée à l’échec dès le départ, quels que soient les arguments mis en preuve par la défense en faveur de l’innocence de l’inculpé. L’acquittement est tout simplement impensable.

L’histoire nous est racontée par Scout, la fille de l’avocat, âgée de 6 ans au début d’un récit qui s’étendra sur trois ans. Veuf, Atticus Finch, élève ses deux enfants, Scout et Jem, son grand frère, en leur inculquant des valeurs de liberté et de justice sociale. Ce qui ne manque pas de faire sourciller les bien-pensants d’autant plus qu’ils désapprouvent l’habillement de Scout, son franc-parler, son goût de la bagarre. Petite bonne femme opiniâtre, aux idées bien campées, Scout nous dépeint une fresque sociale foisonnante avec la naïveté et la francise implacable de l’enfance. Ce procédé narratif induit une bonne dose d’humour et de fraîcheur dans un tableau qui serait plutôt désespérant vu d’un autre angle.

Parallèlement au procès et aux turbulences qu’il provoque dans la municipalité, Scout et Jem fantasment sur un voisin qui se terre dans sa maison et qu’ils n’ont jamais pu entrevoir. La curiosité et la frayeur leur feront faire bien des bêtises à l’encontre du pauvre ermite.

Ces deux branches de la trame narrative finiront par converger et donner tout son sens au titre, l’oiseau moqueur symbolisant ici les laissés pour compte, les moins bien nantis, les différents. Vieille de plus de 60 ans, cette histoire parue au plus torride des tensions raciales n’a malheureusement pas pris une ride. On prie toujours beaucoup chez nos voisins du sud et on tire encore férocement sur l’oiseau moqueur.

Harper Lee, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, Grasset, 2015, 320 pages


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