Magnifique roman que ce premier de Marie Bennett. Un vrai coup de coeur dont je vais vous parler aujourd’hui. Un couple séparé par la guerre, l’un se bat pour survivre, l’autre contre ses remords face à son adultère avec une femme. Le pardon et vivre avec ses démons est-il possible?
Quatrième de couverture:
« Suède, Hiver 1940. Georg est appelé sous les drapeaux. Exposée à des températures extrêmes, mal équipée, sous alimentée, son unité se trouve à la merci d’officiers incompétents qui exposent les soldats à des risques inutiles et n’hésitent pas à leur infliger châtiments et humiliations. Lorsque cinq recrues meurent, c’est la mutinerie, et Georg est envoyé en camp de travail.
De son côté, Kerstin, la femme de Georg, survit comme elle peut à Malmö. Les années passent, et avec elles l’espoir de revoir un jour son époux. Mais une rencontre bouleverse sa vie, celle de Viola, femme riche, belle et cultivée dont Kerstin tombe éperdument amoureuse. C’est le débit d’une liaison d’autant plus passionnée qu’elle est interdite. Pourtant, aveuglée par la jalousie, Kerstin détruit ce bonheur fugace.
Le soir de Noël 1943, les deux époux se retrouvent enfin. Pourront-ils reprendre le cours de leur existence après avoir traversé autant d’épreuves?
Un superbe roman sur l’amour, la trahison et les remords. »
Mon avis:
Seconde Guerre Mondiale, Georg part au front mais le plus difficile n’est pas l’ennemi mais les officiers qui leur mènent une vie terrible. Le froid glacial était déjà difficilement supportable mais les marches forcées dans la neige, les punitions sans raisons apparentes infligées par un dirigeant mégalo et autoritaire n’arrangent rien. Les soldats se rebellent et les années en camp de travail vont attiser une haine chez Georg et ses compagnons soldats encore vivants. Une haine et une rancoeur contre cet officier inhumain et intransigeant. Le retour à Malmö pour Georg va être terrible: pas de travail, engelures, peur de retrouver sa femme et qu’elle ne l’aime plus ou que tout soit différent.
Pour Kerstin, en revanche, si les premières années ont été difficiles car l’absence de son mari lui pèse, lorsqu’elle rencontre Viola, l’amour qui les emportent toutes les deux fait vite oublier son mari à Kerstin. Elle ne semble plus aussi pressée qu’il rentre ou si elle en a parfois envie, elle ne sait pas comment elle vivra son retour.
Chaque histoire de l’un est de l’autre est racontée avec superbe. La violence des conditions de vies des soldats y est saisissante et la transformation qui s’opère dans l’esprit de ces soldats fait froid dans le dos. Des désirs de vengeance s’immiscent au fin fond d’eux même et les mangent de l’intérieur.
L’amour que ressent Kerstin pour Viola et sa jalousie qui prend de plus en plus d’ampleur vont lui faire vivre à la fois des instants magiques mais aussi terribles. Après la découverte de cette relation elle devient pleine de suspicion et va se mettre à tout envisager, à fouiller pour se nourrir du moindre semblant d’indices pouvant lui faire croire que Viola la trompe.
Au retour de Georg, les retrouvailles entre eux est loin d’être simple. Chacun vit avec ses années passées loin de l’autre et avec leurs secrets. Georg ne peut pas tout raconter de ce qu’il a vécu à sa femme qui quant à elle ne peut se résoudre à dévoiler son histoire avec Viola, malgré les conséquences qu’elle endure.
Un magnifique roman, des histoires belles et terribles, pleine de souffrance, de vengeance, de mensonges, de remords. Un premier roman incroyable dans lequel les sentiments des uns et des autres sont remarquablement décrits et saisissent le lecteur.
A lire absolument!
Bonne lecture!
Petit extrait:
« Il est parfois difficile de savoir pourquoi une relation se dégrade, à quel moment une histoire d’amour commence à battre de l’aile. Le déclencheur peut être un événement anodin. Mais dès lors que le ver est dans le fruit, c’est souvent le début de la fin, plus ou moins rapide. Celui ou celle qui est en position de faiblesse, qui aime et attend plus, veut entendre l’autre, qui n’est pas enclin à le faire, prononcer des mots d’amour. On quémande, on supplie, on s’accroche. On commet l’erreur fatale: laisser paraître sa faiblesse, voire son désespoir. On pousse l’autre au mépris; il s’éloigne. Le déséquilibre s’accroît et, avec le temps, ce qui n’était qu’une petite asymétrie est devenu un gouffre si profond que la relation est condamnée. »
« Hôtel Angleterre », Marie Bennett, Editions Denoël, Octobre 2016, 608 pages.