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Chroniques d'Alger - Volet 2

Par Gangoueus @lareus
Chroniques d'Alger - Volet 2

Le divan des Lectures de Gangoueus

Les organisateurs de l'Esprit Panaf ont eu la brillante idée de m’aménager un stand avec deux magnifiques fauteuils qui constituaient une formidable halte pour celles et ceux qui avaient marché pendant des heures dans le grand hall du SILA. De manière naturelle, des personnes ayant des profils très différents se sont installés et se sont lancés dans des échanges riches d’enseignement.

Comme ce monsieur d’un certain âge, l’élocution aisée, qui raconta à Ibrahim Ndong et moi-même, l’histoire du salon du livre d’Alger qui pour ses premières éditions, il y a une vingtaine d'années, était plutôt une foire du livre. Il me vient à l’esprit une image, celle qu’on rapporte d’Ayiti, terre du livre également, où de grandes foires du livre s’inscrivent dans l'agenda des haïtiens. Haïti comme l’Algérie, a obtenu son indépendance d’une haute lutte avec la France. Ceci expliquerait-il cela?Supputation. Hypothèse. Digression terminée. Je reviens à cet homme engageant qui tente de faire patienter sa femme (qui l’appelle sur son portable) alors qu’il nous raconte l’histoire du salon. Il explique qu’au moment de la création du salon, il y avait beaucoup  de librairies et les accès aux livres étaient beaucoup nombreux en Algérie. Puis vinrent les années sombres…Alors que je discute avec Ibou, une dame arrive lentement et s’assoit sur le pouf qui est à côté de nos deux fauteuils. Son regard n’est pas fuyant. Il est lointain. Elle parle sans me regarder au départ. Elle est voilée, d’un port très austère, un peu comme les femmes darbystes pour qui connait les fondamentalistes protestants. Elle parle. Elle est sociologue. Toujours le regard songeur, elle dit que ce sont les mêmes ouvrages qu’elle retrouve chaque année. J’émets une objection : «  Il n’y a pas de nouveautés, de nouvelles publications? ». Elle précise : «  Dans son domaine, la sociologie » .

Deux jeunes s’installent gaillardement. Ils ont des questions. Qu’est-ce qu’on fait là, d’où

Chroniques d'Alger - Volet 2

Gangoueus et des jeunes sportifs algériens visitant le SILA

vient-on? Je leur explique mon émission littéraire. Les auteurs algériens que j’ai déjà reçus… On parle de littérature algérienne. Kateb Yacine. Pourquoi la fiction algérienne s’écrit principalement en français… Mais je remarque leur intérêt particulier pour une auteure qui fait le buzz au salon pour des oeuvres plutôt sensuelles. Avec une autre dame qui restera, elle, debout pendant l’échange, feuilletant les romans d’auteurs africains réédités par le ministère de la culture, disponible sur mon stand j’ai un tout autre retour. Elle évolue dans le monde du livre et elle vient de loin, d’une autre ville d’Alger pour acquérir des livres. Elle ne peut malheureusement pas rester pour assister à la conférence qui va débuter. Mais elle est très sensible aux questions qui touchent à l’édition numérique. Ces témoignages me donnent un regard très intéressant et ils me laissent pensifs quand les jeunes joueurs d’une équipe de football passent devant et me proposent de faire la photo ensemble. Ils sont marrants, et même si on n’a pas parlé livre, ce sera une des images que je retiendrai de ce salon. Des jeunes sportifs qui viennent dans l’enceinte des livres pour muscler leurs neurones.


Palabres avec Ibou

Je ne terminerai pas mes échanges sans vous avoir parlé d’Ibou. AvecNarriman Sadouni,Mohammed TouaoulaetIsmael Diabatépour lequel vous aurez droit à une chronique spéciale, Ibou fait partie de ces rencontres très riches que j’ai faites à l’Esprit Panaf. Et le partage fut énorme avec ce jeune homme plein de très bonnes idées. Il incarne un phénomène que j’observe qui me permet d’être extrêmement optimiste pour le continent. Je l’ai écouté s’exprimer longuement sur son parcours dont je ne parlerai pas ici. Il est juste brillant et totalement conscient de la nécessité de l’Afrique de se prendre en charge et dans le fond de tourner le donner aux satrapes qui gouvernent les états africains en prenant soin des intérêts de puissances étrangères. En écoutant Ibou, ce sont les voix des écrivains comme Hakim Bah, Elgas ou Mohamed Mbougar Sarr que je redécouvre, je retrouve le travail d’Emmanuel Leroueil, Nicolas Simel N’Diaye ou Joel Assoko créateurs duthinktankde l’Afrique des idées, je suis le discours de cette génération décomplexée dont on parlait à Genève. Celle d'une jeunesse africaine qui se prend sérieusement en charge et qui n'attend rien des pouvoirs en place. Une jeunesse qui veut se connecter, dénoncer les tares qui immobilisent le continent, qui est lucide sur la prédation des multinationales à l'endroit des ressources africaines. Ibou, je te salue et que tes projets trouvent un parfait accomplissement.

Atelier d’écriture et de création artistique autour du Bogolan

Il y a des interviews pour parler de la conférence que j’ai animée sur Blogs et réseaux sociaux. L’exercice fut difficile de parler de moi-même. Pourtant c’est un devoir aujourd’hui, sans que cela ne s’apparente à du narcissisme. Le deuxième point où je devais intervenir, c’était un atelier d’écriture. Je dois dire que j’appréhendais particulièrement ce moment. Car je n’avais aucune idée de la manière avec laquelle on aurait pu conduire ce moment ensemble avec deux autres artistes, à savoir Jaoudet Guessouma et Ismael Diabaté. Aucun thème prévu. Autant sauté à l’élastique dans les gorges du Verdon. Mais, l’affaire a été rondement menée. Le Bogolan s’est imposé comme un thème, une fois que son histoire fut dépouillée. Entre nous, après avoir donné quelques pistes et thèmes à explorer sur le concept du bogolan, le moyen d'expression qu'il constitue pour des femmes depuis des siècles et pour les hommes depuis peu aux participants ayant opté pour l’écriture, je me suis tellement plongé dans la rédaction d’une nouvelle autour d’un sujet que je trouve très riche en perspectives que j’ai délaissé les apprentis écrivains. Qu’ils me pardonnent, mais je dois le dire, nous avons passé un superbe après-midi. Bien qu’ayant observé Ismael Diabaté pendant tout ce séjour, j’ai mesuré combien l’exercice de la peinture avec un morceau de bambou était complexe. La réalité logistique m’a rattrapée. Un chauffeur m’attendait pour me raccompagner à l’aéroport Houari Boumedienne. C’est avec beaucoup d’émotions que nous nous sommes séparés. Après juste 3 jours de partage. Encore une fois, je ne peux que remercier Narriman Sadouni (dont je vous propose de découvrir l’interview qu’elle m’a accordée sur le fameux divan) ainsi que toute l’équipe de l’Esprit Panaf, les dirigeants du SILA et le ministère de la Culture.
Je termine ce deuxième volet avec une interview de Narriman Sadouni. C'est une grande Africaine que vous découvrirez. Une personnalité libre, engageante, chaleureuse et d'une prise de parole très édifiante.

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