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(anthologie permanente) Régis Lefort : "nos pensées suivaient l'ornière"

Par Florence Trocmé

Régis Lefort publie Louve aux éditions Tarabuste. Poezibao en propose un extrait et renvoie à une note de lecture de Laurent Albarracin.
nous cheminions depuis l’horizon
le matin en silence
les arbres serraient
et les bruyères formaient
une ligne nous précédant
comme un pressentiment
tantôt claires tantôt obscures
nos pensées suivaient l’ornière
chevauchaient l’étendue
tigrée sous les arbres
revenaient au chemin
aux aiguilles de pins
cachant brunes et vertes
d’anciennes traces de pas
la vie ne s’écoulait plus alors
sous les anneaux de fer
des plateaux désertiques
extraordinairement
sous de minuscules
trombes de poussière
donnaient la hauteur du vertige
et la roche soudain
échouait sur l’impossible
avancée du temps
au loin une ville
s’endormait une louve
que la respiration
animait du rêve animal
nous laissions derrière nous
une armée coupée de têtes
qui n’avaient pas résisté
à la sauvagerie des hordes
un précipice s’ouvrait devant
notre lente progression
lorsque nous arrivâmes
où la roche dessine la chute
nous levâmes des yeux abrupts
où les corps s’affaissaient
la nuit encourageait le soleil
à la rigueur de la lumière
soudain fut là et enveloppant
ce qui nous restait de courage
le profil métallique
des buissons de houx
s’allongeait au ras du sol
dans un brouillard argenté
ici et là des roses de gélatine
formaient une crête dentelée
au-dessus des baliveaux
nous entendions des grésillements
sous la lumière rasante
la bouche serrée sur notre attente
les bras aux aguets comme
on dirait du regard ses griffes
alors le sabot d’un cheval
fit entendre le fer de l’oracle
Régis Lefort, Louve, éditions Tarabuste, 2016, pp. 59 à 62.


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