J'ai en aversion les suites de film. À quelques exceptions près. Mais elles sont rares.
Les deux premiers Star Wars (1977 & 1980) et les deux premiers Godfather entre autre. Mais si je dois préciser "les deux premiers", c'est qu'il y a en a eu de trop, à mon humble avis.
Ironiquement, les deux films dont j'anticipe le plus la venue en 2017, sont des suites non calculées.
Quand je dis non calculée, c'est pour dire que lorsque le premier film a été lancé, aucune suite n'y était nécessairement prévue.
Les deux films sont Trainspotting dont le seul premier 13 secondes de la bande-annonce me donne toujours le frisson et qui sera lancé en février, et Blade Runner 2049, dont Denis Villeneuve signera l'improbable suite, 35 ans après la sortie du premier film de Ridley Scott et qui lui, sortira en octobre.
Une suite, non calculée est toujours improbable. Et c'est un exploit quand on réussit à donner un second souffle à l'inspiration du premier effort.
Blade Runner est né d'une nouvelle de l'auteur de science-fiction Phillip K. Dick: Do Androïds Dream of Electric Sheep? publiée en 1968. L'histoire racontait le monde post-apocalyptique dévasté de...1992...() où l'on tâche d'oublier le vide d'une existence vidée de ses animaux, cherchant à tout prix des lieux d'empathie comme source ultime de bien être des êtres humains parmi lesquels se trouvent des androïdes, émigrés de la planète mars, que notre héros, Rick Deckard, chasse, tout en voulant remplacer son mouton électrique par un vrai.
Martin Scorsese est l'un des premiers à s'intéresser à la nouvelle dès sa sortie en 1968. Mais ce sera l'agent littéraire (de Philip Roth entre autre), devenu producteur de film, Herb Jaffe qui en achète les droits d'adaptation cinématographiques en 1970. Il fera adapter la nouvelle par son fils, ce qui rend Phillip K. Dick si en furie qu'il se propose pour aller lui péter la gueule en personne. Vers 1977, Jaffe cède les droits et l'acteur Hampton Fancher s'en saisit. Il adapte la nouvelle et le projet est soumis au réalisateur de publicité britannique, mais qui vient de tourner son premier film. Ridley Scott. Ce dernier est plus intéressé à tourner un autre film de science-fiction qui le fera connaître du monde entier. Pendant ce temps. le scénariste David Peoples peaufine le script. Scott commence à travailler sur une adaptation de Dune, mais tout est si lent et lourd qu'il démissionne et saute dans le projet. Fancher vole le titre à une adaptation de William S. Burroughs d'une nouvelle de Alan E. Nourse.
Dick est toujours insulté de voir qu'on ne le consulte aucunement et a Hollywood en grippe. Toutefois, on lui fait parvenir le script et il s'en trouve impressionné. Quand on lui montre un univers visuel, il est encore plus impressionné et séduit et découvre que l'équipe a parfaitement compris le monde qu'il faisait naître de son imagination. Il dira avant de mourir que celui qui commence par le livre verra le film le compléter et vice-versa. Dick décède toutefois prématurément en mars 1982, avant que le film ne soit sorti.
Fancher a écrit les dialogues avec Robert Mitchum en tête dans le rôle de Rick Deckard. On courtise Dustin Hoffman longuement, mais sans succès, Dustin veut trop changer le matériel. On souhaite Hackman, Connery, Nicholson, Newman, Eastwood, Tommy Lee Jones, Schwarzennegger, Pacino ou Reynolds. Mais avec le succès de Raiders of the Lost Ark en 1981, le choix d'Harrison Ford s'impose. Celui-ci veut maintenant un rôle avec une certaine profondeur dramatique de toute manière.
Blade Runner explore le côté moralement douteux du héros, jetant des éclairages sombres au sens propre comme au sens figuré dans un décor dystopien inspiré de Hong Kong , des cours de design de Ridley Scott à l'université, du Bradbury Building de Los Angeles, de Nighthawks d'Edward Hooper, des films noirs et de Metropolis de Fritz Lang.
La facture visuelle, à elle seule, vaut tout le coup d'oeil. Saoûl mort ou sous effet psychotroniques, ce film passant en boucle, sans sons, sur un mur du fond est une sensation remarquable, dans un party.
Le film sort le 25 juin 1982 et ne fait pas l'unanimité. Il reste étouffé par la sortie de E.T. la même année.
Toutefois, il résiste au passage du temps. Et tel un bon vin, devient meilleur avec le temps. Culte, même.
Régulièrement, on le considère comme le meilleur film de science-fiction de tous les temps.
Personnellement, je le regarde facilement une fois par année.
(Et serai tout aussi mordu du film de son frère Tony, lancé l'année suivante: The Hunger)
Voilà pourquoi il me paraissait hautement inconcevable que ce film ait pu avoir une suite.
Qu'on ose retoucher le premier chef d'oeuvre.
Mais depuis qu'une bande annonce a été mise en ligne...
...j'avoue une certaine excitation, presqu'on honteuse.
Une suite à un chef d'oeuvre ne peut que diminuer la première oeuvre en général.
Mais pas tout le temps.
Je me perdrai asssurément dans une salle en octobre 2017.
(en février aussi)