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[Critique série] THE CROWN – Saison 1

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique série] THE CROWN – Saison 1

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Titre original : The Crown

Note:

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Origine : Grande-Bretagne/États-Unis
Créateur : Peter Morgan
Réalisateurs : Stephen Daldry, Philip Martin, Julian Jarrold, Benjamin Caron.
Distribution : Claire Foy, Matt Smith, Vanessa Kirby, Eileen Atkins, John Lithgow, Jared Harris, Alex Jennings, Lia Williams, Stephen Dillane, Greg Wise, Ben Miles…
Genre : Biopic/Drame/Adaptation
Diffusion en France : Netflix
Nombre d’épisodes : 10

Le Pitch :
Sortie blessée mais victorieuse de la Seconde Guerre mondiale, l’Angleterre fête le mariage d’Elisabeth avec Philip Mountbatten. Alors que le roi George VII montre des signes de faiblesse, et que Winston Churchill, l’un des héros de la guerre contre le nazisme, est réélu au poste de Premier Ministre, la jeune femme profite d’une insouciance qui sera de courte durée. Tôt où tard, celle qui figure à la première place dans l’ordre de succession, devra assumer les responsabilités inhérentes à son rang…

La Critique de la saison 1 de The Crown :

On trouve dans la filmographie du scénariste et dramaturge Peter Morgan beaucoup de bonnes choses. Frost/Nixon, l’heure de vérité par exemple, l’un des meilleurs films de Ron Howard (Morgan a aussi signé la pièce), Le Dernier Roi d’Écosse de Kevin Macdonald, Deux sœurs pour un Roi, de Justin Chadwick ou encore Rush, un autre bon cru signé Ron Howard. Mais au fond, son truc à Peter Morgan, c’est la Reine d’Angleterre. Elisabeth II que l’on retrouve ainsi au centre de The Queen, le superbe film de Stephen Frears avec Helen Mirren, que Morgan a écrit, et The Audience, une pièce toujours avec Helen Mirren dans laquelle Morgan raconte les multiples entretiens de la souveraine avec ses premiers ministres au fil des années de son long règne. La Reine que l’on retrouve donc dans The Crown, l’ambitieuse série produite et diffusée par Netflix, qui s’impose rapidement comme l’un des plus grands tours de force de Peter Morgan et en toute logique simultanément comme l’une des œuvres les plus fascinantes jamais réalisées sur la famille royale britannique.

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God save the Queen

Si le long-métrage The Queen se focalisait sur la période trouble qui suivit le décès accidentel de Lady Di, The Crown débute au moment où Elisabeth, la plus âgée des filles du roi George VII (celui du Discours d’un Roi), s’apprête à épouser Philip Mountbatten. Un événement qui sera amené a précéder de peu la prise de pouvoir de la jeune femme, qui devra succéder à son défunt père.
Un point de départ très intéressant, qui permet à la série de captiver immédiatement. Il faut dire que la période est propice. La Seconde Guerre mondiale est encore dans les esprits, le pays se relève doucement et Winston Churchill, le grand héros qui contribua largement à la défaite d’Hitler, fait plus que jamais partie du tableau. Plein d’éléments que Peter Morgan prend en compte pour nous narrer une passionnante histoire, en prenant bien garde d’y mettre les formes et l’éloquence nécessaires, mais sans pour autant tomber dans le piège facile de la chronique un peu poussiéreuse.
The Crown qui s’impose aussi et surtout comme une série fidèle. Seuls quelques petits détails relèvent de la fiction. De menus ajouts qui n’ont pour but que de souligner les thématiques et d’aider l’émotion et le lyrisme à résonner avec encore plus de force. Là est le travail d’un homme respectueux du symbole auquel il s’intéresse mais là est aussi l’œuvre d’un artiste qui n’hésite pas, comme il avait pu le faire avec The Queen, à gratter le vernis des apparences pour aller au-delà de la représentation publique. Avec lui, la Reine, son mari et tous les membres de la famille royale sont avant tout des êtres humains parachutés malgré eux dans une situation qui implique des sacrifices et des compromis et dont beaucoup s’acquittent avec plus ou moins de ressentiments.

Family business

Ainsi, cette première saison s’attache vraiment à mettre en opposition la fonction et l’humain. Souvent, Peter Morgan souligne en filigrane le dialogue qui s’opère entre Elisabeth II et Elisabeth, la jeune femme qui, si elle avait pu, n’aurait pas embrassé la même destinée. La question des relations de la Reine avec son mari souligne d’ailleurs beaucoup cette thématique. Philip Mountbatten étant le premier à essuyer les plâtres quand vient le moment pour son épouse de devenir la souveraine. Les protocoles, la tradition, les obligations, tout ce qui constitue l’essence même de la fonction royale vient s’opposer à l’idée d’une vie normale. Pour autant, jamais la série n’oublie non plus de mettre en exergue le sens des responsabilités de son personnage principal, en rendant hommage à sa dévotion et à son désir de faire au mieux pour faire coexister les deux facettes de sa personne. Toujours sans forcer, avec une pudeur et une pertinence qui forcent le respect et qui permettent à The Crown de ne jamais sombrer dans l’excès et d’encourager l’empathie et l’identification. Même chose quand le show choisit de se focaliser longuement sur Edouard VIII, le frère de George VI, qui abdiqua avant son couronnement, pour privilégier sa relation avec une américaine que les règles de la monarchie excluaient d’office. Un homme meurtri dont les interventions dans le récit se posent comme autant de remises en question de la fonction suprême et de son incapacité à évoluer, dans un mépris constant des sentiments de ceux qui la servent. Le rôle de Margaret, la sœur d’Elisabeth étant aussi de mettre la famille royale face à ses contradictions et à son caractère froid. De cette façon, The Crown traite du sacrifice et permet, tout en se montrant parfaitement divertissante, de mieux comprendre certains des mécanismes cachés sous les apparats.

Winston Churchill : l’autre héros de The Crown

De par son titre, la série annonce clairement la couleur et affirme traiter avant tout de la Reine et de sa famille. Quelle bonne surprise de constater rapidement que celle-ci prend aussi le temps de nous parler de Winston Churchill. Un personnage fascinant, campé ici par un extraordinaire John Lithgow, qui se devait d’être présent, ne serait-ce que parce que sa fonction l’amenait à régulièrement interagir avec la Reine, mais dont l’omniprésence confère un surplus d’émotion loin d’être négligeable. Au début uniquement rattaché aux affaires royales, il devient le point d’attache d’une intrigue parallèle où sont abordées des questions d’ordre politique mais aussi d’ordre privé. The Crown s’invite au 10 Downing Street et dans la résidence de campagne de Churchill pour nous en faire un portrait poignant, dont l’intensité est bien sûr imputable en grande partie à la performance de Lithgow. Un comédien qui arrive, avec un naturel incroyable à comprendre un personnage pourtant complexe. Dur, autoritaire, il sait aussi nous dévoiler une sensibilité plutôt méconnue qui va de pair avec une vulnérabilité désarmante, comme nous le montre par exemple le remarquable épisode 9, dans lequel Churchill pose pour un peintre en vue de son 80e anniversaire. Sans voler la vedette à la Reine, Winston Churchill est sans aucun doute quasiment aussi important que cette dernière. Sa dévotion, son respect pour la couronne et pour la tradition ,mais aussi la bataille qu’il mène contre la vieillesse, contre ses opposants, et son imposant héritage, dû à ses exploits passés, en font un personnage crucial, parfaitement écrit et interprété.

Casting Royal

L’interprétation justement, est l’un des gros points forts de The Crown. Au premier plan, Claire Foy impressionne en permanence, grâce à une approche toute en retenue, d’un rôle complexe. D’une beauté parfaitement à propos, charismatique et terriblement émouvante quand elle traduit, sans un mot, les paradoxes et les craintes de son personnage, Claire Foy parvient également à très bien retranscrire la montée en puissance d’Elisabeth II quand fut venu pour elle le temps de s’affirmer face à un establishment parfois empreint de doutes quant à sa capacité à incarner les valeurs sacrées de la couronne. À ses côtés, Matt Smith, l’ancien Doctor Who, est lui aussi impeccable. Il est le principal grain de sable. Le rebelle qui provoque la remise en question. Celui qui essaye de nager à contre-courant. Tout l’inverse en somme du Roi George VII, surtout présent en début de saison, qui trouve en Jared Harris, une incarnation digne et majestueuse. Même sentence pour Vanessa Birby, superbe princesse Margaret ou pour Victoria Hamilton, qui joue une reine mère émouvante à plus d’un titre, sans se départir d’une classe de circonstance.

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Tableau de maître

Quand on pense à Buckingham Palace et à ses occupants, on pense souvent à ces fictions dont la télévision nous a abreuvé ou à des reportages soporifiques. The Crown va au-delà. Elle dépasse les espérances et ignore les clichés. Elle s’avère rythmée, fascinante, parfois drôle et insolente, parfois plus solennelle et émouvante mais jamais ô grand jamais ennuyeuse. Parfait complément de The Queen et du Discours d’un Roi, la série de Peter Morgan est aussi d’une beauté à couper le souffle. Netflix a mis les moyens et ça se voit (100 millions pour les 10 épisodes de la saison 1). Que ce soit les décors, les costumes, tout est parfait. La reconstitution, plus vraie que nature, ne manque pas de souffle, à l’image de la musique (le générique est signé Hans Zimmer, excusez du peu) et au final, c’est un tableau de maître que nous offre Netflix, sur un plateau d’argent, avec ce petit quelque chose de si significatif qui nous encourage à enchaîner les épisodes jusqu’à la fin. La présence de Stephen Daldry (Billy Elliot, The Hours, The Reader), qui réalise le pilote, donnant le La aux autres metteurs en scène pour conférer une unité assez exceptionnelle à l’ensemble.

En Bref…
Certes moins violente et sulfureuse que Game Of Thrones, The Crown n’en reste pas moins tout aussi passionnante. Fastueuse immersion au cœur de la famille royale et plus largement du pouvoir britannique, cette formidable série met en avant un parterre d’acteurs au diapason et nous raconte une histoire qu’elle sait rendre limpide, tout en soulignant son humanité. Au-delà des protocoles, The Crown narre l’histoire de femmes et d’hommes croulant sous le poids d’un héritage. Celui de l’Histoire…

@ Gilles Rolland

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  Crédits photos : Netflix


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