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Essais I

Publié le 13 janvier 2017 par Pralinerie @Pralinerie
Voilà des années que je voulais lire Montaigne autrement qu'un petit extrait par-ci, par-là. Je ne suis pas sûre que lire dans l'ordre et d'affilée les trois tomes ait une utilité. Je ne sais pas par exemple s'il y a une temporalité qui fait revenir l'auteur sur ce qu'il a pu dire. Mais j'avais envie d'avoir une vision plus complète, moins fragmentaire de cette oeuvre.  Ribera, Democrite Chaque chapitre traite d'un sujet souvent intemporel et universel, qu'il s'agisse de l'homme et de ses traits de caractères ou de ses actes. Émaillant de citations et de références diverses ses réflexions, il offre un panorama historique très riche sur la vision de tel ou tel vice ou vertu à travers les âges. La morale antique y a donc une large place et l'on côtoie sans s'étonner Plutarque, Sénèque, Platon et quelques autres. On sent bien qu'on est à ce moment de l'histoire où l'on redécouvre et l'on traduit tous ces classiques car ils peuplent véritablement Les Essais de citations parfois tellement nombreuses qu'on ne sait plus bien si Montaigne est toujours là. Et s'il se la joue pas un peu trop érudit ! De la lecture des anciens découlent des préceptes pour mener une vie bonne.  Mais bon, on distingue tout de même une pensée personnelle, un cas intime, celui de l'homme Montaigne, qui s'examine et espère, via cette introspection, tendre à l'universel. S'il se perd pas mal dans les citations et les digressions, il semble malgré tout retomber chaque fois sur ses pattes et conclure son chapitre de façon cohérente. Mais il est vrai qu'on le sent parfois près de la contradiction à force de vouloir présenter tout ce qui lui tombe sous la main sur un thème. Ah, et bien sur, le titre chapitre reflète plus ou moins son contenu...  Malgré mes quelques réserves et des sujets parfois un peu loin de nous, l'ensemble est aujourd'hui encore très parlant. Je vous propose de le vérifier à travers de ces quelques citations... 
"Il n'y a rien en bon escient en notre puissance que la volonté : en celle là se fondent par nécessité et s’établissent toutes les règles du devoir de l'homme" 
"L'âme qui n'a point de but établi, elle se perd : car comme on dit, c'est n'être d'aucun lieu que d'être partout" 
"Voilà pourquoi se doivent à ce dernier trait toucher et éprouver toutes les autres actions de notre vie. C'est le maître jour, c'est le jour juge de tous les autres : c'est le jour, dit un ancien, qui doit juger de toutes mes années passées. Je remets à la mort l'essai du fruit de mes études. Nous verrons là si mes discours partent de la bouche, ou du coeur" Cicéron dit que philosopher ce n'est autre chose que s'apreter à la mort. C'est d'autant que l'étude et la contemplation retirent aucunement notre âme hors de nous, et l'embesognent à part du corps, qui est quelque apprentissage et ressemblance de la mort: ou bien c'est que toute la sagesse et discours du monde se résoud enfin à ce point, de nous apprendre à ne craindre point à mourir. De vrai, ou la raison se moque, ou elle doit viser qu'à notre consentement, et tout son travail tendre en somme à nous faire bien vivre, et à notre aise, comme dit la Sainte Ecriture. Toutes les opinions du monde en sont là, que le plaisir est notre but, quoi qu'elles en prennent divers moyens" 
"Quoi qu'ils en disent, en la vertu même, le dernier but de notre visée, c'est la volupté" 
"Les principaux bienfaits de la vertu, c'est le mépris de la mort, moyen qui fournit notre vie d'une molle tranquillité, et nous donne le gout pur et amiable: sans qui toute autre volupté est éteinte" 
"Et pour commencer à lui ôter son plus grand avantage contre nous, prenons voie toute contraire à la commune. Ôtons lui l’étrangeté, pratiquons le, accoutumons le, n'ayons rien si souvent en la tête que la mort". 
"Il est incertain où la mort nous attende, attendons la partout. La préméditation de la mort, est préméditation de la liberté. Qui a appris à mourir, à désappris à servir. Il n'y a rien de mal en la vie, pour celui qui a bien compris, que la privation de la vie n'est pas mal. Le savoir mourir nous affranchit de toute subjection et contrainte" 
"L'utilité du vivre n'est pas en l'espace : elle est en l'usage" 
"Car c'est en vérité une violente et traîtresse maîtresse d'école, que la coutume. Elle établit en nous, peu à peu, à la dérobée, le pied de son autorité : mais par ce doux et humble commencement, l'ayant rassis et planté avec l'aide du temps, elle nous découvre tantôt un furieux et tyrannique visage, contre lequel nous n'avons plus la liberté de hausser seulement les yeux" 
"Ce qui est hors des gonds de la coutume, on le croit hors des gonds de la raison" 
"Plutarque loue Philopomene, qu'étant né pour commander, il savait non seulement commander selon les lois, mais aux lois même quand la nécessité publique le requerait" 
"Notre âme s'élargit d'autant plus qu'elle se remplit" 
"Je m'en vais ecornifflant par-ci, par là, des livres, les sentences qui me plaisent ; non pour les garder (car je n'ai point de gardoire) mais pour les transporter en celui-là ; où à vrai dire, elles ne sont non plus miennes, qu'en leur première place" 
 "A quoi faire la science, si l'entendement n'y est?" 
"Il ne faut pas attacher le savoir à l’âme, il l'y faut incorporer : il ne faut pas l'arrouser, il l'en faut teindre ; et s'il ne la change, et améliore son état imparfait, certainement il vaut beaucoup mieux le laisser là" 
"Autant que l'âme est plus vide, et sans contrepoids, elle se baisse plus facilement sous la charge de la première persuasion" 
"En l'amitié de quoi je parle, elles se mêlent et confondent l'une en l'autre, d'un mélange si universel, qu'elles effacent, et ne retrouvent plus la couture qui les a jointes" 
"Car cette parfaite amitié, de quoi je parle, est indivisible : chacun se donne si entier à son ami, qu'il ne lui reste rien à départir ailleurs" 
"Nulle qualité nous embrasse purement et universellement" 
"L'homme d'entendement n'a rien perdu, s'il a soi-même" 
"Les hommes (dit une sentence grecque ancienne) sont tourmentés par les opinions qu'ils ont des choses, non par les choses mêmes" 
"C'est plutôt l'impatience de l'imagination de la mort, qui nous rend impatients de la douleur" 
"Pourquoi de même n'estimons nous un homme par ce qui est sien ? Il a un grand train, un beau palais, tant de crédit, tant de rente : tout cela est autour de lui, non en lui" 
"Il n'est rien si empêchant, si dégoûté que l'abondance" 
"Le vrai moyen, ce serait d'engendrer aux hommes le mépris de l'or et de la soie, comme de choses vaines et inutiles" 
"N'est-ce pas un singulier témoignage d'imperfection, r'assoir notre contentement en aucune chose, et que par désir même et imagination il soit hors de notre puissance de choisir ce qu'il nous faut" 
"Aux vices leur heure, son heure à Dieu, comme par compensation et composition"
Essais I

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