De la perte. Et d’une perte telle
qu’elle pille l’esprit – jusqu’à la perte même
de l’esprit. Commencer avec cette pensée : sans rime
ni raison. Et puis simplement attendre. Comme si le premier mot
venait seulement après le dernier, après une vie
d’attente du mot
qui était perdu. Ne pas dire plus
que la stricte vérité : les hommes meurent, le monde déçoit,
les mots
n’ont aucun sens. Et par conséquent ne rien demander
que les mots.
Mur de pierre. Coeur de pierre. Chair et sang.
Autant que tout ceci.
Plus.
*
From loss. And from such loss
that marauds the mind – even to the loss
of mind. To begin with this thought: without rhyme
or reason. And then simply to wait. As if the first word
comes only after the last, after a life
of waiting for the word
that was lost, To say no more
that the truth of it: men die, the world fails, the words
have no meaning. And therefore to ask
only for words.
Stone wall. Stone heart. Flesh and blood.
As much as all this.
More.
***
Paul Auster (né en 1947 à Newark, New Jersey, États-Unis) – Dans la tourmente (Editions Unes, 1988) – Traduit de l’américain par Françoise de Laroque
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