Quel bonheur de découvrir une nouvelle voix! Nouvelle pour moi, s’entend, car l’homme publie depuis près de 40 ans! Des amis m’avaient recommandé certains des titres de William Boyd, que je n’ai malheureusement pas trouvés en version numérique, un must puisque je suis en Floride et n’ai accès qu’aux œuvres dématérialisées. J’ai cependant mis la main (au figuré, bien entendu) sur un de ses plus récents romans, L’Attente de l’aube, et je n’ai pas été déçue.
Ce monde, non perçu par nos sens, demeure là-bas comme un squelette, appauvri et sans passion. Quand nous ouvrons nos yeux, quand nous sentons, entendons, touchons et goûtons, nous ajoutons de la chair à ces os selon notre nature et la manière dont notre imagination fonctionne. Ainsi l’individu transforme «le monde» – l’esprit d’une personne tisse sa propre et éclatante couverture sur une réalité neutre. Ce monde que nous créons est une «fiction», il est à nous seul, il est unique et non partageable.
C’est dans l’antichambre de Bensimon que Lysander fera la connaissance de Hettie Bull. Leur relation torride confirmera à Lysander la guérison de son trouble sexuel, mais lui fera mettre le doigt dans un engrenage dont il ne sortira pas sans peine. L’intrigue accélère. De fil en aiguille, sous une fausse accusation de viol, il devra accomplir de périlleuses missions pour son pays désormais en guerre. Et toujours cette impression que les choses et les gens ne sont peut-être pas qui ils prétendent être. Qui sont les alliés, qui sont les ennemis? Nous nagerons jusqu’à la fin dans les eaux troubles des apparences.
William Boyd illustre avec style et ingéniosité cette idée que je partage: la réalité et la fiction sont indissociablement imbriquées. Voilà quelqu’un que je n’ai pas fini de fréquenter.
William Boyd, L’Attente de l’aube, Éditions du Seuil, Paris, 2012, 299 pages