Entrer dans la dixième année devrait s'inscrire dans la routine, le train-train pour reprendre le titre d'une pièce à l'affiche actuellement ... Pas vraiment, et c'est heureux. D'abord parce que la pluralité des thèmes que je traite permet d'entretenir la flamme du plaisir, de la découverte et du partage.
Les moments de bilan sont précieux parce qu'ils obligent à regarder dans le rétroviseur avant de peut-être mettre le clignotant pour bifurquer. Je me plie à l'exercice chaque année le 13 février (lire ici les précédents).
Depuis quelques mois la pression des chiffres devient franchement pénible. Un tout "jeune" bloggeur se targuant de 20 000 lecteurs mensuels aura la cote auprès des attachés de presse. Pourtant rien ne dit que ses lecteurs lisent jusqu'au bout ses articles, ni qu'ils suivent ses avis. Combien de "j'aime" sur Facebook sont lancés machinalement, du bout du doigt, d'un geste aussi vite fait que vite oublié ?
Je refuse de donner des chiffres de consultation. Je reste campée dans la posture de Cyrano (qu'il faut comprendre au second degré) lequel refusait de se battre dans l’espoir du succès. Parce que c’est bien plus beau lorsque c’est inutile !
Si je visais la rentabilité je céderai aux sirènes de la publicité, et tant pis si les articles se truffent d'écrans clignotants. Je ne consacrerais pas 6 ou 8 heures à vérifier mes sources pour écrire un portrait le plus complet possible d'un artisan. Je ne passerais pas des heures à reprendre une à une les photos que j'ai faites en cuisine auprès d'un chef avec le souci de ne surtout pas dénaturer son travail. Je ne tergiverserais pas au mot près en écrivant les critiques de théâtre ou de livres.Je ne passerais pas de temps à chroniquer des premiers romans (qui n'auront peut-être pas de "grand" succès) et je me focaliserais sur les grandes pointures. J'avancerais à grands coups de serpe et je garderais quelques heures quotidiennement pour pianoter des messages, copier des hashtags, faire des liens et réseauter à qui mieux mieux.
Servir de banderole pour des écrans publicitaires non merci. Je choisis mes sujets et je ne traite pas telle ou telle marque avec l'optique d'engranger des lecteurs ou de lui en fournir. Ma notoriété ne me préoccupe pas davantage. Je sais que la vie est fugace et que dans quelques temps je ne serai plus là pour écrire. Les articles que j'ai publiés demeureront et seront consultés encore régulièrement. La trace sera sans doute modeste mais elle sera. Longtemps longtemps après que les poètes ont disparu leurs chansons courent encore dans les rues.Les posts fondent comme neige au soleil sur facebook alors que certains billets reviennent sur les blogs en tête des consultations plusieurs années après leur publication. Je n'aurais peut être pas parié sur Anne-Lise coursier de quartier à Evreux dont pourtant l'article a tant caracolé en tête des statistiques ces dernières semaines.
Dans le domaine littéraire j'ai eu la surprise de voir revenir parmi les articles les plus lus une critique d'un premier roman de Nina Leger, publiée deux ans plus tôt et qui m'a alertée sur la sortie d'un second roman. Je suis impatiente de lire celui-là dont le titre, Mise en miettes, est déjà une promesse. C'est une de mes plus grandes joies que d'avoir accompagné un auteur avant sa célébrité.
Le succès est imprévisible mais je ne regrette aucune publication et c'est l'essentiel. De plus en plus, une nouvelle rencontre fait écho à un article déjà publié, dans un mouvement circulaire de nature encyclopédique, dans son sens étymologique ... assez logique en fin de compte avec 2500 billets publiés...A quoi sert un blog ? La question mérite toujours d'être posée. Il n'y a pour moi qu'une seule réponse qui vaille, et comme le chantait le poète : je veux être utile à vivre et à rêver ... à ceux qui m'aimeront ... à vivre et à bloguer.