Un spectacle en cours de création m’a amené à lire successivement un entretien avec Erri de Luca et, de cet auteur, deux livres où il exprime sa relation avec la montagne.
L’entretien est dans une revue justement nommée L'Entretien. Il s’agit ici de conversations qui se sont déroulées en plusieurs fois et que les responsables de la revue, Laure Adler et Alain Veinstein, ont regroupées. On y découvre d’abord la passion d’Erri de Luca pour la montagne dont il dit qu’il reste à la surface (ni plonger dans l’eau, ni faire de la spéléo), comme il « reste à la surface des mots » quand il lit ou quand il écrit. Rester à la surface ne signifie pas survoler mais bien être en contact. Chaque jour, quand il était ouvrier, il se levait une heure plus tôt que nécessaire pour lire, en hébreu, la Bible. Et cela, sans croire en Dieu. Cela rythmait sa journée, c’était un temps à lui. Il parle aussi de ces musiques dont le corps a besoin pour soutenir l’effort. Et cela lui fait rencontrer une langue, le yiddish, qu’il « raccroche à (s)on napolitain », langues « très affectueuses, pleines de diminutifs, d’affection pour les personnes ». Ouvrier donc, militant de la gauche révolutionnaire, cherchant à employer les mots justes, ayant lu beaucoup de livres (« le but premier étant de tenir compagnie à mon père devenu aveugle »), de son expérience il tire cet enseignement : « Les mots sont les outils les plus forts à la disposition des opprimés ».