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[Critique] AMERICAN HONEY

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] AMERICAN HONEY

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Titre original : American Honey

Note:

★
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Origine : États-Unis/Royaume-Uni
Réalisatrice : Andrea Arnold
Distribution : Sasha Lane, Shia LaBeouf, Riley Keough, Arielle Holmes, McCaul Lombardi, Will Patton, Raymond Coalson, Chad McKenzie Cox, Crystal B. Ice, Garry Howell, Dakota Powers…
Genre : Drame
Date de sortie : 8 février 2016

Le Pitch :
Star, une ado rebelle de l’Oklahoma issue d’un foyer troublé et qui n’a rien à perdre, décide un jour de fuguer pour rejoindre une bande de marginaux alors qu’ils traversent le Midwest, vendant des abonnements à des magazines au porte-à-porte. Trouvant ses repères au sein de ce groupe de jeunes qui vivent la vie à fond, elle commence à profiter de sa nouvelle existence aventurière, passant ses journées à défier la loi et ses nuits à faire la fête, et finira même par tomber amoureuse de Jake, un garçon de la bande…

La Critique d’American Honey :

De Wim Wenders à l’album de U2 Rattle and Hum, il y a une longue tradition d’artistes européens qui débarquent aux States pour émettre des déclarations sociologiques généralistes et grandiloquentes sur « ce que signifie le rêve américain », ou « l’esprit de l’Amérique » (respect à Lars Von Trier pour avoir au moins trouvé la combine efficace de rester chez lui tout en faisant pareil). La plupart de ces projets ont tendance à baratiner et sont souvent assez hypocrites, même si il est quand même fascinant de voir des endroits connus au travers d’un regard inconnu.

American-Honey-Riley-Keough

American Girl

Le American Honey d’Andrea Arnold a certainement beaucoup à dire sur l’Amérique, maladroitement à cheval entre le mythique et le particulier jusqu’à ce que tout ce qui lui était euphorique finit par devenir épuisant. Le film peut à peine soutenir ses nobles ambitions ni justifier sa longueur absurde et quasi-interminable (2 heures et 42 minutes !), mais certaines scènes restent néanmoins longtemps en tête. Réalisatrice britannique, Arnold est surtout connue pour Fish Tank, son drame impressionnant cockney-des-cités, et une adaptation des Hauts de Hurlevent si viscérale que les fans du roman préfèrent l’oublier à cause de son scénario irrévérencieux et de sa sale perversion du langage. Elle a une affinité pour des enfants du quart-monde et fait des merveilles avec des acteurs non-professionnels.

La nouvelle venue, Sasha Lane, est la meilleure raison de voir American Honey, elle qui incarne une jeunesse troublée à peine sortie de la vingtaine et se cramponnant aux bas échelons de l’échelle économique brisée de l’Oklahoma. Elle finit par fréquenter une bande de jeunes marginaux qui voyagent à travers le pays dans un van, faisant du porte-à-porte pour vendre des abonnements sous la tutelle de ce renard de Shia LaBeouf. LaBeouf qui joue ici une déclinaison du Parfait Coquin d’Oliver Twist avec des piercings et une queue de cheval.

Land of hope and dreams

Il est évidemment impossible de gagner sa vie en vendant des abonnements à des magazines dans une époque où même écrire pour un magazine ne constitue plus vraiment un boulot stable, mais soyons cléments et laissons au film sa métaphore centrale. Celle qui affirme que ces jeunes malheureux sont surtout en train de se vendre eux-mêmes, inventant des anecdotes larmoyantes pour jouer sur la culpabilité de leurs clients bien nantis. Lane est merveilleusement vulnérable et il est génial de voir LaBeouf (qui nous rappelle ici à quel point il peut être un acteur efficace quand il n’est pas occupé à être la célébrité la plus insupportable du monde) lui enseigner les méthodes et les combines de leurs visites à domicile dans les quartiers riches. Les deux ne tardent pas à faire voler les étincelles, ce qui demeure un problème puisqu’il est aussi l’amant de la Krystal de Riley Keough, la Fagin de ce récit moderne à la Dickens (on avait bien mentionné Oliver Twist un peu plus haut, hein !)

Habillée d’un bikini au motif drapeau des Confédérés, la petite-fille d’Elvis Presley est censée jouer l’incarnation impitoyable du capitalisme, amplifiant l’iconographie autour d’elle et écrasant les rêves de notre couple sous sa botte. Ou quelque-chose comme ça. American Honey se vautre grave à chaque fois qu’il essaye de voir les choses en grand, lorsque les dialogues largement improvisés se transforment en discours laborieux sur les rêves ou deviennent des proclamations prétentieuses du genre « j’ai l’impression de baiser l’Amérique ! », mais il est excellent quand il met en exergue des connexions intimes.

Les non-dits entre les personnages, ainsi que leurs chants en groupe sur la musique pop à la radio (et oui, la chanson American Honey de Lady Antebellum fait partie de la bande-son), font partie des moments qui perdurent dans l’esprit, tout comme cette incroyable tension qui surgit de temps en temps. Ces jeunes gens sont si mal-aimés, abandonnés et délaissés par la société qu’il y a un trouble menaçant qui accompagne la moitié des scènes. On passe la majorité du film à s’inquiéter que l’un d’entre eux pourrait se faire tuer à tout moment. Arnold filme le road trip comme des mini panoramas cadrés dans son format préféré (1.33 en forme de boîte), compressant notre vue de spectateur afin de souligner la petitesse de ces jeunes et de leurs horizons.

Radio nowhere

Mais ce ne sont pas seulement les paysages et les perspectives visuelles qui se retrouvent à l’étroit. Après avoir mis en place son pitch et ses personnages, American Honey n’a nulle part où aller. Des scènes entières sont répétées durant la troisième heure, et beaucoup d’entre elles plus d’une fois. Lane et LaBeouf se disputent et se réconcilient ad infinitum, sans que le film n’offre un nouvel angle ou un nouveau développement à leur dilemme. Pendant ce temps, des personnages secondaires très prometteurs (comme une geek maladroite de Star Wars interprétée par la superbe Arielle Holmes de Mad Love in New York) disparaissent dans le décor. Et puis tout le monde chante une autre chanson dans le van. Encore une !

En Bref…
Il y a beaucoup à admirer dans American Honey, mais rien qui puisse justifier sa durée incroyablement excessive. Allant du très bien au très long, le film s’achève enfin (Dieu merci) sur une note prévisible qui aurait pu être jouée au moins une heure plus tôt. C’est un road movie qui finit par tourner en rond.

@ Daniel Rawnsley

American-Honey-cast
  Crédits photos : Diaphana Distribution


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