Le monde entrepreneurial est souvent critiqué pour son immobilisme, son organisation hiérarchique et linéaire. Pourtant, l’entreprise est l’un des principaux acteurs de l’innovation. En matière de développement de la créativité, l’art aurait beaucoup à apprendre à l’entreprise.
Quelle est l’essence de l’entreprise sinon l’organisation sociale de la créativité ? Comme l’artiste, elle crée de nouveaux modèles et ouvre de nouvelles perspectives. Elle épouse les soubresauts de la société et diffuse les visions d’un futur désirable, meilleur. Elle conçoit de nouveaux produits et de nouveaux usages, elle fait rêver, elle fait peur, elle détruit et elle crée dans un mouvement toujours abstrait. Oui, l’essence de l’entreprise, c’est avant tout de créer. Et comme le disait Pablo Picasso, « chaque enfant est un artiste. Le problème, c’est de rester artiste lorsque l’on grandit ». Or, l’organisation traditionnelle du travail - hiérarchique voire parfois aliénante -freine cette âme d’artiste et l’ancre dans des carcans d’un autre temps. L’enjeu de l’entreprise de demain est donc de faire du travail un art où chacun serait libre d’exercer sa créativité. On parle beaucoup aujourd’hui d’optimisation et de performance. Mais qu’est-ce que cela veut dire à l’ère de la numérisation des produits et services et de la robotisation ? On sait aujourd’hui, qu’avec les avancées majeures de l’intelligence artificielle, le travail de demain sera radicalement différent de celui d’aujourd’hui. Sans remplacer l’homme, le robot pourrait effectuer les tâches les plus mécaniques et répétitives et laisser donc le monopole de la créativité et de l’itération au salarié de demain.
Aussi, peut être que art et entreprise ont beaucoup à s’apporter. Sans pour autant prophétiser sur l’entreprise de demain conçue comme un véritable atelier d’artiste, une prospective encore trop étouffée par des logiques et paradigmes économiques quelquefois antagonistes, on peut toutefois déjà percevoir tout l’intérêt de faire de l’entreprise une œuvre d’art. Au sens propre comme au sens figuré. Une œuvre d’art dans son organisation, en fédérant ses équipes par des team buildings et autres ateliers collectifs (Design thinking, etc.) qui stimulent la créativité en entreprise. Mais aussi une œuvre d’art dans sa communication, en créant autour de l’image de marque, un véritable univers artistique, esthétique et visuel. En cela, le dialogue entre l’entreprise et les artistes doit s’accentuer, sinon, se poursuivre. Car créer c’est avant tout imaginer, rêver des réalités futures, des esthétiques, des utopies. Le réalisme entrepreneurial est nécessaire à la performance mais doit s’allier, dans la mesure du possible, aux rencontres et discussions qui ouvrent le champ des possibles. C’est collaborer mais aussi et surtout créer des écosystèmes internes qui favorisent l’émergence d’idées novatrices issues d’un véritable dialogue entre les différentes formes de créativité, dans toute leur diversité et mixité. Faire de l’entreprise un tableau où chacun apporterait sa couleur, son angle, ses formes, ses représentations, ses visions... terreau fertile à l’innovation. « La créativité est contagieuse, faites la tourner » disait Albert Einstein.